« Il y a une forte pression de la population pour dénoncer les difficultés d'accès aux soins. Nous sommes obligés de nous emparer du sujet », déclare Dominique Dhumeaux, président de l'Association des maires ruraux de la Sarthe. Avec huit autres maires du département*, l'édile, également élu de la Fercé-sur-Sarthe, a pris un arrêté municipal « symbolique » interdisant à leurs administrés de tomber malade. « Nous avons imité l'initiative de la maire de la commune de la Gresle, dans la Loire, pour pousser ce cri d'alarme », ajoute-t-il.
Dans l'arrêté municipal, le maire évoque plusieurs motifs qui justifient cette décision : manque de médecins généralistes dans le département, absence de service mobile d'urgence et de réanimation (SMUR) dans certains secteurs, absence de lits de réanimation pédiatrique, difficultés de fonctionnement des accueils des services d'urgences dans les hôpitaux périphériques. Pour ces raisons, il est interdit à la population de « vouloir bénéficier d'un accès urgent aux soins pour toute pathologie sur le territoire de la commune » ainsi que d'avoir « un accident ou un malaise grave sur le territoire de la commune » ou encore de « naître avec des problèmes de santé sur le territoire de la commune ». En revanche, de façon ironique, il indique que l'administré est autorisé à « déménager dans le département des Alpes-Maritimes ou à Paris pour accéder à des services de santé efficients », car « le nombre de médecins à Paris est quatre fois supérieur à celui [du] département ».
Coercition et stages ambulatoires
L'Association des maires ruraux de la Sarthe a pris cette décision à la suite d'une assemblée générale en novembre. « Dans les années à venir, le nombre de médecins qui vont partir à la retraite va augmenter et ceux qui continuent à exercer le font au péril de leur santé. Si rien n'est fait, notre département court à la catastrophe », ajoute l'édile. D'après lui, « près de 70 000 sarthois » sur une population de 560 000 seraient sans médecin traitant. Selon une récente enquête de la DREES, 3,8 millions de Français vivent dans une zone sous-dotée en médecins généralistes.
Pour Dominique Dhumeaux, les mesures incitatives à l'installation ne suffisent plus. « Tant qu'on aura quatre départs pour deux arrivées, on n'y arrivera pas. Il faut mettre en place des mesures courageuses et urgentes en attendant que la suppression du numerus clausus fasse ses effets », plaide-t-il.
Parmi les mesures « urgentes et courageuses », figurent en priorité la limitation de la liberté d'installation (par le conventionnement sélection) et l'obligation pour les étudiants de troisième cycle de médecine générale et d'autres spécialités d'effectuer leur dernière année en pratique ambulatoire, en autonomie, dans les zones sous-dotées. Si la contrainte à l'installation a été toujours repoussée par Agnès Buzyn, ex-ministre de la Santé, l'obligation pour les internes de fin d'études d'effectuer des stages en autonomie a été adoptée sur l'initiative du Sénat dans le cadre de la loi Santé. Les contours de ce dispositif sont en effet en attente des textes d'application. « Cette mesure est même inscrite dans l'agenda rural et retenue par le Premier ministre. Mais le ministère de la Santé ne s'en est toujours pas emparé », déplore l'élu.
* Soulitré, Melleray, Fercé-sur Sarthe, Marigné-Laillé, Champrond, Gréez-sur-Roc, Crosmières, Conflans-sur-Anille et Mézeray.
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