Seul le grand soleil qui illuminait la ville de Pau, ce mardi après-midi, a pu mettre un peu de baume au cœur de la petite centaine de médecins (et quelques infirmières), tous déterminés à rencontrer les services de la caisse primaire d’assurance-maladie du Béarn. Ils essayaient, ce faisant, de peser sur les négociations conventionnelles en cours en faisant entendre la voix du terrain et en agitant le spectre du déconventionnement collectif.
« Les échanges ont été courtois, le directeur a pris des notes, il nous a assurés de sa compréhension et qu’il ferait remonter nos doléances au niveau national. Mais pour le reste, on a toujours l’impression d’être face à un mur », confie, dubitative, la Dr Claire Cadix, au sortir de la réunion. La généraliste de 56 ans qui a spontanément rejoint cette initiative du collectif pour une médecine libre et indépendante (Comeli) des Pyrénées-Atlantiques, s’interrogeait, avec ses confrères, sur les retombées de ce rendez-vous. Un échange obtenu grâce à la menace initiale de 65 généralistes du territoire de rejoindre le mouvement d’intention de déconventionnement, qui divise les syndicats.
Les charges explosent, le risque de faire faillite est réel, à moins de faire de l’abattage
Dr Claire Cadix
« On ne peut plus continuer à soigner correctement. Nous sommes médecins mais nos cabinets sont aussi des entreprises libérales. Les charges explosent, le risque de faire faillite est réel, à moins de faire de l’abattage. Il faut de réels moyens pour la médecine générale », martèle la Dr Cadix.
Pour cette médecin de famille installée en MSP, les choses sont claires. Le C à 30 euros, c’est tout de suite ! Avec pour objectif d’atteindre 40, voire 50 euros à la fin de la prochaine convention. Mais de l’aveu de la généraliste béarnaise, au vu de la dernière multilatérale du 8 février, le risque d’échec est énorme. « Vu du terrain, on se demande légitimement où est la marge de manœuvre pour une négociation », avance-t-elle.
Marre du bras de fer avec un « partenaire »
La stratégie consiste donc à peser collectivement depuis chaque territoire. En ce sens, cet après-midi, 98 médecins membre du Comeli – tant du Pays basque que du Béarn – ont chacun donné au directeur de la caisse primaire une lettre de demande d’information sur les modalités et conséquences d’un déconventionnement, à la fois pour eux-mêmes (assurances, structures) que pour le remboursement de leurs patients.
Décision de passer en secteur 3 (hors convention) pourrait être prise d’ici au 1er janvier 2025, un bon moyen d’accentuer la pression à l’avant-veille d’une nouvelle multilatérale. « Avec près de 100 généralistes sur les 700 que compte le département, la mobilisation est conséquente. Cela représente un peu plus de 120 000 patients potentiellement concernés », se félicite la généraliste de Ger (Pyrénées-Atlantiques), qui explique avoir senti l’inquiétude de la caisse de Pau à la remise de ces lettres.
Et si une telle action ne suffisait pas à obtenir gain de cause, la Dr Claire Cadix, qui, comme ses confrères « en a marre d’engager un bras de fer permanent avec une institution censée être un partenaire », rappelle que « les Comeli sont les petits frères des coordinations de 2002 ». En son temps, ce mouvement spontané parti du terrain avait permis de forcer le passage pour une consultation de médecine générale à 20 euros.
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