C’est un nouveau « SOS » lancé pour les cabinets de groupe en danger.
Il y a un an, l’URPS « médecins » francilienne, en partenariat avec l’Agence régionale de santé (ARS), avait démontré la fragilité de ces structures d’exercice collectif (comprenant au minimum trois professionnels de santé libéraux dont au moins un médecin), confrontées aux départs non remplacés et à l’envolée des coûts de fonctionnement. Trois quarts des gérants interrogés estimaient leur cabinet de groupe en danger, un constat qui avait conduit à la création du « club des mille »*, chargé de proposer un plan de bataille. Un an plus tard, le bilan est encore plus sombre car il est étayé par une analyse économique de 30 cabinets franciliens (échantillon représentatif), présentée aujourd’hui lors d’un colloque.
Misère
Le résultat de cet audit, que « le Quotidien » s’est procuré, est édifiant : selon l’URPS, le déséquilibre financier structurel des cabinets de groupe les rend incapable en l’état de répondre aux nouvelles « exigences sociétales » et missions de santé publique : offre pluridisciplinaire accessible avec continuité des soins (qui suppose des secrétariats en adéquation), mise aux normes pour le handicap, systèmes d’information performants... Alexandre Grenier, directeur de l’URPS francilienne, souligne le paradoxe : « Il y a des aspirations professionnelles et un besoin de la société pour ce modèle d’exercice libéral collectif mais il est très faible économiquement. Il n’y a aucune marge de manœuvre, on est dans la misère ».
Les chiffres de l’URPS sont implacables (voire graphique). Avec 1 770 euros de charges mensuelles moyennes par professionnel de santé (parfois beaucoup plus par médecin), l’exercice libéral regroupé se révèle coûteux et difficile voire impossible à amortir aux tarifs actuels des actes.
Les loyers, charges locatives et taxes (foncier et CFE) constituent sans surprise le premier poste des groupes en région parisienne (700 euros par professionnel), avec une répartition discriminante entre médecins et paramédicaux. « Certains payent les m2 pour d’autres, ou payent des locaux vides », précise Gilles Poutout, directeur de projet sur les cabinets de groupe à l’URPS. Dans ce contexte, le départ non anticipé d’un médecin peut avoir des conséquences catastrophiques pour ceux qui restent.
567 000 euros de dépenses
Le secrétariat arrive en deuxième position des frais des cabinets de groupe (600 euros par mois par professionnel). Las, l’étude montre qu’il s’agit le plus souvent d’un secrétariat sous-dimensionné. « Les horaires actuellement financés ne couvrent que 86% des heures de continuité des soins, précise le Dr Bruno Silberman, président CSMF de l’URPS. On est dans l’accueil, les rendez-vous, le basique… ». Et ce poste est raboté en cas de coup dur. Les besoins des libéraux en secrétariat sont pourtant considérables. Selon l’URPS, les cabinets de groupe disposent de « trois à quatre fois moins de moyens » que les structures publiques pour l’accueil des patients et l’administratif.
Si l’on ajoute les charges opérationnelles (nettoyage, téléphonie, électricité…), les cabinets de groupe sont en général incapables de financer les investissements nécessaires dans les systèmes d’information (SI) pour renseigner et gérer les parcours de santé, met en garde l’URPS.
Au total, a calculé l’Union, un cabinet de groupe moyen supporte environ 567 500 euros de dépenses et charges annuelles pour les murs, l’accueil du public, le système d’information et la gestion de la coordination. Un budget de fonctionnement que ne permet pas de couvrir la seule contribution directe des professionnels. « Dans certains cas, il manque jusqu’à 200 000 euros pour équilibrer la structure, mais si les situations sont très variables », explique Alexandre Grenier.
Parc immobilier d’activités sanitaires à loyer modéré
Face à ce déséquilibre qui fragilise l’offre de soins ambulatoires, ce que reconnaît le directeur de l’ARS Claude Evin (lire ci-dessous), l’URPS avance deux pistes principales.
Côté murs, elle propose que les cabinets de groupe puissent accéder à un « parc immobilier hors marché », à loyer modéré, autour de 100 euros TTC au m2 (contre 240 euros en Ile-de-France et 400 euros à Paris). Deuxième mesure, pour le fonctionnement cette fois : la création de forfaits « structure » négociés dans le cadre des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens (CPOM) conclus avec les ARS et les collectivités. L’URPS suggère un coût de fonctionnement de deux euros par passage de patient pris en charge.
* En référence aux 1 080 cabinets de groupe recensés dans la région
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