Vous l’avez lu et le lirez encore souvent dans cette rubrique : « en France, le fiscal et le social s’ignorent superbement ». Ici, c’est tant mieux car lors de votre cessation d’activité, vous en tirerez souvent profit grâce au mode déclaratif « créances-dettes » (voir notre article de la semaine dernière). Et votre ultime déclaration n° 2035 aura un double visage : provisoire pour l’impôt, mais définitif pour les cotisations sociales. Voire exactement l’inverse selon la méthode que vous utiliserez en fonction de vos intérêts. Voici comment.
Mise en situation
Imaginons que vous ayez cessé votre activité libérale officiellement le 30 septembre 2023 pour un poste salarié commencé le 1er octobre. Vous devez établir votre ultime déclaration n° 2035 au plus tard le 30 novembre en mode « créances-dettes ». Or, parmi vos dépenses 2023, vous n’aurez en main que vos cotisations sociales déjà payées en 2023, qui ne sont que provisionnelles, et non définitives. Votre BNC ainsi déterminé au 30 novembre 2023 n’aura donc qu’un caractère provisoire pour le fisc. Mais les délais pressent…
Comment anticiper vos cotisations sociales définitives ? – Celles-ci feront l’objet, soit, le plus souvent, d’un appel de paiement ultérieur, soit d’un remboursement, une fois que vos caisses les auront calculées. En pratique, vous devez donc faire de même en calculant vous-même ou par votre cabinet comptable, dès maintenant, leurs montants ou encore en nous consultant. Ce qui est particulièrement porteur quant aux cotisations des régimes complémentaires Carmf, car assises sur votre revenu de l’année N-2 qui leur aura donné naissance avant votre cessation d’activité. Nota : si vous pouvez aussi, en théorie, exiger de vos caisses sociales qu’elles vous communiquent le montant de chaque cotisation régularisatrice à venir, sachez que leur délai de 135 jours posé par la loi serait de toute manière trop long concernant celui de 60 jours de votre ultime déclaration 2035 : cette voie est donc à éviter.
Comment déclarer selon votre intérêt
En cas de dette sociale - Dans le cas où vous devrez régler ultérieurement des régularisations de cotisations sociales définitives après votre cessation, ce sont des dettes nées avant cette date et le mode déclaratif « créances-dettes » vous est avantageux car votre ultime BNC définitif s’en trouvera diminué d’autant. Remarquez ici, à rebours du discours ambiant, que le système de paiement décalé des cotisations sociales du médecin libéral, est non seulement toujours très intéressant à l’entrée du système (en reportant de lourdes dépenses déductibles d’un mode déclaratif micro-BNC en général favorable aux débutants vers un mode déclaratif réel très indiqué ensuite), mais il l’est encore plus à la sortie.
Toujours dans le cas fréquent où il reste une « dette sociale » à régler après la cessation, ce qui est avantageux côté fiscal ne l’est plus alors forcément côté social : si vous adoptez la méthode exactement inverse évoquée en introduction, cela reviendrait à majorer l’assiette de calcul de vos cotisations dès lors que le BNC définitif serait communiqué aux caisses sans l’impact favorable de ces mêmes cotisations pourtant dues et déductibles. Une raison de plus pour ne communiquer aux caisses que ce BNC provisoire, ainsi amoindri des cotisations sociales définitives qui auront été calculées d’avance. Nous observons que cela est hélas rarement le choix des cabinets comptables.
En cas de cotisations trop versées avant la cessation – Bien plus rarement, vous auriez alors avantage à procéder ainsi : 1/ déclarer en « créances-dettes » une estimation de montant de remboursement plutôt symbolique, voire nul ; 2/ déposer votre ultime déclaration n° 2035 définitive dans le délais de 60 jours ; 3/ clôturer dans la foulée votre ou vos compte(s) bancaire(s) professionnel(s) ; 4/ attendre que les caisses vous restituent enfin les trop versés sur l’un de vos comptes courants bancaires privés, ce qui finira… par arriver ! Votre activité libérale ayant alors disparu, à vous de juger de la finalité déclarative de ces sommes…
Cas particuliers
1/ En cas de départ à la retraite — et de cotisations trop versées à l’avance, cas fréquent —, la restitution des cotisations trop versées à la Carmf n’est pas au rendez-vous, car la caisse bloque votre dossier pour pouvoir liquider votre pension retraite. D’où la nécessité d’anticiper suffisamment à l’avance ce blocage pour éviter d’en faire les frais : vous aurez recours à la modulation. 2/ En cas de passage en société ou en EI assimilée à une EURL/IS, la continuité de l’affiliation sociale crée de fait une résultante complexe à chiffrer, à traiter à votre avantage au cas par cas. Nous consulter.
À quelle date vos cotisations définitives seront à régler ?
Voici les pratiques actuelles et habituelles des caisses : ● Urssaf – Une fois votre cessation d’activité correctement enregistrée par l’Urssaf, et votre ultime déclaration de revenus reçue par elle, les régularisations de cotisations en matière d’allocations familiales, maladie, et de CSG-CRDS vous parviennent généralement dans les 30 jours. ● Carmf (régime de base) – Les délais sont plus longs car cette caisse exige d’obtenir la confirmation de votre Ordre des médecins de votre cessation d’activité avant de procéder aux régularisations de cotisations.
(Suite et fin de ce dossier, la semaine prochaine)
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