Dans le cadre du dispositif « encadrement des avantages », l’Ordre des médecins contrôle les avantages procurés à des médecins par les entreprises du médicament et du dispositif médical. Les industriels soumettent leurs dossiers et le Cnom examine les recommandations (convention inférieure à 2 000 euros) et les autorisations (convention supérieure à 2 000 euros). Via une commission dédiée, l’Ordre donne ou non son feu vert à la mise en place de ces conventions.
Le ministère de la Santé a demandé aux autorités en charge de l’application de ce dispositif d’établir un rapport d’évaluation de leur activité entre octobre 2020 et le 31 décembre 2022.
Le Cnom a publié la semaine dernière les conclusions de ce rapport qui suggère plusieurs évolutions du dispositif. En conclusion, il juge que le décret de juin 2020 est « pertinent » car « il a précisé les relations entre les médecins et l'industrie des médicaments et des dispositifs médicaux et contribue à garantir l’indépendance professionnelle des médecins… mais il gagnerait à être simplifié et optimisé sur certains points ».
Des points à préciser
Le Cnom note ainsi parfois des difficultés à « apprécier la situation du bénéficiaire indirect ». Ainsi la convention ne comporte pas toujours la nature des avantages octroyés ni le bénéficiaire des fonds.
« Les industriels rencontrent des difficultés à déterminer l’autorité compétente dans le cadre des conventions établies avec des associations », ajoute aussi le rapport.
Parmi les observations formulées, le rapport pointe aussi pour les hôpitaux « un manque d’homogénéité des formulaires » d’un établissement à un autre et des discordances entre les informations figurant sur le formulaire et celles de la convention.
Pour les conventions, nombre d’entre elles « doivent faire l’objet d’une demande de complément de la part du Cnom en raison des termes génériques employés pour la description des prestations effectuées par le médecin », souligne aussi l’Ordre.
Les délais réglementaires sont aussi jugés trop courts pour traiter l'ensemble des dossiers de recommandations ou d'autorisations, s'il y a une demande de complément pour ces derniers.
L’Ordre soulève aussi des problèmes de transmission de conventions pour des professionnels qui ne relèvent pas de lui. « Il en ressort une méconnaissance et une absence de vérification, de la part des industriels, de la qualité des professionnels de santé invités ». Le Cnom cite par exemple le cas des médecins étrangers invités.
La nouvelle question de l'influence
Sur la formation, le rapport met en lumière un manque de clarté sur le financement et la participation aux actions de formations ou de DPC. En effet, il n’est pas précisé si par financement on entend uniquement la prise en charge des frais de formations ou si cela s’applique aussi aux frais d’hospitalité.
Le Cnom met aussi en avant plusieurs usages non prévus par le dispositif, par exemple de multiples déclarations pour une même manifestation pour le même médecin : une pour l’hospitalité, l’autre pour les honoraires.
Le rapport de l’Ordre soulève également des problématiques sur les conventions conclues avec des sociétés commerciales et des manquements au code de déontologie médicale. Pour les sociétés commerciales de droit commun non inscrites à l’Ordre, ce dernier souligne rencontrer « des difficultés importantes lors de l’analyse des conventions transmises ». Il évoque ainsi des cas où « l’exécution de la convention est susceptible de conduire le médecin à tirer profit de sa compétence médicale par l’intermédiaire d’une société à objet commercial et apparaît contraire aux dispositions de l’article 19 du code de déontologie médicale qui interdisent de pratiquer la médecine comme un commerce ». Il est aussi parfois question « d’avantages indirects » qui n’apparaissent pas sur le contrat. L’Ordre demande donc que « la somme versée au bénéficiaire indirect soit indiquée sur le contrat ».
Par ailleurs, de nouvelles problématiques se posent en lien avec les « médecins influenceurs ». L’Ordre précise que le dispositif « encadrement des avantages » a vocation à s’appliquer pour eux aussi.
« La mission de « médecin influenceur » pour le compte des industriels peut s’avérer contraire aux dispositions du code de déontologie médicale relatives à l’indépendance et à la dignité professionnelle. Cette problématique est de nature à complexifier l’étude des conventions soumises », analyse ainsi le rapport.
Enfin au regard des évolutions du coût de la vie, l’Ordre suggère aussi une évolution des seuils financiers jugés trop bas. « Dans un contexte de forte inflation, le Cnom est favorable à une augmentation des seuils (honoraires et hospitalité) à partir desquels une convention est soumise à autorisation », écrit-il.
Idem pour les honoraires, « la réévaluation à la hausse du seuil de 200 euros actuellement en vigueur pour les honoraires est de notre point de vue une nécessité ».
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