Soucieuse d'avoir une vision la plus large possible des évolutions du métier et afin d'orienter au mieux sa gestion des régimes de retraite, la Caisse Autonome de Retraite des Médecins de France (CARMF) analyse « en permanence les comportements des médecins tout au long de leur carrière ».
En cette fin d'année 2022, l'organisme en charge de la retraite des médecins propose ainsi une « radiographie » de la population médicale française.
Une démographie médicale en pleine évolution
Parmi les tendances présentées par la Carmf dans son dossier statistique figure notamment le vieillissement et la forte féminisation de la profession.
En effet, comme le note la Carmf, « alors que les générations les plus nombreuses avaient entre 40 et 54 ans en 2002 tous sexes confondu, vingt ans plus tard, ce sont les générations de plus de 55 ans qui dominent chez les hommes, et la tranche d’âge 30-39 ans chez les femmes ».
En 2002, les femmes représentaient 28 % des cotisants (34 940 femmes sur plus de 125 000 médecins). En 2022, elles sont 43 % (53 255 sur plus de 125 000 médecins). « Sur les jeunes classes d’âge, les moins de 45 ans étaient majoritairement des hommes, aujourd’hui, la situation s’est inversée », observe par ailleurs l'organisme en charge des retraites.
Entre 2002 et 2010, l'âge moyen à l'affiliation a légèrement augmenté atteignant 37, 86 ans en 2010. Depuis, la tendance est à la baisse. « Ceci s’explique par l’augmentation constante du nombre de jeunes nouveaux affiliés à partir de 2012 », souligne la Carmf. Par ailleurs, à titre de comparaison, en 2022, l'âge moyen à l'affiliation pour les généralistes* (32, 6 ans) est bien plus bas que pour les spécialistes (37,12 ans).
S'agissant de l'âge moyen des cotisants, il est en forte augmentation passant de 48,81 ans en 2002 à 51,76 ans en 2022 (50, 29 ans pour les généralistes et 53,39 ans pour les spécialistes en 2022). L'augmentation de l'âge des cotisants s'explique par le vieillissement global de la population médicale « mais aussi consécutivement au développement du cumul retraite/activité libérale, qui n’existait pas en 2002, et qui élève la moyenne d’âge en 2022 de +2,2 ans ».
À noter qu'en 2022, si l'on extrait les médecins exerçant en cumul retraite/activité libérale, l'âge moyen des cotisants s’établit à 52,07 ans pour les hommes, 46,48 ans pour les femmes, et 49,56 ans en moyenne pour l’ensemble.
L'âge de départ à la retraite reste, quant à lui, stable sur vingt ans, descendant à 65,39 ans en 2011 pour repartir à la hausse jusqu'en 2022 avec un âge moyen de départ à la retraite qui s'établit à 66,34 ans.
Cela s'explique par « la montée en puissance des différentes réformes des retraites qui ont allongé la durée d'assurance requise pour la liquidation de ses droits », souligne la Carmf. En 2022, l'âge moyen de départ à la retraite pour les généralistes (66,28 ans) est pratiquement identique à celui des spécialistes (66,40 ans).
Les médecins cumulant : quel profil ?
Après avoir liquidé leur retraite, 15 % des médecins ont, en 2022, fait le choix de poursuivre leur activité libérale en étant à la retraite. « Ce chiffre atteint près de 26 % en Outre-mer, 23 % en Île-de-France. La Bretagne quant à elle se situe à 7,3 %, du fait d'une population médicale jeune », observe la Carmf.
Parmi ces médecins en cumul emploi-retraite, la très grande majorité sont des médecins généralistes. Rien d'étonnant puisque « les généralistes représentent 53 % des médecins cotisants », rappelle la Carmf.
Ainsi, au 1er juillet 2022, sur les 12 597 médecins en cumul retraite/activité libérale que compte l'Hexagone, 5 468 sont des omnipraticiens (4 617 hommes et 851 femmes).
Quelles sont les autres spécialités représentées chez les médecins qui rempilent ? « On retrouve les spécialités les plus nombreuses mais dans un ordre différent de celui de la population médicale globale. La psychiatrie arrive en 2e position, alors qu’elle est 3e chez les médecins en activité (...) La radiologie/imagerie médicale arrive en 3e position des spécialités exercées en cumul, alors qu’elle est la 2e chez les médecins cotisants », note ainsi la Carmf.
Toutes spécialités confondues, la Carmf observe une plus faible proportion des femmes à rempiler après leur départ à la retraite. En 2022, alors qu'elles représentent « 43 % des effectifs cotisants (et) 26 % des retraités » elles sont 21 % des effectifs de médecins en cumul emploi-retraite.
Des revenus qui stagnent
« En euros constants, les revenus des médecins n'ont quasiment pas progressé sur une vingtaine d'années », regrette par ailleurs Thierry Lardenois, président de la Carmf dans un édito paru simultanément au dossier.
Sur l'ensemble des médecins libéraux, on observe ainsi, entre 2002 et 2022, une augmentation en euros courants de plus de 32 % des revenus, passant ainsi de 71 652 euros en 2002 à 94 878 euros en 2021.
Toutefois, en euros constants, c’est-à-dire en tenant compte de l'inflation, cette augmentation s'élève seulement à 3 %, passant de 71 652 euros en 2002 à 73 799 euros en 2021.
En ce qui concerne les généralistes, entre 2002 et 2021, l'augmentation en euros courants est de 32,86 %, avec un revenu moyen passant de 60 850 euros en 2002 à 80 844 euros en 2021. Mais en euros constants, l'augmentation (3,34 %) est également bien moindre que pour l'ensemble des médecins libéraux, passant de 60 850 euros en 2002 à 62 883 euros en 2021.
La Carmf note par ailleurs « une différente assez nette dans la répartition des BNC des généralistes et des spécialistes ». Ces derniers sont ainsi « plus nombreux à percevoir un revenu plus élevé que les généralistes. La médiane des revenus des généralistes se situe à 72 429 €, alors que celle des spécialistes est à 82 923 €, et à 75 839 € pour l'ensemble ».
Rappelant que le « C devenu G est maintenant bloqué depuis 5 ans (et que) les actes techniques le sont depuis quinze ans, – obligeant les spécialistes à abandonner certains actes pour lesquels la réalisation se révèle déficitaire », le Dr Thierry Lardenois, président de la Carmf, estime qu'il est aujourd'hui « indispensable de revaloriser les honoraires ».
« Je le demande solennellement et je demande aux syndicats d’appuyer cette demande », finit-il par demander dans son éditorial.
*dont 54 % d'étudiants non thésés.
L'ensemble des graphiques sont issus de la Carmf.
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