Votée dans le cadre de la loi de financement de la Sécu 2023 (et pour cette seule année), l’exonération des cotisations retraite des médecins en cumul emploi retraite intégral – dont le revenu non salarié est inférieur à 80 000 € annuels – va-t-elle faire son retour pour favoriser la retraite active ? L’hypothèse inquiète grandement la Carmf qui redoute une amputation de ses recettes à hauteur de cette exonération de cotisations si elle n’est pas compensée par l’État.
À ce stade, rien n’est écrit dans le projet du gouvernement. Mais dans son discours de politique générale du 1er octobre, Michel Barnier a affirmé vouloir s’appuyer davantage sur les médecins retraités pour lutter contre les déserts médicaux « en leur permettant de reprendre du service avec un cumul favorable des rémunérations et des retraites ».
Certains parlementaires poussent en ce sens, accréditant la perspective d’une nouvelle exonération de cotisations. À l’origine de cette disposition pour 2023, le Pr Philippe Juvin, député LR des Hauts de Seine, affiche sa détermination à transformer l’essai. Au Quotidien, le chef des urgences de l’hôpital européen Georges-Pompidou (AP-HP) affirme ce lundi avoir déposé un amendement au PLFSS 2025 visant précisément à reconduire cette exonération pour les médecins libéraux en cumul mais aussi pour les médecins salariés.
Un recours gracieux
La Carmf redouble donc de vigilance, à la veille de l’examen parlementaire, le risque étant que cette exonération de cotisations ne lui soit pas compensée (ou partiellement). Son nouveau président, le Dr Olivier Petit, s’est clairement opposé à une telle mesure, en marge de la journée de formation des délégués organisée le samedi 12 octobre à Paris. « Si le gouvernement veut favoriser l’exercice des médecins retraités, il doit payer lui-même ses mesures. Ce n’est pas à nous de le faire ! », plaide le successeur du Dr Thierry Lardenois à la tête de la Carmf.
La loi a certes prévu une compensation de l’État pour perte de recettes du régime de base. Mais à ce jour, la Carmf n’aurait rien reçu. « Cela représente un manque à gagner de 25,7 millions d’euros. En comptant aussi 23,5 millions d’euros pour régime complémentaire et 30,5 millions pour l’ASV, c’est près de 80 millions de perte de recettes pour la caisse ! », calcule Christian Bourguelle, directeur général de la Carmf.
La caisse déboutée
Dans ce contexte de fragilisation de ses ressources, la Carmf a déposé un recours gracieux l’an dernier auprès du Conseil d’État pour réclamer le remboursement « intégral » par l’État du manque à gagner pour les trois régimes. « Nous avons été déboutés, concède le Dr Petit, au motif qu’au niveau de la loi, l’obligation de compensation ne concerne que le régime de base et non le régime complémentaire et l’ASV, qui sont autonomes ».
Si cette exonération de cotisations retraite pour les « cumulards » est reconduite, la Carmf demande donc à nouveau que la compensation se fasse pour les trois régimes « pour ne pas perturber nos équilibres financiers ». En 2023, la Carmf avait menacé d’annuler l’augmentation des retraites de 4,8 % au 1er janvier 2023, prévue dans le régime complémentaire, en raison du manque à gagner. L’épée de Damoclès sur ses recettes n’a pas disparu.
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