Sortir du giron conventionnel : certains médecins brandissent la menace… d’autres ont déjà franchi le pas. C’est le cas de la Dr Hélène Dumont. La généraliste installée à Fontaine-la-Guyon (Eure-et-Loir) s’est déconventionnée le 1er octobre 2023, trois ans seulement après son installation en libéral. Paperasserie, pression de la Sécu, tarifs… la jeune femme avait confié l’été dernier son ras-le-bol du système conventionnel. Elle ne regrette pas son choix.
« C’est la meilleure décision que j’ai prise ces dernières années. Je ne ferai pas marche arrière quoi qu’il se passe », dit-elle aujourd’hui au Quotidien. Moins de tâches administratives pour davantage de temps médical, des consultations un peu plus longues, moins de charge mentale… « J’ai l’impression d’avoir changé de métier et de faire enfin la médecine de qualité pour laquelle j’ai été formée », se réjouit la Dr Dumont, qui se dit beaucoup plus sereine dans son exercice.
Des patients qui y trouvent leur compte
Et les patients ? Ils y trouvent leur compte, assure-t-elle, malgré une consultation facturée 50 euros sur laquelle la Sécu rembourse moins d’un euro. « Je leur accorde plus de temps. Je fais un travail beaucoup plus qualitatif. Ils y voient un vrai bénéfice », explicite la jeune femme.
Les consultations « pour rien » se font beaucoup plus rares, ce qui rend la généraliste plus disponible. Auparavant, il fallait attendre jusqu’à six semaines pour décrocher un rendez-vous. Désormais, les patients l’obtiennent dans les trois jours. Même chose pour les urgences. « J’arrive globalement à les caler entre deux consultations ou à les prendre en fin de journée. » Une disponibilité que les malades apprécient.
Un premier mois difficile
Pourtant, les débuts n’ont pas été simples. « Le premier mois, j’avoue que je me suis demandé si j’avais pris la bonne décision, se souvient la Dr Dumont. Les patients râlaient, tout le monde me faisait la morale, on me jugeait, certains confrères m’accusaient d’être intéressée uniquement par l’argent ! ». Une période difficile, mais « il faut tenir, ça vaut le coup », témoigne la praticienne. Une centaine de patients mécontents l’ont quittée… mais d’autres sont arrivés. Au final, la patientèle tourne toujours autour de 1 400 personnes.
La généraliste s’y retrouve-t-elle sur le plan financier ? « C’est un peu tôt pour faire un bilan. Mais je ne suis pas inquiète, je pense que je serai à l’équilibre », répond-elle, en se basant sur le plan prévisionnel établi par son comptable avant son déconventionnement.
Exercer librement sans avoir de comptes à rendre
Les récentes annonces de la Cpam d’augmenter à 30 euros le tarif de consultation ne la font pas douter. « Même à 50 euros, je ne reviendrais pas en arrière. Ce n’est pas une question d’argent. Ce qui m’intéresse, c’est d’exercer librement sans avoir de compte à rendre à des agents de la Sécu qui ne sont pas médecins », insiste la Dr Dumont.
Aux confrères qui seraient tentés par le secteur 3, elle livre quelques conseils pour réussir : « Il faut apporter quelque chose de plus aux patients, leur montrer qu’on est disponible pour eux, qu’on leur donne plus de temps… » Qu’ils en aient pour leur argent, en quelque sorte. « Si c’est pour continuer à voir un patient toutes les 5 ou 10 minutes comme on peut le faire parfois en secteur 1, ça ne marchera pas », ajoute la généraliste.
Si la Dr Dumont a fait le choix de sortir de la convention, elle n’entend pas pour autant la jouer solo. Elle est récemment entrée au Conseil de l’Ordre de son département pour montrer son investissement dans le système de soins, « que je suis là pour avancer avec mes confrères », assure-t-elle.
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