LES 170 INTERNES en médecine du travail qui viennent de démarrer leur spécialisation à la fac ont tout compris. Cette spécialité qui a longtemps souffert d’une image d’immobilisme liée à un exercice peu réformé depuis 1946 s’apprête à vivre un big-bang. Avec la loi du 1er juillet 2012 et les décrets parus six mois plus tard, les 5 480 médecins du travail ne suffisent plus. Dans un délai de 5 ans, leurs effectifs devraient même fondre dans 73 départements, selon le Conseil national de l’Ordre des médecins. Une pénurie qui leur donne aussi du prix : les salaires de ces médecins très recherchés explosent et se situe désormais entre 80 000 et 100 000 euros par an – leur rémunération aurait bondi de 20 % en un an, selon certains cabinets de recrutement.
Échapper aux contraintes.
Aujourd’hui, les médecins du travail choisissent réellement leur mode et lieu d’exercice. Certaines entreprises sont même prêtes à multiplier les avantages en nature pour leur donner envie de rejoindre l’industrie, le BTP, la chimie, l’agroalimentaire. Mieux rémunérée que les généralistes, mais sous-payée parmi les spécialistes, la médecine du travail devient « un juste milieu, avec quelques avantages dignes d’intérêt ; elle permet aussi d’échapper aux multiples charges qui pèsent sur tous ceux qui décident de s’installer », insiste l’un d’entre eux (lequel vient de mettre la clé sous la porte de son cabinet de médecine générale, six ans à peine après sa création).
Rôle moteur en santé publique.
Loin d’être ignorés, les médecins du travail deviennent des conseillers très écoutés. Au contact des salariés dans leur milieu de travail et à leur écoute dans le cadre des examens cliniques réguliers, ces praticiens, membres de droit des comités d’hygiène et de sécurité, sont devenus des remparts incontournables pour adapter le travail à l’homme et non l’inverse. Pénibilité, stress, dépression, addictions : le monde du travail permet de repérer de multiples difficultés qui sont devenues des terrains de recherche. L’épidémiologiste Pierre-Yves Montéléon, contribue aux études menées par l’ACMS, l’un des plus grands services interentreprises de santé. Aux côtés des médecins, il a participé à de multiples études qui montrent la recrudescence de maladies sournoises plus faciles à repérer en condition de travail. Les troubles de la mémoire et les difficultés de concentration chez les salariés d’Île-de-France, une étude comparée du stress professionnel, la santé des salariés voyageurs, le maintien dans l’emploi après un cancer ou bien encore les effets secondaires de l’usage additif de la messagerie électronique… Autant de sujets de recherche pour les médecins du travail. Leurs travaux intéressent désormais les décideurs ; ils permettent à l’INRS de dresser quelques statistiques édifiantes. Exemple : le stress professionnel en France coûterait entre 1,9 et 3 milliards d’euros à la société.
Jusqu’à quatre fois plus d’antibiotiques prescrits quand le patient est demandeur
Face au casse-tête des déplacements, les médecins franciliens s’adaptent
« Des endroits où on n’intervient plus » : l’alerte de SOS Médecins à la veille de la mobilisation contre les violences
Renoncement aux soins : une femme sur deux sacrifie son suivi gynécologique