DIFFICILE de s’y retrouver après la « bombe » lancée par l’Ordre national des médecins fin mai.
Pour la première fois, l’institution proposait d’encadrer la liberté d’installation en contraignant les jeunes diplômés à exercer durant cinq ans dans la région de leurs études, et dans une zone choisie par l’ARS. Le tollé a été immédiat chez les médecins installés comme chez les étudiants.
Jeudi dernier, dans un souci d’apaisement, l’Ordre national présidé par le Dr Michel Legmann a réuni sa « commission Jeunes » en présence des syndicats d’étudiants et d’internes, tous vent debout contre le tour de vis ordinal. Selon les futurs praticiens, la réunion s’est tenue dans un climat assez tendu mais l’Ordre aurait mis un peu d’eau dans on vin. Dans un communiqué, les jeunes médecins annonçaient que le Dr Legmann s’étaitengagé auprès d’eux à présenter à son prochain bureauune résolutionsubstituantles recommandations autoritaires « par des mesures non coercitives ». Mais voilà que le lendemain, l’Ordre, laconique, précisait que rien n’était décidé. « Le projet de résolution envisagé sur la régulation du premier exercice sera débattu lors de la session plénière du conseil national le 22 juin ». Si la position de l’Ordre sur la liberté d’installation est difficile à cerner, il a ouvert la boite de Pandore.
Choix politique.
L’une des premières organisations à saisir la balle au bond a été la Coordination nationale des comités de défense des hôpitaux et maternités de proximité. « Oui, la lutte contre les déserts médicaux impose d’en finir partiellement avec la liberté d’installation », martèle la coordination pour qui il s’agit « d’un choix politique responsable ».
Les élus locaux ont emboîté le pas. Le 4 juin, l’APVF (association des petites villes de France), présidée par l’ancien ministre socialiste Martin Malvy, a exhorté le gouvernement à (r)ouvrir le débat sur la liberté d’installation. « Les mentalités semblent bouger face à la gravité de la situation, comme en témoigne l’évolution la récente du Conseil de l’ordre des médecins », se réjouit Martin Malvy . Le 6 juin, les maires de banlieue à leur tour on sonné « l’alerte sanitaire », très inquiets pour la situation médicale médicale des quartiers populaires. Réunis au sein de l’association Ville&banlieue, ces édiles ont sorti l’artillerie lourde : stages obligatoires dans certains territoires fragiles, quotas par spécialité, fin de la liberté d’installation car « la liberté de s’installer ne peut mettre en danger celle de se soigner ».
Au nom des managers hospitaliers, Christophe Gautier, le futur président du SMPS (premier syndicat de directeurs d’hôpital), soutient lui aussi les propositions ordinales et la régulation. « Pour moi, c’est la piste », estimait-il jeudi dans nos colonnes (Quotidien du 7 juin). Christophe Gautier juge que « le modèle touche ses limites » et qu’« il faudrait être aveugle pour penser qu’on peut continuer comme ça ».
A leur rythme enfin, les sénateurs sont entrés dans la danse (voir ci-dessous). Sans prendre parti, à ce stade, pour ou contre la régulation à l’installation, ils ont mis en place un groupe de travail qui vise à empêcher l’émergence de déserts médicaux.
Le gouvernement est attentif à ce « bruit de fond » qui réclame davantage de fermeté dans la répartition des médecins libéraux. François Hollande avait écarté toute forme de coercition pendant sa campagne. La ministre de la Santé, Marisol Touraine, a pris position en faveur des incitations. Pour autant, François Hollande a posé le principe d’une « garantie territoriale d’accès aux soins » à l’horizon 2015, c’est-à-dire d’une « obligation de résultats ».
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