UNE QUARANTAINE de médecins généralistes et spécialistes libéraux sont rassemblés dans une salle de la mairie d’Athis-Mons, en Essonne. À l’initiative de cette réunion en soirée, François Garcia, maire PS, prend la parole. « Vous vous inquiétez du départ à la retraite de confrères et pour la prise en charge de nos concitoyens, attaque-t-il. Je suis moi-même sensibilisé au déficit potentiel de médecins sur le quartier du "plateau" et nous réfléchissons à la réponse à apporter au problème. Nous avons donc confié une mission de diagnostic de l’offre de soins au Regroupement implantation et redéploiement (RIR). »
Le Dr Bernard Huynh, président du RIR-IDF, présente l’association qui a déjà réalisé 80 « diagnostics » depuis sa fondation en 2005 (voir encadré). « Comme de nombreux autres territoires franciliens, vous êtes concernés par la difficulté à renouveler l’offre de soins de proximité, explique le gynécologue-obstétricien, vice-président de l’URPS francilienne. Nous avons porté un regard extérieur sur votre commune pour identifier avec vous des leviers d’action ».
Six à huit mois d’attente pour certains patients.
Nathalie Noël, chef de projet du RIR-IDF, présente l’état des lieux de l’offre médicale à Athis-Mons. La situation est délicate. La ville de 31 000 habitants compte 32 généralistes et 70 spécialistes, dont une grande partie a un exercice mixte dans l’hôpital privé de la ville. Hors de cet établissement, les médecins, 60 ans de moyenne d’âge, sont proches de la retraite. D’ailleurs, depuis 2000, Athis-Mons a déjà connu 20 départs pour seulement 10 installations. « Nous constatons une forte attractivité de l’hôpital privé au détriment du reste de la ville, explique Nathalie Noël. La situation d’Athis-Mons n’est pas dramatique mais elle montre des signes de faiblesse. Nous voulons confronter ce diagnostic avec votre vision. »
Après cette succession de chiffres, les praticiens réagissent : « Je m’inquiète pour mes patients. Nous en sommes réduits à refuser des patients qui attendent parfois 6 à 8 mois », affirme un médecin. « Cette étude est importante, elle fait prendre conscience que les tracés de l’administration ne sont pas les mêmes que ceux qu’utilise la population », estime le directeur de l’hôpital privé d’Athis-Mons, curieux de voir si le diagnostic du RIR est susceptible de modifier l’offre de soins dans la ville de l’Essonne.
« Ne pourrait-on pas créer des cabinets de groupe ? »
L’assemblée évoque le décès, l’an dernier, d’un médecin de famille qui avait une grosse patientèle et qui a chamboulé le planning des généralistes de la ville. Une orthophoniste expose les difficultés à recruter un confrère dans sa structure. « Est-ce que l’on ne pourrait pas créer des cabinets de groupe pour réduire les coûts ? », suggère l’un. « Une maison de santé serait un soulagement pour la population médicale », affirme un autre. « Nous pensons que c’est une idée », abonde le Dr Huynh. « Pourquoi la municipalité ne se porte-t-elle pas acquéreur des bâtiments en pied d’immeuble ? », interroge un médecin. « Encore faudrait-il en avoir les moyens ! réplique le maire. La santé ne fait pas partie des compétences de la municipalité. Si je peux être facilitateur, je le serai. J’ai évoqué une maison de santé pluridisciplinaire dans le secteur où il y a le moins de médecins. »
Alexandre Grenier, directeur du RIR, propose de poursuivre la discussion lors d’une prochaine réunion plus technique avec les médecins intéressés « pour essayer de construire un plan d’aménagement et aider les jeunes à s’installer ». Au terme de cette présentation, les participants se retrouvent autour d’un buffet. Spectateur attentif, Julien Gallin responsable du service « SROS ambulatoire et relations avec les professionnels de santé » au sein de l’ARS d’Ile-de-France, a apprécié le déroulement de la soirée. « J’ai senti un intérêt pour ce sujet, c’est positif. La volonté de travailler davantage ensemble a émergé. Un dialogue s’est ouvert entre les élus et les professionnels de santé. »
Le Dr Pierre Dubois, généraliste de 34 ans, qui exerce en collaborateur libéral à Athis-Mons, reste sur sa faim : « On voit qu’il y a une préoccupation des élus. Mais sur les actions à mener, il n’y a rien de nouveau. On espérait que ça irait plus loin et plus vite. » Certains praticiens soulignent qu’ils participeront à la prochaine réunion du RIR, curieux de voir si le projet de maison de santé verra le jour.
Jusqu’à quatre fois plus d’antibiotiques prescrits quand le patient est demandeur
Face au casse-tête des déplacements, les médecins franciliens s’adaptent
« Des endroits où on n’intervient plus » : l’alerte de SOS Médecins à la veille de la mobilisation contre les violences
Renoncement aux soins : une femme sur deux sacrifie son suivi gynécologique