Article réservé aux abonnés
Dossier

Encore fragile, le SAS répond à l’appel

Par Loan Tranthimy - Publié le 18/10/2024
Encore fragile, le SAS répond à l’appel


GARO/PHANIE

La généralisation du service d’accès aux soins (SAS), plateforme de réponse aux appels urgents et non programmés, est en bonne voie grâce à l’adhésion croissante des libéraux. Reste à consolider le dispositif, dont le fonctionnement reste variable selon les départements.

Expérimenté d’abord dans 13 régions et 22 sites pilotes, le service d’accès soins (SAS), censé garantir une réponse médicale rapide aux appels vitaux, urgents et non programmés, grâce à une chaîne de soins lisible entre l’hôpital et la ville, gagne la France entière. L’objectif de sa généralisation « d’ici à la fin de l’année », fixé par le Premier ministre, Michel Barnier, semble atteignable, à en croire la Direction générale de l’offre de soins (DGOS, ministère).

Au 1er octobre 2024, sur le territoire français, 89 SAS étaient opérationnels et dix autres en cours de formalisation. En métropole, 92 départements en sont pourvus pour un taux de couverture de la population de 96 %. Des zones blanches perdurent malgré tout, « essentiellement dans le Grand Est et en Centre-Val de Loire, détaille le Dr Mickael Benzaqui, sous-directeur de l’accès aux soins et du premier recours à la DGOS. Les difficultés en termes de ressources humaines ne permettent pas d’aller plus vite malgré l’appui des ARS. Là, il faudra encore du temps. Mais on a bon espoir ».

Couverture du territoire français par le dispositif au 1 octobre

De l’huile dans les rouages

Présenté comme une priorité par Emmanuel Macron pour désengorger les urgences, le dossier a été porté de façon plus ou moins volontariste par les ministres de la Santé successifs. L’urgentiste François Braun, pionnier dans ce domaine, avait diligenté en 2023 une mission d’appui pour assurer le déploiement des SAS (lire page 11). En juin 2024, soucieux de mettre de l’huile dans les rouages, Frédéric Valletoux a enfin publié le fameux décret SAS avec des règles de fonctionnement souples favorisant l’adhésion des libéraux, qui n’avaient pas fait mystère de leur méfiance face à un système jugé hospitalo-centré.

De fait, ce décret permet l’accès au SAS par plusieurs voies, dont le numéro libéral 116 117, et non pas seulement le schéma du 15. L'inscription sur la plateforme numérique étatique du SAS n’est plus obligatoire mais conseillée. Les médecins régulateurs peuvent travailler à distance, sans venir physiquement au Centre 15. Leur profil a été élargi : libéraux, salariés des centres de santé mais aussi internes et docteurs juniors, remplaçants et retraités sont bienvenus. Infirmiers, pharmaciens ou hôpitaux peuvent contribuer au fonctionnement des SAS, tant pour la régulation que pour la prise en charge des patients. Des organisations locales préexistantes ont été prises en considération, comme en Normandie (lire page 12). Autant de mesures d’apaisement qui ont permis une montée en puissance des SAS.

On a peur d’un essoufflement des volontaires

Dr Sylvaine Le Liboux, vice-présidente du SAS 36

« Le déploiement a été plutôt rapide, en deux ans et demi, se félicite le Dr Michael Benzaqui. Mais c’est compliqué de changer les organisations humaines, les habitudes de travail, sans compter qu’il existe des cultures différentes sur le territoire ». À ses yeux, le prochain défi consistera à consolider l’existant, notamment dans les secteurs où les vocations font défaut. Car la pénurie médicale reste le frein principal. « La réussite du SAS dépend de notre capacité à avoir des ressources humaines qui permettent d’absorber l’activité en hausse, surtout du côté de la ville. Les généralistes saturés ont du mal à dégager des créneaux », confirme le Pr Frédéric Adnet, patron du Samu de Paris.

Une crainte partagée par la Dr Sylvaine Le Liboux, vice-présidente du SAS 36 (Indre). Dans son département, frappé par la désertification, c’est le soutien actif des CPTS qui a permis au SAS de voir le jour. « Il fonctionne bien mais le pôle de régulateurs reste insuffisant. On a peur d’un essoufflement des volontaires », confie la généraliste. Un peu plus loin, en Indre-et-Loire, le SAS 37 a su fédérer. « Grâce à la mobilisation de tous, CPTS et Samu, nous n’avons pas de problème pour trouver des régulateurs ou des effecteurs », assure le Dr Frédéric Lebeau, généraliste à Loches, pour qui la réussite de cette plateforme est « personne-dépendante ». Dans le Maine-et-Loire, « les CPTS tentent d’inciter les médecins à participer au SAS mais le lien n’est pas si évident », regrette le Dr Jean-François Moreul, coprésident de la CPTS des Vallées de l’Anjou-bleu. La DGOS promet de tout faire pour lever les derniers blocages…