Le festival s'est ouvert avec la production du « Couronnement de Poppée » de Monteverdi signée par Klaus Michael Grüber en 1999 au festival d'Aix, présentée à l'Opéra de Vichy puis au Théâtre national populaire de Villeurbanne. Le magnifique décor de Gilles Aillaud refait à l'identique – une épure de villa pompéienne avec quelques fresques rouge sang, une rangée de cyprès, les citronniers de Sénèque et un minimum d'accessoires – semble un peu à l'étroit sur la scène du TNP, mais sa poésie fonctionne à plein.
La distribution est constituée de jeunes solistes du Studio de l’Opéra de Lyon, et c’est sa grande force, sauvant la production d’une possible caricature de l’originale. Tous ont un âge qui confère une belle crédibilité à leur rôle. Dans la fosse, Sébastien d’Hérin au clavecin fait des merveilles à la tête de l’ensemble Les Nouveaux Caractères.
La reprise d’« Elektra », de Richard Strauss, monté par Ruth Berghaus pour l’Opéra de Dresde en 1986, restera le souvenir le plus fort, avec l’impression d'avoir été en apnée pendant une heure trente-cinq. L'orchestre est placé sur scène au premier plan (ce qui pour l’Opéra de Lyon, avec comme à Dresde, une fosse trop petite pour contenir les 120 musiciens, est une condition idéale) et une structure métallique blanche rappelant un plongeoir de piscine blanc figure le palais de Mycènes. La mise en scène reprise par Katharina Lang montre le drame des Atrides avec une clarté aveuglante, sans les excès dans la direction d'acteurs et les caricatures que l’on a pu voir ailleurs.
La réussite d’une représentation d’« Elektra » tient autant aux trois protagonistes qu’à l’orchestre. Du trio de femmes, l’Elektra d’Elena Pankratova domine nettement, une voix idéale pour le rôle, à la diction exemplaire et égale sur l’immense tessiture nécessaire, avec de chaudes couleurs fauves.
Des trois productions historiques, c’est sans doute la reprise du « Tristan et Isolde » d’Heiner Müller monté en 1993 pour le festival de Bayreuth qui aura été la moins démonstrative. Est-ce que ce « Tristan » a été trop marqué par la production de Ponnelle qui l'avait précédé, restée cinq étés à l’affiche, ses interprètes Waltraud Meier et Siegfried Jerusalem et son chef Daniel Barenboim ? Est-ce que la modernité esthétique du décor d’Erich Wonder et l’audace des éclairages de Manfred Voss ont été surpassées ? La profonde originalité des costumes japonisants de Yohji Yamamoto est certainement la seule à avoir traversé les ans sans avoir été égalée.
La direction d’acteurs millimétrique, avec des déplacements rappelant la stratégie du jeu d’échecs, est dans la lignée du théâtre de Brecht. Ann Petersen reprend l’Isolde dans lequel elle a débuté sur la même scène en 2011 et, quoiqu’annoncée malade à la première, elle a donné une interprétation très intense et dramatique. Le Tristan de Daniel Kirch n’est pas du même niveau, point faible de la distribution. Le roi Marke de Christof Fischesser est lui un exemple de diction et d’une très belle humanité. Et Hartmut Haenchen mène l’Orchestre de l’Opéra de Lyon à bon port, jusqu’à atteindre des paroxysmes magnifiques au dernier acte.
Pari gagné
Le pari de Serge Dorny, le directeur de l'Opéra de Lyon, est largement gagnant, montrant que les productions réalisées hors mode, hors « modernité », dans des conditions théâtrales exemplaires et par des artistes ayant une véritable réflexion sur l’œuvre, peuvent durer des décennies sans perdre de leur intensité. Et cela pose la question de l’éphémère, avec la tendance actuelle à ne concevoir une production que pour une ou deux saisons.
Le prochain festival de l’Opéra de Lyon, en mars 2018, sera entièrement consacré à Verdi, avec la reprise du « Macbeth » réalisé par Ivo van Hove (qui signera aussi « Le Journal d’un disparu » de Janacek) et un « Don Carlos » en français, annoncé comme la version la plus complète possible, par Christophe Honoré. Une version de concert d’ « Attila » complétera l'affiche, les trois opéras étant dirigés par le nouveau directeur musical Daniele Rustioni. Au programme de la saison 2017-2018 figurent aussi de nouvelles productions du « Cercle de craie » de Zemlinsky (dirigé par Lothar Koenigs), de « La Cenerentola » de Rossini (mise en scène Stefan Herheim) et de « Germania » d’Alexander Raskatov.
Opéra de Lyon, jusqu'au 5 avril. Tél. 04.69.85.54.54, www.opera-lyon.com
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