« Tu es conne, tu es une incapable », « après l’opération tu iras avec l’interne pour lui tailler une petite pipe car il a besoin d’être détendu », « ces mains sont trop délicates pour faire de la chirurgie, elles seraient bien mieux posées sur le sexe du chirurgien qui est en train de bosser »… Ces phrases Olivia les a couramment entendues pendant son externat et son internat. Pour elle, « cela faisait partie du folklore. Le harcèlement a toujours fait partie du quotidien à l’hôpital mais on met du temps à comprendre que cela en est. On a tendance à tout minimiser. On nous apprend à nous taire. »
Lors d’un stage pendant son internat aux urgences, alors âgée de 26 ans, cela prend une autre tournure. « À la fin de mon troisième semestre, c’est le stage qui m’a fait du mal et m’a obligée à arrêter », raconte-t-elle.
Prise de conscience
Entourée de co-interne de 10 ans ses aînés, tous faisants fonctions d’internes (FFI) venant du même pays, Olivia subi humiliations sur humiliations devant toute l’équipe médicale. Tous les matins la présentation des cas de malade est l’objet de critiques à répétition. Olivia commence à prendre conscience de sa détresse. « Un jour, j’ai pleuré au travail, je m’effondrais dès que je ne savais pas quelque chose ou que j’avais besoin de demander une information. Moi qui suis de nature très ponctuelle, j’étais constamment en retard. Je ne prenais plus soin de moi. »
Un jour une amie qui a fait un burn-out six mois auparavant lui dit : « Ne le prend pas mal mais je me revois il y a six mois ». C’est un électrochoc pour Olivia qui décide d’aller voir un généraliste de la maison médicale à côté de l’hôpital où elle effectue son stage. À peine entrée dans son bureau, les sanglots affluent.
Le verdict tombe : burn-out et arrêt de trois semaines qui aurait dû être renouvelé si Olivia ne s’y était pas opposée, une de ses plus grandes erreurs à son sens. « Cela a été compliqué, ce n’est pas quelque chose qu’on vit bien, analyse-t-elle avec le recul. Mes chefs m’ont écrit pour me demander quand j’allais revenir, comment j’allais faire pour assurer les gardes que je n’assumais pas pendant mon arrêt. À ce moment-là, j’ai compris que je me faisais vraiment harceler au travail. »
Son arrêt tombe au moment où un interne se suicide. Après la léthargie suit une colère salvatrice qui va pousser Olivia à remonter la pente, candidater pour devenir présidente de l’ISNI sous les conseils de l’ancien président, Gaëtan Casanova. « Je me suis dit : ok je vais mettre ma vie entre parenthèses pendant un an. Je ne veux pas que cela arrive à d’autres. »
Tirer du burn-out des leçons essentielles
Cet événement difficile a permis à Olivia de se retrouver et d’en tirer des leçons essentielles. D’abord, écouter son entourage. « Personne n’a envie de se dire qu’il est en dépression. Quand on s’en rend compte par soi-même, il est souvent trop tard. » C’est pourquoi, ajoute-t-elle, il est primordial de ne pas prendre en grippe ceux qui auront le courage de lancer des signaux d’alertes quant à votre état. Les impressions de se perdre, de devenir quelqu’un d’inintéressant, des envies suicidaires ne sont pas à minimiser. Il ne faut surtout pas s’isoler.
Autre conseil : savoir privilégier après un stage avec des encadrants toxiques un stage entouré de personnes bienveillantes. Pour cela, lire les avis de stage sont d’une grande aide. « Après cet épisode de ma vie, j’avais écrit comme unique souhait : “je veux aller dans un lieu de stage où les gens sont gentils”, se rappelle Olivia. Et grâce à ce genre de personnes que j’ai repris confiance en moi. C’est grâce à eux que je n’ai pas lâché et que je suis devenue médecin. »
Une autre leçon essentielle consiste à ne pas placer ses études où son métier au centre de sa vie. Pensez à maintenir un équilibre. « Je m’étais complètement effacé derrière mes études. J’étais avant tout Olivia, étudiante en médecine. Le fait de faire un burn-out a recentralisé les priorités dans ma vie. Cela m’a rappelé ou apprit que médecin n’est qu’un métier, même si c’est le plus beau métier du monde. Et surtout, dans la vie, on ne peut pas être comblé et stable avec un seul et unique pilier. »
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