Dr Jean-Paul Hamon (FMF) : « Nous ne sommes pas poujadistes »

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Publié le 19/10/2015

Crédit photo : S TOUBON

Gonflé à bloc par la percée de son syndicat aux élections professionnelles (22,7 % des voix tous collèges confondus), le patron de la FMF déroule sa stratégie : conclure des alliances pour gouverner les URPS et peser sur les futures négos conventionnelles.

LE QUOTIDIEN : Quel enseignement tirez-vous de ce scrutin ?

DR JEAN-PAUL HAMON : Incontestablement, il y a une percée de la FMF, sans doute due à notre forte opposition à la loi de santé. Nous récoltons les fruits d’un travail syndical approfondi, et celui de notre cellule juridique, qui rend service à tous les médecins, généralistes ou spécialistes, syndiqués ou non.

Le climat actuel a incontestablement joué. Nous avons été soutenus dans beaucoup de régions par les membres de l’UFML [Union française pour une médecine libre]. Les coordinations, dont sont issus beaucoup de membres de la FMF, ont été très actives, comme en Bretagne ou dans les Pyrénées. Les résultats obtenus dans ces régions, ou encore à Chalon ou Bourg-en-Bresse, montrent que les coordinations ont massivement voté pour la FMF.

La CSMF estime que le vote contestataire a favorisé les « syndicats poujadistes sans propositions »... Qu’est-ce que cela vous inspire ?

La FMF est magnanime et va mettre cette insulte sur le compte de la déception de la CSMF. Le Dr Jean-Paul Ortiz (président de la CSMF) sait parfaitement que nous ne sommes pas poujadistes, que nous sommes les seuls à avoir écrit un programme basé sur l’expérience de médecins de terrain en activité.

Vouloir donner à la médecine libérale les moyens d’exercer dans des conditions identiques à celles des médecins européens, à savoir avec un secrétariat médical, des locaux décents, et de quoi accueillir des internes pour leur faire découvrir la médecine libérale, si c’est ça être poujadiste, alors je suis poujadiste !

Avec qui la FMF se prépare-t-elle à gouverner dans les URPS ?

Il y a trois syndicats clairement opposés à la loi de santé, avec lesquels on a l’intention de travailler.

Avec Le BLOC, on a déjà fait des alliances dans quatre régions (Bretagne, Normandie, Languedoc-Roussillon/Midi-Pyrénées et PACA) et je regrette qu’on n’ait pas pu le faire partout. On travaillera avec eux.

Avec MG France, la porte n’est pas fermée. Nous rencontrons Claude Leicher, son président, mercredi 21 octobre. Et nous rencontrons Éric Henry, président du SML, jeudi 22. Nous avons l’intention de gouverner avec tout le monde, à condition de faire un vrai programme commun. Face aux ARS, il est hors de question d’être des chambres d’enregistrement.

Nous voulons enrayer la chute démographique, réguler les urgences hospitalières, et modifier le mode de financement des urgences. Sur ces thèmes, on peut trouver un terrain d’entente avec MG et le SML. De plus, les médecins de base réclament l’unité syndicale.

Bien que M. Ortiz nous ait traités de poujadistes, il a lui-même reconnu qu’il fallait que les syndicats travaillent ensemble. Je me félicite de son score qui le ramène à notre niveau. On va enfin pouvoir parler d’égal à égal, et il ne nous regardera plus du haut de son statut autoproclamé de premier syndicat médical français (la CSMF garde ce titre avec 25,4 % des voix tous collèges confondus NDLR).

Avec qui comptez-vous vous allier pour peser sur les futures négociations avec la CNAM ?

Ces alliances vont être naturelles. Si on arrive à le faire pour les URPS, on y arrivera aussi au niveau conventionnel. En dehors de MG France, tous les autres syndicats sont polycatégoriels. On peut trouver un terrain d’entente avec le SML. De son côté, la CSMF a senti le vent du boulet. Si elle ne discute pas avec les autres syndicats, sa situation continuera à s’aggraver. Pour le moment, c’est nous qui imprimons le mouvement, qui représentons une dynamique, ce n’est pas eux.

La contestation face à la loi de santé va-t-elle se renforcer ?

Nous étions contre la loi de santé, on va le rester ! Elle va être définitivement adoptée le 16 et le 17 novembre. Les 13 et 14 novembre, nous appelons à la fermeture des cabinets, les 16 et 17, nous serons devant l’Assemblée. Nous laisserons travailler les coordinations, de façon à ce qu’il y ait un maximum de lettres de déconventionnement déposées chez un huissier, et qui seront mises à exécution au cas où les décrets d’application de la loi de santé étaient publiés.

Vous envisagez vous-même de vous déconventionner ?

Je vais rencontrer les gens de la coordination du 92, et je leur remettrai ma lettre en même temps que les autres.

Propos recueillis par Henri de Saint Roman

Source : lequotidiendumedecin.fr