Le directeur général de la Cnam, Thomas Fatôme, avait prévenu le 10 avril, lors de son audition au Sénat sur la financiarisation du système de santé, que de nouveaux déconventionnements de centres de santé « étaient à prévoir prochainement ». C’est chose faite.
L’Assurance-maladie annonce ce mardi engager des procédures pour déconventionner* pas moins de dix centres dentaires frauduleux implantés dans quatre régions (Île-de-France, Provence-Alpes-Côte d’Azur, Nouvelle-Aquitaine, Auvergne Rhône-Alpes) et appartenant à un même réseau. Ce résultat est le fruit d’un travail conjoint avec l’Office central de lutte contre le travail illégal (OCLTI) débuté en juin 2022. En fonction de la gravité des faits, les durées de déconventionnement vont d’un à cinq ans, à compter du 13 mai prochain.
Facturations fictives multiples
À l’arrivée, la Sécu estime au total être victime d’un préjudice financier de près de 2,9 millions d’euros. Ce qui représente environ « 20 % des montants de dépenses dentaires de ces centres pris en charge par l’Assurance-maladie », précise la Cnam dans un communiqué. Selon la caisse, les centres incriminés réalisaient de multiples facturations fictives ou incohérentes. Ils ne respectaient pas les référentiels de bonne pratique ou les « conditions de prise en charge prévues à la nomenclature des actes techniques ». La caisse évoque même le « délabrement de dents saines » au titre des activités frauduleuses de ces structures dentaires.
La caisse précise au passage que l’expertise des chirurgiens-dentistes conseils a été indispensable pour l’analyse de dossiers des patients et le contrôle de la bonne réalisation des soins facturés.
Dès que nous détectons des anomalies, nous ripostons de manière coordonnée
Thomas Fatôme, DG de la Cnam
« Notre stratégie vis-à-vis de ceux qui souhaitent s’enrichir sur le dos de la solidarité nationale est très claire : dès que nous détectons des anomalies, nous ripostons de manière coordonnée (…) via les task-forces nationales et le réseau de l’Assurance-maladie », explique Thomas Fatôme, qui défend l’intérêt de ce type d’enquêtes de grande ampleur permettant de frapper fort.
Pour mémoire, la Cnam avait déposé parallèlement dix plaintes pénales au cours de l’été 2023 à l’encontre de centres de santé déviants, notamment pour des faits d’escroquerie, de faux et d’usage de faux et de fausses déclarations. Les enquêtes policières et procédures judiciaires sont en cours.
Déjà 31 centres déconventionnés depuis 2023
Quant aux professionnels de santé qui évoluent dans les structures incriminées et qui auraient bafoué les bonnes pratiques, les investigations du service médical continuent et pourraient donner lieu à des poursuites, notamment ordinales.
Depuis le début de l’année 2023, l’Assurance-maladie a déjà procédé au déconventionnement de 31 centres de santé pour des fraudes évaluées à plus de 58 millions d’euros.
*En cas de déconventionnement, l’Assurance-maladie prend en charge les soins pratiqués dans ce centre sur une base de remboursement dérisoire (le tarif d’autorité). L’Assurance-maladie informe également les plateformes de prise de rendez-vous de type Doctolib (pour actualiser les informations tarifaires).
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