L’assurance-maladie, les organisations des professionnels de santé libéraux et des centres de santé se sont réunis ce mercredi pour l’avant-dernier round des discussions sur les nouvelles rémunérations des équipes de soins de proximité avant la trêve estivale.
Comme lors de la dernière réunion, l’assurance-maladie a tenté de sécuriser ces négociations pour le moins compliquéesen rappelant les enjeux de l’accord et en s’accordant un petit délai supplémentaire. Mécontents de n’obtenir aucune précision sur le montant de l’enveloppe allouée, les professionnels restent prudents sur la suite des événements. « Le Quotidien » fait le point.
• Un calendrier modifié
Le directeur de la CNAM, Frédéric van Roekeghem, a annoncé que la signature de cet accord interpro en discussion depuis trois mois était repoussée à la rentrée. Le 23 juillet, une dernière séance de travail doit déboucher sur la signature d’un protocole d’accord. Trois séances de négociation officielle doivent suivre les 3, 10 et 17 septembre pour une signature conventionnelle espérée le 25 septembre.
Faute d’accord « avant la fin du mois de juillet », le gouvernement imposera un règlement arbitral, avait pourtant dit Marisol Touraine. Sollicité par « le Quotidien », le ministère de la Santé est resté muet sur ce point.
• Déployer les nouveaux services (PRADO)
Selon un projet de protocole d’accord, les professionnels devront s’engager à renforcer la prévention (dépistage du cancer colorectal, vaccination) et l’accompagnement des patients souffrant de pathologies chroniques (cardiovasculaires, diabète, BPCO, maladie rénale chronique, maladies neurodégénératives) « par l’instauration ou le suivi des traitements nécessitant des bilans réguliers et un renforcement de l’observance ».
Afin de favoriser la coordination ville/hôpital, faciliter le maintien et le retour à domicile après une intervention et prévenir les risques de réhospitalisation, les parties signataires doivent également s’accorder pour « développer une démarche de pré-inscription des patients dans les programmes d’accompagnement pouvant être réalisés par le patient lui-même, par le médecin traitant ou par l’équipe médicale de l’établissement », lit-on.
La future prise en charge coordonnée devra s’appuyer dans un premier temps sur les programmes d’accompagnement du retour à domicile (PRADO) déjà initiés (chirurgie orthopédique, insuffisance cardiaque, sortie précoce de maternité) ou en cours d’élaboration (BPCO et plaie chronique).
Sur propositions des syndicats, l’accompagnement après une hospitalisation pour AVC et la prise en charge des soins palliatifs à domicile doivent également être renforcés.
• Péréniser les nouveaux modes de rémunération (ENMR)
En cours depuis 2008 et étendues à 300 structures (maisons et centres) en 2014, les expérimentations des nouveaux modes de rémunération (ENMR) arrivent à leur terme à la fin de l’année.
Le nouvel accord pérenniserait ce dispositif (qui rémunère le travail en équipe, l’accès aux soins favorisé par des horaires élargis et le système d’information partagé) en s’appuyant sur « une contractualisation au niveau local entre les professionnels de santé, l’agence régionale de santé et l’organisme local d’assurance-maladie », lit-on.
Une précision : le travail en équipe concernerait les patients complexes, « sur la base des situations identifiées par les partenaires conventionnels ». La CNAM cite plusieurs exemples, dont les patients hospitalisés pour affections sévères (insuffisance cardiaque, BPCO, asthme instable), pour complications (mal perforant plantaire diabétique, accident iatrogénique), ceux risquant de développer des troubles socioprofessionnels (lombalgies chroniques, syndrome anxiodépressif), etc.
• Quelles équipes, quelles rémunérations ?
Une équipe de soins pourra être rémunérée selon deux scénarios : soit « ponctuellement à l’occasion d’un épisode de soins », soit « de façon plus formalisée autour d’un projet de santé en maison de santé pluridisciplinaire (MSP) mono ou multisite, ayant comme objectifs la prise en charge de patients, de patientèle ou l’organisation de services pour une population sur un territoire ».
Les nouveaux forfaits de coordination pourront être perçus par les professionnels « quel que soit leur statut, qu’ils soient libéraux, exerçant ou non dans le cadre de structures regroupées, ou des centres de santé ».
Le niveau de rémunération dépendra « du service rendu » « d’un cahier des charges commun » et « du degré d’intervention » des différents professionnels impliqués. La rémunération sera a priori versée annuellement.
Les maisons et centres de santé pourront prétendre à ces forfaits en plus des sommes déjà allouées dans le cadre des NMR.
• Scepticisme des professionnels
Le plus grand regret des médecins porte sur le montant de l’enveloppe, toujours inconnu. « Ce sera la surprise du chef à la rentrée », grince le Dr Jean-Paul Ortiz. Le président de la Confédération des syndicats médicaux français (CSMF) déplore l’absence de valorisation des spécialistes du second recours, les « grands oubliés » du projet de la CNAM. Au moment de la signature du protocole, attendu mercredi prochain, ces deux points d’achoppement risquent de « poser un problème », admet le Dr Ortiz.
MG France partage l’agacement sur l’absence de visibilité sur le contenu de l’enveloppe. Son président, le Dr Claude Leicher, n’apprécie « pas du tout » la volonté de la CNAM de « rester maître d’œuvre de la coordination des soins primaires ambulatoires en mettant en avant des programmes PRADO », qu’elle seule décide de déclencher. « C’est le meilleur moyen de décourager les libéraux à une prise d’initiative », juge le médecin généraliste. Le Dr Leicher craint une trop grande présence des agences régionales de santé (ARS) dans les contrats de coordination. MG France signera-t-il le projet ? « En l’état, absolument pas ».
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