C’est un round conventionnel d’un nouveau genre qui commencera le 10 avril. Avec plus d’un an de retard, l’assurance-maladie va lancer les négociations sur la rémunération des équipes pluriprofessionnelles, pierre angulaire des nouveaux parcours de soins et de la stratégie nationale de santé. Médecins, infirmières, kinés, pharmaciens et autres professions avancent leur doléances. Le manque de moyens financiers, la diversité des acteurs et la complexité du dossier rendent l’équation difficile pour la CNAM. Marisol Touraine réclame un accord fin juillet.
Un accord devra être trouvé « avant la fin du mois de juillet » : Marisol Touraine a déjà fixé la date butoir des négociations sur les nouvelles rémunérations des équipes de soins, dans une lettre de cadrage à l’Union nationale des caisses d’assurance-maladie (UNCAM). Une première réunion a enfin été programmée le 10 avril avec les syndicats.
Moins d’hôpital...
Les objectifs de ce round conventionnel sont connus. La stratégie nationale de santé (SNS) promise par Marisol Touraine mise beaucoup sur la construction de nouveaux parcours de soins, plus lisibles, protocolisés, permettant de s’attaquer au double défi des patients chroniques et du retard français en matière de prévention. Cette « médecine de parcours » suppose la structuration partout d’équipes libérales pluriprofessionnelles (généralistes et spécialistes, auxiliaires médicaux, pharmaciens), capables de gérer cette chaîne des soins, de prévenir les épisodes de décompensation ou les situations de rupture, en particulier à la sortie d’hôpital, mais aussi d’éviter des hospitalisations inutiles et des complications. Un autre objectif sera de développer de nouveaux services tangibles pour les patients (dépistage, vaccination, éducation thérapeutique, plages horaires élargies, accueil continu, tarifs opposables, dossiers partagés). Enfin, ces équipes sont censées conforter l’offre de soins de proximité dans les territoires fragiles. Voilà pour la théorie !
Une négo qui parlera « forfaits »
En pratique, le défi est colossal. Sur la forme, une « négo » impliquant autant d’acteurs n’a jamais eu lieu. Or, non seulement les différents professionnels concernés ne sont pas sur la même longueur d’ondes mais l’Union nationale des professionnels de santé (UNPS) ne fait pas l’unanimité pour conduire seule cette bataille délicate. Le syndicat de généralistes MG France aurait préféré avancer « en direct » avec les infirmiers et pharmaciens. Quelle que soit la forme, les attentes catégorielles des uns et des autres (lire ci-dessous) risquent de compliquer la tâche de la CNAM. « Chaque profession pourra faire jouer son droit d’opposition », analyse le Dr Jean-Paul Ortiz, président de la CSMF.
Sur le fond, la difficulté sera, là encore, de n’oublier personne. Ces nouvelles rémunérations devront à la fois valoriser le travail en équipe dans les structures juridiques qui fonctionnent déjà (maisons pluridisciplinaires, centres de santé), tenir compte de l’existant (pôles de santé, coopérations Asalée, expérimentations Paerpa, programme PRADO), mais aussi reconnaître l’engagement de milliers de professionnels isolés, qui forment l’essentiel du maillage médical français. Objectif : lancer partout une dynamique de coopération libérale.
Un virage ambulatoire à bas coût ?
La généralisation de ces financements d’équipe (relais des expérimentations des nouveaux modes de rémunération - ENMR) demeure le principal défi. Pour une fois, il ne s’agira pas d’augmenter le tarif d’actes ponctuels isolés mais d’inventer une rémunération pérenne (forfaitaire, sur objectifs de santé publique, contrat-type, prime de coordination) qui valorise le travail pluridisciplinaire (achat d’équipements informatiques, secrétariat, temps de coordination), facilite la délégation de tâches entre médecins et auxiliaires médicaux et finance les services innovants aux malades. Si le modèle sera national, les partenaires devront veiller à des possibilités d’adaptation locale sous la houlette des ARS.
La dernière inconnue est la plus sérieuse : quel sera le montant de l’enveloppe réservée à ces rémunérations new look ? Pour 2014, 10 à 15 millions d’euros pourraient être budgétés, une somme très faible pour réussir ce virage ambulatoire. À l’heure où le gouvernement prépare des mesures d’économies massives, les professionnels de santé libéraux redoutent d’avoir peu de grain à moudre.
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