C’EST ÉVIDEMMENT un grand écart pour un opéra-comique que de passer d’une scène pour laquelle il fut créé en 1840 à l’immense salle de l’Opéra-Bastille. Mais rentabilité oblige ! Et la mise en scène créée par Laurent Pelly en 2007 pour le Covent Garden de Londres et qui a voyagé à Vienne, New York et Barcelone a été conçue pour de grands espaces scéniques. Des montagnes de cartes du Tyrol meublent la scène et sont ensuite occupées par les murs d’un salon pour évoquer le château des Berkenfield. Des posters descendent des cintres et les très habiles éclairages de Joël Adam réussissent à délimiter des espaces de jeux plus restreints pour les scènes d’intimité. La réécriture des dialogues avec une fortune inégale acclimate la transposition – sans réelle conséquence sur l’histoire – de l’époque napoléonienne à celle de la guerre de 1914-1918. On ne peut pas dire que tout est d’une grande finesse, on frise même parfois la vulgarité, mais ne boudons pas notre plaisir, tout fonctionne à merveille.
Et cela grâce à trois chanteurs-acteurs ayant une énergie communicative et à un chœur qui bouge de façon chorégraphique. Alessandro Corbelli campe avec un formidable abattage le sergent Sulpice, tête du régiment, Natalie Dessay joue – mais parfois surjoue – le rôle de Marie avec le talent que l’on sait et la bonne surprise vient de Juan Diego Flórez, que Pelly a réussi à sortir de sa réserve pour donner à son personnage une sincérité et une crédibilité tout à fait attendrissantes. Doris Lamprecht campe, mais de façon plus monomorphe, le personnage de la méchante Marquise qui devient plus humaine quand, à la fin de l’opéra, sa faute est connue de tous.
En ce qui concerne le chant, une autre génération relève bien celle d’Anderson et Kraus. Contrairement à ses deux derniers rôles sur la scène parisienne (dans « Manon » et « Giulio Cesare »), Natalie Dessay chante Marie avec les exacts moyens du rôle. Pour le charme vocal c’est autre chose, mais n’enlevons pas leurs illusions à ses admirateurs inconditionnels. C’est cependant Juan Diego Flórez qui, selon l’applaudimètre, a le plus transporté le public. Autant dans l’acrobatique « Militaire et mari… » aux 9 contre-ut que dans la romance du deuxième acte, à son dire beaucoup plus difficile à négocier pour le souffle à ce stade de sa carrière.
N’oublions pas Felicity Lott, pas très convaincante dans son numéro d’Anglaise acariâtre dans le rôle parlé de la duchesse de Crakentorp, dans lequel elle a interpolé, à l’instar de Montserrat Caballé en 2007 à Vienne (mais avec infiniment moins d’humour et de panache), la chanson du folklore bernois « Mein G’schatzli », ne serait-ce que pour souligner le luxe que représente ce choix. On doute que cela reste possible dans la période d’austérité dans laquelle, comme l’actualité récente nous l’a appris, doit entrer le budget de l’Opéra de Paris.
Opéra de Paris-Bastille (tél. 0892.89.90.90, www.operadeparis.fr), jusqu’au 11 novembre. Diffusion sur France Musique le samedi 3 novembre à 19 h 30.
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