LE QUOTIDIEN : Fraîchement réélu, vous venez de relancer le groupe de travail transpartisan à l’Assemblée sur les déserts médicaux. Allez-vous y intégrer le RN, premier groupe politique de 126 députés ?
GUILLAUME GAROT : Nous souhaitons travailler de façon transpartisane pour réunir une majorité de projets sur cette question de l’accès aux soins. La régulation à l’installation fait partie des axes forts de nos propositions. Or sous la précédente mandature, lors de l’examen de la loi Valletoux, le RN avait voté à l’unanimité contre les amendements au texte, dont celui sur la régulation à l’installation. Par conséquent, sa présence dans notre groupe transpartisan n’aurait pas de sens.
Cette mesure a été maintes fois écartée par l’Assemblée nationale. À quelles conditions pourrait-elle être cette fois adoptée ?
Je vous rappelle que de 6 à 8 millions de Français sont concernés par la désertification médicale. Les nombreuses solutions mises en œuvre jusqu’à présent ne sont pas suffisantes. Il faut aujourd’hui agir pour ne pas creuser davantage les inégalités d’accès aux soins entre les Français. Mais je ne conçois pas de mesures fortes comme la régulation à l’installation sans le dialogue nécessaire au préalable avec les organisations représentatives des médecins, des internes. C’est la condition d’une réussite collective indispensable.
Comment, concrètement, concevez-vous la régulation à l’installation des médecins ? S’agit-il d’une obligation de s’installer pendant une durée ou d’un conventionnement sélectif ?
Rien de tout cela. Il s’agit simplement d’une autorisation délivrée par l’ARS et non d’une obligation d’installation dans tel ou tel territoire. L’idée est de ne pas aggraver les inégalités entre les Français. Dans les territoires assez dotés, l’autorisation d’installation ne doit pas être donnée. Pour bien connaître la réalité de l’offre des soins pour chaque territoire, nous avons proposé de mettre en œuvre l’indicateur territorial d’offre des soins*. C’est cette logique d’intérêt général qui a été prévue dans la convention signée entre les chirurgiens-dentistes et l’Assurance-maladie en 2023.
Pensez-vous à d’autres mesures possibles comme l’accès direct aux spécialistes, l’exonération d’impôt sur le revenu pour tous les médecins en cumul emploi-retraite, le salariat…
Nous allons explorer toutes les pistes. Il faut trouver les solutions pour que chacun s’y retrouve. Dans les discussions du groupe de travail transpartisan avant la dissolution, les médecins nous ont remonté le problème du coût de stationnement en ville. Si on peut alléger leurs charges en rendant gratuit le stationnement, ce sera un irritant de moins. Le salariat aussi est une autre piste à explorer car tous les modes d’exercice devront coexister dans l’intérêt général pour rendre le meilleur service à nos citoyens. Si on peut donner un coup d’accélérateur aux centres de santé, faisons-le.
De façon générale, quels sont les dossiers santé incontournables qui devraient être repris dès sa nomination par le nouveau gouvernement ?
La fin de vie est une question qui dépasse le simple sujet de santé, même s’il concerne au premier chef les professionnels de santé et les médecins. C’est un débat presque philosophique que nous devons poursuivre. J’espère bien que nous pourrons reprendre le travail là où il s’est arrêté au mois de juin [le député Olivier Falorni a annoncé le 19 juillet avoir déposé une nouvelle proposition de loi ad hoc, NDLR] . Je crois qu’il y a une attente forte des Français. C’est un sujet éminemment complexe qui ramène à la conscience de chacun.
La question de l’accès aux soins, comme celle de l’avenir de l’hôpital se posent aussi. Comment faire pour améliorer la situation des soignants pour qu’ils se sentent bien dans leur métier et soient en capacité de rendre les meilleurs soins possibles à la population ?
Quel est selon vous le profil idéal pour devenir ministre de la Santé ? Seriez-vous intéressé par le poste ?
Je suis un parlementaire, j’ai la volonté de trouver ce que j’appelle des majorités de projets. Dans la configuration actuelle de l’Assemblée, où aucun parti ne détient la majorité absolue, les Français ont placé la coalition de la gauche en tête [193 députés, NDLR]. Partons de là et voyons comment mettre en œuvre les engagements qui ont été pris en étant capable de construire ces majorités de projets, texte après texte, loi après loi. C’est une façon nouvelle de travailler. Quant à la question de savoir qui pour le ministère de la Santé, cette réponse ne m’appartient pas. Il faut d’abord nommer un Premier ministre qui propose un programme de travail. Nous verrons à ce moment quelle personne sera en situation d’être le meilleur à ce poste.
Le NFP a choisi de présenter Lucie Castets au poste de Premier ministre. Une idée rejetée par Emmanuel Macron, qui a annoncé mardi 23 juillet qu’il n’y aura pas de nouveau gouvernement avant la mi-août. Trouvez-vous cette décision acceptable ?
Aujourd’hui, c’est le président qui a la capacité de nommer ou pas un Premier ministre. Mais je dis qu’il faut revenir à la base. Les Français ont placé la coalition de la gauche en tête. Il ne faut pas tergiverser. Il faut donner aux Français un cap clair. Bien évidemment, nous rentrons dans la période des Jeux olympiques, mais il faut que le pays continue à avancer et que nous puissions poursuivre notre travail. On a dit durant toute la campagne législative qu’il y avait des urgences à traiter. Sur le pouvoir d’achat, la santé, l’éducation, la sécurité… Et on considérerait aujourd’hui que ce n’est plus aussi urgent que ça ? C’est aussi l’attente des Français, me semble-t-il. Lucie Castets a le soutien de l’ensemble des formations de la coalition de la gauche. Elle souhaite avancer texte par texte, loi après loi, tout en maintenant un dialogue permanent avec les partenaires sociaux. Ça prend du temps, mais c’est une nouvelle façon de travailler qui pourrait permettre d’échapper à la malédiction du 49-3.
* L’indicateur territorial de l’offre de soins (Itos) évalue la densité de l’offre de soins médicaux et paramédicaux des territoires, pondérée par la situation démographique, sanitaire, économique et sociale. Il prend en compte les évolutions anticipées de l’offre de soins résultant de la démographie des professions de santé
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