Peuvent-ils conclure ? Alors que l'issue des négociations avec les médecins libéraux devient de plus en plus incertaine, la CNAM a dévoilé l'essentiel de son jeu ce mercredi.
Devant les syndicats en visioconférence (sauf la CSMF, qui a quitté les négos depuis octobre), elle a musclé ses propositions dans le cadre d'une enveloppe financière dépassant désormais le demi-millard d'euros sur deux ans (en comptant le numérique en santé).
Plus précisément, selon le document remis aux syndicats, 549 millions d'euros sont prévus pour ce « paquet » de mesures ciblant les soins non programmés, les visites gériatriques, la revalorisation de spécialités cliniques (pédiatres, psychiatres, neurologues, gynécologues, endocrinologues et rhumatologues), le numérique en santé et quelques adaptations tarifaires (téléexpertise, consultation handicap, contrats OPTAM-OPTAM-CO).
« Ce montant qui dépasse 500 millions pour 2021/2022 est assez substantiel, a confié Thomas Fatome, le directeur général de l'Assurance-maladie, à l'issue de cette séance. Ces propositions vont au-delà des enveloppes prévues dans le cadrage initial de 300 millions d'euros qui couvrait à la fois les négociations des médecins et les négociations interprofessionnelles. »
Soins non programmés : du mieux sur les forfaits
La CNAM a dopé ses propositions pour rémunérer la prise en charge des soins non programmés.
Pour les régulateurs, l'engagement est toujours valorisé à hauteur de « 85 euros par heure », « avec prise en charge des cotisations sociales », et sans plafond.
Pour la réalisation de ces consultations imprévues, deux types de financement sont prévus : une aide (inchangée) aux médecins pour les outils (équipement ou abonnement à un agenda partagé) via le forfait structure. Mais surtout des forfaits trimestriels progressifs pour valoriser l'activité jusqu'à un plafond, selon un barème réévalué : de 5 à 10 actes par trimestre, jusqu’à 75 euros ; de 11 à 40 actes, jusqu’à 200 euros ; de 41 à 70 actes, jusqu'à 400 euros ; de 71 actes à 100 actes, jusqu'à 650 euros ; et au-delà de 100 actes jusqu’à 800 euros. Sur ces bases, un généraliste toucherait jusqu'à 200 euros par trimestre (soit 800 euros par an) s'il réalise 2 % de son activité en soins non programmés, et 800 euros par trimestre (3 200 euros par an, le maximum) s'il réalise plus de 100 consultations en soins non programmés.
Priorité absolue aux visites gériatriques
La CNAM a clarifié ses propositions autour de trois revalorisations des visites gériatriques à domicile, qui complètent la visite longue et complexe existante (VL pour les patients atteints de maladie neurodégénérative, en soins palliatifs, et en ALD ou de plus de 80 ans pour les nouveaux patients médecin traitant).
Il s'agit de la création d'une « visite gériatrique » pour les patients de plus de 75 ans en ALD, dans la limité de trois par an, et valorisée à 50 euros (dont 10 euros de déplacement). En parallèle, la majoration de déplacement (MD) serait augmentée pour les patients de plus 85 ans à 15 euros (+5 euros), portant cette visite à 40 euros. Enfin, la visite longue serait ouverte aux gériatres.
En tout, ces mesures représentent 100 millions d'euros pour le régime obligatoire.
Spécialités cliniques : rhumatos et endocrinos dans la boucle
Là aussi, la caisse propose un coup de pouce supplémentaire pour ces spécialités cliniques au bas de l'échelle des revenus.
Pour les pédiatres, elle propose de revaloriser de trois euros (et non plus d'un euro) le nouveau forfait pédiatrique (NFP, moins de 2 ans), qui passerait ainsi à 8 euros. Coût : 10 millions d'euros pour l'Assurance-maladie obligatoire.
Trois consultations complexes ou très complexes sont mises sur la table : dépistage des troubles du neuro-développement (60 euros), stratégie thérapeutique pour l'enfant atteint de trouble du neuro-développement (60 euros) et bilan des enfants entrant dans l'aide sociale à l'enfance (46 euros).
Pour les psychiatres et neurologues, une augmentation de 2 euros (et non plus d'un euro) est proposée sur l'acte de base (CNPSY), qui passerait à 41 euros. Environ 11,5 millions d'actes par an sont concernés. Pour les consultations en urgence, la cotation serait de 78 euros (2 CNPSY au tarif actuel).
Selon ce projet, les gynécologues médicaux héritent d'une valorisation spécifique de 3 euros de leur majoration MPC (soit 5 euros au total) et pourront associer colposcopie et consultation.
Deux autres spécialités sont désormais concernées par les revalos : les endocrinologues, via leur majoration spécifique (MCE) portée de 16 à 30 euros ; et les rhumatologues (avec leur MPC augmentée de 2 à 5 euros).
Au total, ces mesures au bénéfice des spécialistes représentent 78 millions d'euros (en comptant la valorisation des actes CCAM dans les DOM-TOM).
Téléexpertise : 20 euros pour le médecin requis !
Trop compliquée, trop ciblée, pas assez payée : la téléexpertise ne décolle pas. D'où plusieurs changements dans les tuyaux. Toute la population deviendrait éligible. Jusqu'à présent, cette pratique est réservée aux patients en ALD, atteints de maladies rares, ceux résidant en zones sous-denses, en EHPAD ou les détenus.
Les deux niveaux de recours 1 et 2 seraient fusionnés à l'étage tarifaire supérieur. Ainsi, le médecin requis toucherait dans tous les cas une rémunération de 20 euros dans la limite de deux actes par an et par patient (au lieu de 12 euros au niveau 1). Pour le médecin requérant, le tarif unique serait de 10 euros dans la limite de deux actes par an et par patient (au lieu de 5 euros au niveau 1).
Des contrats OPTAM et OPTAM-CO revus
Pour valoriser les options de pratique tarifaire maîtrisée (OPTAM et OPTAM-CO pour les chirurgiens et obstétriciens), deux hausses sont proposées, pour un coût de 20,4 millions d'euros.
Le modificateur K (applicable aux actes de chirurgie et d'accouchements) passerait de 20 à 21 % en secteur I et OPTAM-CO. En parallèle, les taux par spécialité pour le calcul de la prime OPTAM (situés entre 2,8 % et 8,8 %) augmenteraient d'un point pour les honoraires aux tarifs opposables. La CNAM vise une hausse de 1,5 % du nombre d'adhérents à ces deux contrats.
Handicap : une consultation MDPH à 60 euros
Un effort est prévu sur les consultations des patients en situation de handicap.
Le passage d’un pédiatre traitant à un médecin généraliste traitant pour les enfants vivant avec un handicap est valorisé 60 euros. Le remplissage du dossier MDPH « très consommateur de temps pour les généralistes » est également tarifé 60 euros. Enfin, une consultation « blanche » (25 euros), sans examen du patient, est instaurée pour les personnes nécessitant la mise en place des consultations précitées (25 euros). Les médecins se déplaçant dans les structures spécialisées (type Handiconsult) pourront coter la majoration de déplacement de 10 euros.
Bilatérales la semaine prochaine
Jugeant ce projet d'avenant n°9 « ambitieux », le DG de la CNAM, Thomas Fatome, va maintenant ouvrir un cycle final de réunions bilatérales la semaine prochaine. À quatre mois des élections professionnelles aux URPS, chaque syndicat devra se positionner en vue d'une signature… ou pas.
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