Les Français tous imprégnés par les polluants du quotidien

Publié le 03/09/2019

Crédit photo : PHANIE

100 % des enfants de 6 à 17 ans présentent du bisphénol A et F dans les urines ; 90 % du méthyl-paraben ; 80 à 99 % des phtalates. Ces chiffres sont issus d’une enquête inédite, l’enquête Esteban, publiée aujourd’hui par Santé publique France. Ils coïncident avec la présentation de la 2e stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens par la ministre de la Santé, la ministre de la Transition écologique et solidaire et le secrétaire d’État chargé de la Protection de l’enfance.

L’enquête Esteban est une étude transversale en population générale, conçue pour mesurer le niveau de contamination des Français âgés de 6 à 74 ans à diverses substances de l’environnement. Elle repose sur l’analyse de questionnaires sur le mode de vie et de prélèvements biologiques. Plus de 1 000 enfants et 2 500 adultes, inclus entre avril 2014 à mars 2016, y ont participé.

Les molécules recherchées sont toutes présentes dans notre environnement immédiat : emballages alimentaires, cosmétiques, produits d’hygiène, peintures, jouets, ameublement… Certaines sont des perturbateurs endocriniens avérés (le bisphénol A, les phtalates) ou suspectés (les éthers de glycol, les parabens), autrement dit des substances susceptibles d’altérer les fonctions du système endocrinien. D’autres sont des cancérigènes probables ou confirmés.

Les six rapports font état d’une imprégnation plus importante des enfants par rapport aux adultes et qui diminue avec l’âge. Cette observation pourrait notamment s’expliquer par le plus faible poids des enfants.

Concernant les bisphénols, « les moyennes géométriques en bisphénol A (BPA) étaient respectivement de 2,25 et 2,69 μg/g de créatinine chez les enfants et les adultes ; égales à 0,44 et 0,53 μg/g de créatinine pour les bisphénols S (BPS) et de 0,26 et 0,31 μg/g de créatinine pour les bisphénols F (BPF) », notent les scientifiques, des niveaux d’imprégnation globalement « du même ordre de grandeur, voire légèrement supérieurs » à ceux trouvés dans les autres études européennes.

Viande pré-emballée et absence d'aération

Comment expliquer leur présence ? « La recherche des déterminants de l’exposition aux BPA chez les enfants âgés de 6 à 17 ans a montré une tendance à l’augmentation des concentrations avec l’achat de viande pré-emballée (…) et, chez les adultes, à l’achat de produits ménagers, note le rapport. La concentration en BPS était [quant à elle] associée à l’achat de poisson pré-emballé. » À l’inverse, les personnes aérant souvent leur logement en automne et en hiver présentaient une imprégnation moindre au bisphénol F.

L’imprégnation à d’autres substances a été mesurée, telles que celle aux éthers de glycols, des solvants présents dans les cosmétiques et les produits ménagers. « Certaines concentrations dépassaient des valeurs seuils sanitaires établies à l’étranger, dans la population des adultes. Il serait donc nécessaire de réduire les expositions et poursuivre la surveillance des niveaux de concentrations de la population française », note le rapport.

Côté parabens, « très peu ont été quantifiés », expliquent les chercheurs. Seul le méthyl-parabène était présent chez plus de 90 % des adultes et des enfants. « L’imprégnation par cette substance augmente avec la fréquence d’utilisation de crèmes ou de soins pour le corps et avec l’utilisation de cosmétiques ou de vernis à ongles », selon le rapport.

Enfin, 9 phtalates, considérés comme « substances toxiques pour la reproduction », ont été quantifiés dans 80 à 99 % des échantillons des adultes et des enfants. « Chez les adultes, lit-on dans l'enquête, l’imprégnation par les phtalates à chaînes courtes était augmentée avec la présence de revêtements en vinyle dans le logement et le fait d’être un fumeur ou un ex-fumeur. »

L’imprégnation par les polluants du quotidien étant souvent liée au mode de vie, la 2e stratégie nationale prévoit une campagne d’information grand public et une liste de bonnes pratiques pour limiter l’exposition aux perturbateurs endocriniens.  

 


Source : lequotidiendumedecin.fr