Une étude sur le cas Pistorius

10 secondes de gain aux 400 mètres

Publié le 19/11/2009
Article réservé aux abonnés

LES CHEETAHS, les lames ultradynamiques d’Oscar Pistorius, avaient été l’an dernier au centre d’une polémique : elles avaient tout d’abord valu au sprinteur sud-africain d’être écarté de la sélection olympique pour les jeux de 2008, le tribunal d’arbitrage du sport de Lausanne (TAS) jugeant qu’elles l’avantageaient par rapport aux coureurs non amputés de sa catégorie. En appel, la juridiction lui avait finalement permis de concourir pour les présélections, mais le Sud-Africain avait réalisé des temps insuffisants pour se qualifier, à plus de 2 secondes des meilleurs mondiaux.

À l’époque, relèvent deux chercheurs américains spécialisés en physiologie appliquée et biomécanique, Peter Weyand (Université méthodiste de Dallas) et Matthew Bundle (université du Wyoming), les décisions du TAS n’étaient pas appuyées sur des expérimentations. Celles que les deux chercheurs présentent dans le « Journal of Applied Phyosology » (19 novembre) concluent que les Cheetahs confèrent bien un avantage compétitif, avec un gain de l’ordre de 15 à 30 % par rapport aux performances réalisées par les coureurs valides de même niveau. À sa vitesse maximale, Oscar Pistorius repositionnerait ses membres 15,7 % plus vite que les six derniers détenteurs du record du monde des 100 mètres. Et le sprinteur aurait besoin de 20 % de force en moins qu’un coureur valide pour atteindre la même performance que lui.

Tout en exprimant leur admiration pour la motivation unique dont témoigne Pistorius et en saluant ses ambitions de concourir avec des champions valides, les auteurs écrivent que l’examen des données scientifiques établit que « ses lames lui procurent un avantage majeur ». Voilà qui pourrait compromettre ses nouvelles velléités pour participer aux Jeux de 2012, à Londres.

Le débat scientifique n’est peut-être pas définitivement clos. En France, le Dr Dominique Pailler, médecin fédéral national de la fédération Handisport, reconnaît que « les qualités dynamiques des lames en fibre de carbone assurent des performances remarquables et peuvent être, à ce titre, considérées comme un facteur de victoire » mais estime que « leurs effets sont contrebalancés par le fait que le pied humain multiplie par 2,5 la force d’impact lors de l’appui au sol, tandis que la meilleure des prothèses la restitue tout juste, la multipliant au mieux par le facteur 1 ». De fait, les piètres temps réalisés par Pistorius lors des présélections de Pékin vont à l’encontre des conclusions de l’étude américaine.

 CHRISTIAN DELAHAYE

Source : lequotidiendumedecin.fr