« C’est une opération très lourde. Mais les 500 médecins experts, hospitaliers et libéraux, sont très investis alors qu’ils ont des activités professionnelles », se félicite, enthousiaste, le Dr Christian Espagno, vice-président du Haut conseil des nomenclatures (HCN)*. En tandem avec le Pr François Richard (chirurgien urologue hospitalier), le neurochirurgien libéral de Toulouse copilote depuis 2021 cette instance de 15 membres pour remplir trois missions : réviser l’ensemble des actes techniques de la nomenclature (classification commune des actes médicaux– CCAM), inchangée depuis 20 ans, accélérer l’inscription de nouveaux actes et assurer la mise à jour afin de réviser les actes en cours d’obsolescence.
Prévue fin 2024, la révision des quelque 13 300 actes inscrits à la CCAM aura six mois de retard. Peu importe, grâce à une méthodologie bien ficelée, ce chantier colossal a déjà permis à des experts de passer un premier cap en examinant les libellés des actes regroupés par famille et non par spécialité. Sur les 42 « familles d’actes », le toilettage est achevé pour dix d’entre elles (neurologie, neurochirurgie, maxillo facial..). Une opération qui a abouti à la suppression « en moyenne entre 5 à 10 % d’actes obsolètes ». Mais en même temps, le HCN a inscrit 10 à 15 % d’actes nouveaux. « In fine le nombre d’actes de la nomenclature ne va pas baisser, explique le neurologue libéral. Notre objectif est de mettre à la disposition de l'ensemble des médecins un outil moderne, remis aux normes des pratiques et utile ».
Hiérarchisation méthodique
À partir de mars, les experts tirés au sort pour chaque famille d’actes vont commencer leur travail de hiérarchisation en se basant sur quatre critères : la compétence technique, le stress, l'effort mental et la durée de l'acte.
Là aussi la méthode est précise. Dans un premier temps, la hiérarchisation se fait au sein de chaque famille puis « on procède par inter-famille pour éviter que des familles soient plus valorisées que d’autres alors que les actes sont identiques ». Au final, chaque acte révisé et hiérarchisé aura un score de travail, qui sera l'un des éléments pris en compte pour la valorisation, discutée lors des négociations conventionnelles. La valorisation dépend en effet des partenaires conventionnels qui définiront la transcription entre la quantité de travail définie pour chaque acte par le HCN (établie en nombre de points) et donc la tarification. « La conversion de ce score – associé au coût de la pratique – pour déterminer le tarif n'est pas de notre ressort », rappelle le Dr Espagno.
En pleine négociation conventionnelle, la Cnam a déjà proposé de « sanctuariser » une enveloppe fermée définie pour revaloriser la future CCAM, à l’issue des travaux du HCN. Autre geste de court terme : revaloriser la totalité de la nomenclature d’un centime d’euro sur la valeur du point de travail (qui s’élève aujourd’hui à 44 centimes d’euros). « Tous les actes vont être augmentés immédiatement sans impacter la refonte », affirme le Dr Espagno.
Selon le spécialiste, d’autres ajustements pourraient être décidés par les partenaires conventionnels sans impacter la future refonte. Il s’agirait par exemple de travailler sur des modificateurs pour majorer certains actes complexes ou d’autoriser des associations d’actes, en cancérologie par exemple. « Cela est justifié car correspond à la rémunération d’un travail médical effectué », défend le spécialiste.
www.hautconseilnomenclatures.fr, un site du HCN
Chiffres clés
13 300 actes techniques
500 médecins experts et 42 référents, libéraux et hospitaliers
16,5 Mds d’euros d’honoraires en 2022
42 comités cliniques
107 réunions de coordination et 160 ateliers techniques des comités cliniques
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