La région Centre est l'une des plus touchées par la désertification médicale et même en zone urbaine, les difficultés auxquelles font face les patients pour trouver un médecin traitant se multiplient. À Orléans (Loiret), une troisième maison de santé pluriprofessionnelle (MSP), a ouvert ses portes quartier Saint-Marceau au début du mois de janvier. Problème : elle ne prend pas de nouveaux patients en médecine générale. Les trois médecins de famille qui s'y sont installés avaient déjà une activité isolée sur la commune. Ces derniers ont indiqué dans une affiche apposée à la nouvelle MSP qu'ils ne prenaient pas, pour l'instant, de nouveaux patients. De quoi susciter l'incompréhension de quelques administrés, comme le révèle le blog d'actualités locales MagCentre.
Quatre MSP en projet
Face aux problèmes de démographie, le maire d'Orléans Olivier Carré a entre autres misé sur la construction de quatre MSP d'ici la fin de son mandat. Trois sont déjà opérationnelles et une quatrième verra le jour à la fin de l'année 2019. Chaque maison de santé représente un investissement d'environ un million d'euros pour la commune. Malgré la politique de santé du maire, qui conçoit que les MSP « ne sont pas une fin en soi » pour remédicaliser les territoires, la commune de plus de 100 000 habitants peine à trouver des généralistes volontaires pour intégrer ces structures de groupe. Ce manque de résultats immédiats fait grincer des dents certains administrés mécontents de voir que l'argent public ne résout pas rapidement le problème profond de la démographie médicale.
L'édile d'Orléans voit les choses autrement et mise sur l'attractivité de la MSP pour les jeunes médecins. « Nous avons aujourd'hui un nombre de médecins généralistes stable, ce qui est déjà un point positif », se défend le maire d'Orléans joint par Le Généraliste. Selon lui, l'investissement dans les maisons de santé n'est pas de l'argent jeté par les fenêtres. « Ces locaux sont en location, leur financement n'est pas une subvention de la part de la mairie. Forcément, à l'ouverture, ce sont des praticiens déjà installés sur le territoire qui se regroupent autour du projet de MSP, puis la dynamique professionnelle de la structure fait que de nouveaux médecins arrivent », ajoute Olivier Carré.
Dans la maison fraîchement inaugurée de Saint-Marceau, les trois généralistes auparavant déjà installés dans un cabinet à Orléans ne prennent donc pas de nouveaux patients. Il faudra attendre le recrutement de deux généralistes supplémentaires pour élargir l'offre de soins. La structure a également le statut de maison de santé universitaire. « Un plus pour accueillir des internes » et les convaincre de rester à Orléans, se félicite l'édile.
Succès en demi-teinte
Le succès des MSP orléanaises reste donc à ce stade mitigé. Le maire, qui n'a pas souhaité communiquer les chiffres de recrutement des généralistes dans ces structures, indique que l'une d'entre elles, installée dans une zone avantageuse fiscalement, « n'arrête pas de recruter » quand une autre, celle de La Source, est en proie à des difficultés. Le Dr Guy Bernardie, président de MG France dans le Loiret et membre de cette MSP, n'a pu que constater les difficultés pour recruter de jeunes généralistes dans la commune. Sa maison de santé serait sur le point de fermer ses portes faute de médecins de famille. Le Dr Bernardie s'est senti contraint de retarder son départ à la retraite de trois ans. « Depuis l'ouverture en 2016, nous sommes quatre généralistes pour six postes et deux d'entre nous vont bientôt partir. La moitié des locaux est occupée. Il faut se rendre à l'évidence, la médecine générale n'attire plus », déplore le médecin.
Au-delà des MSP, c'est l'ensemble de l'offre de soins qui pâtit du manque d'omnipraticiens à Orléans. « Il y a actuellement 70 généralistes à Orléans alors qu'il devrait y en avoir 150 », confie le maire au Généraliste. Le Loiret fait en effet partie des départements les plus sinistrés avec seulement 90,8 médecins pour 100 000 habitants selon l'Atlas 2018 de la démographie publié par l'Ordre. C'est en dessous de la moyenne nationale établie à environ 126 généralistes pour 100 000 habitants.
Malgré la situation tendue dans sa commune, Olivier Carré remarque une prise de conscience de la part des acteurs locaux de la santé. « On voit aujourd'hui une mobilisation de tous pour rétablir la chaîne de soins qui n'existait pas il y a 5 ans. L'hôpital se préoccupe de plus en plus des problématiques de la médecine de ville et les professionnels se mobilisent », affirme-t-il. La mairie a mis en place des « médecins ambassadeurs » pour accompagner les jeunes médecins dans leur installation et une vaste campagne publicitaire a même gagné le métro parisien. Si le nombre de médecins à Orléans s'est stabilisé, la ville est plus que jamais sinistrée. Preuve que même les villes de moyenne taille ne sont pas épargnées par la fuite des stéthos.
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