Quels sont les enseignements que vous tirez des résultats obtenus par l’Observatoire pour 2014 ?
Dr Christian Bourhis. Nous relevons un niveau d’insécurité en légère diminution, puisqu’on a 901 déclarations d’incidents contre 925 l’année dernière, soit -2,6 %. Cela ne doit pas masquer que l’on reste à un niveau bien plus élevé qu’il y a 10 ans et qu’il faut poursuivre notre mobilisation sur ce sujet. Nous récoltons d’ailleurs le fruit de nos efforts dans certaines régions, notamment en banlieue parisienne avec des baisses significatives comme en Seine-Saint-Denis (-22 %), dans le Val-d’Oise (-19 %) et le Val-de-Marne (-32 %). Il y a d’autres régions en diminution, bien sûr, mais ces chiffres-là donnent déjà une idée des efforts produits qui finissent par donner des résultats. En revanche, d’autres départements, plus difficiles, restent en augmentation. C’est le cas du Nord, des Bouches-du-Rhône et de l’Isère.
Existe-t-il des zones particulièrement à risques ? Quels sont les leviers pour agir ?
C. B. La zone à risques, c’est le milieu urbain où 79 % des incidents ont lieu. En milieu rural, c’est plus faible. à l’opposé, en milieu urbain, la nouveauté, c’est l’augmentation des incidents en centre-ville. Il y a aujourd’hui 57 % d’incidents en centre-ville et 22 % en banlieue. Maintenant, ce n’est plus la banlieue qui est source de difficultés mais les grands centres-villes. Par ailleurs, les statistiques montrent que la présence d’un secrétariat ne change pas grand-chose. Seul ou entouré, le médecin est tout autant exposé. C’est avant tout le rapprochement que nous organisons sur les différents territoires avec la police de proximité qui permet de diminuer les vols et les agressions. Depuis plus récemment, nous favorisons également l’implantation de la vidéosurveillance près des cabinets avec les municipalités, ce qui sécurise grandement les médecins. N’oublions pas que la sécurité de l’aspect aux soins est de la responsabilité des collectivités locales.
Depuis 5 ans, on assiste à une stagnation « à la hausse » des chiffres de la violence, en dépit d’actions comme le protocole national de sécurité en 2011. Que faut-il en conclure ?
C. B. Il y a deux phénomènes qui se conjuguent. D’une part, nous avons notablement amélioré le recensement de l’insécurité en augmentant le taux de déclaration des médecins. Les Conseils départementaux ont fait de grands efforts pour sensibiliser les médecins sur l’importance de relever ces incidents. Progressivement, on arrive donc à un taux de signalement de plus en plus juste et significatif. Par ailleurs, il ne faut pas oublier que plus du quart des agressions faites aux médecins n’est pas lié à l’acte médical en tant que tel. Cela correspond à la montée de l’insécurité que l’on peut retrouver plus largement dans de nombreuses professions. Avec les protocoles « police, gendarmerie » conclus dans les zones à risque et les réunions que nous organisons avec des spécialistes de la violence sur les efforts à faire pour repérer ce qui peut arriver, comment prévenir ces situations et se mettre en sécurité, nous obtenons des
résultats avec des chiffres en légère baisse.
Qu’est-ce que l’Ordre compte entreprendre pour faire diminuer ces résultats ?
C. B. Quand un confrère se fait agresser, le Conseil départemental lui apporte une aide psychologique et l’accompagne sur le plan juridique, notamment en se portant partie civile. En plus de cette aide confraternelle et juridique, nous sommes très mobilisés sur la prévention. Nous avons fait une campagne de sensibilisation et 3 000 médecins ont assisté à des réunions de prévention. C’est un nombre insuffisant, il faut multiplier ces réunions. On va maintenant compléter nos efforts sur l’agression verbale. L’injure et la menace constituent près des deux tiers des incidents et c’est à partir de là que ça peut dégénérer.
Le tiers payant a pu être présenté comme un moyen de prévenir le vol des liquidités. Qu’en pensez-vous ?
C. B. Dans les maisons médicales de garde qui ne sont pas forcément sécurisées la nuit, le week-end, la partie en tiers payant est très importante, c’est une sécurité. Mais, à côté de cela, le paiement par carte bancaire se développe énormément et les espèces sont devenues un mode de paiement extrêmement modeste. Même dans les cabinets où la patientèle est peu fortunée, entre ce qui est déjà en tiers payant, les chèques et les paiements par carte bleue, les espèces ne représentent plus qu’entre 4 et 8 % des paiements selon les jours. L’ordinateur ou l’ordonnancier sont plus attractifs ! L’argent qu’il y a dans le cabinet en fin de journée n’est pas un motif d’agression.
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