Emmanuel Meirieu, 43 ans, est un metteur en scène très intéressant qui a choisi le théâtre pour parler du monde. Il va vers les romans et les témoignages portés par de fortes écritures, de Russell Banks à Sorj Chalandon. Les deux spectacles présentés ces temps-ci aux Bouffes du Nord (1) ont été créés il y a quelques mois.
« Les Naufragés » est l’adaptation scénique très puissante d’un ouvrage bouleversant de Patrick Declerck. Ce psychanalyste, qui a fait des études d’anthropologie et de philosophie, écrit selon ses expériences. Il va au plus près de ceux pour qui il témoigne. « Les Naufragés – Avec les clochards de Paris », publié en 2001 (Terre Humaine), était nourri des années qu’il a passées au Centre d’accueil et de soins hospitaliers de Nanterre et dans les rues de la capitale.
Créé dans un immense espace en juin 2018, la Halle Debourg de Lyon, dans le cadre des Nuits de Fourvière, « les Naufragés » est interprété par François Cottrelle, qui cosigne l’adaptation et Stéphane Balmino. Scénographie, lumières, musique sont essentielles. C’est bouleversant. Lisez aussi, du très courageux Patrick Declerck, « Crâne » (Gallimard, 2016) : il y parle de l’opération d’une tumeur au cerveau qu’il a subie.
« La Fin de l’homme rouge », autre plongée dans la réalité, donne à entendre une suite de témoignages d’hommes et de femmes dont la parole est portée par sept remarquables comédiens, notamment André Wilms, Anouk Grinberg, Jérôme Kircher (plus Catherine Hiegel, off). Publié en 2014, le livre de Svetlana Alexievitch, prix Nobel de Littérature 2015, est donné comme un roman. Mais elle a sillonné le pays, interrogé les personnes, comme elle l’avait fait pour « la Supplication », en 1997, sous-titrée « Tchernobyl, chronique du monde après l’apocalypse ». Créé en février 2019 aux Gémeaux de Sceaux, « la Fin de l’homme rouge » est un vrai spectacle : du théâtre avec un fond, du sens, de l’émotion.
Un professeur agressé
Au Rond-Point (2), c’est au cœur d’une institution d’enseignement que nous pénétrons. Yves Ravey est un écrivain très original. « Le Cours classique » n’est pas une pièce – il en a écrit – mais est présenté comme un roman (Éditions de Minuit, 1995). Comme Yves Ravey est professeur d’arts plastiques et de lettres, on se dit qu’il y a là le reflet d’une véritable atmosphère.
Adapté par Joël Jouanneau et Sandrine Lanno, mis en scène par cette dernière, le texte est partagé entre deux personnes. Un professeur de lettres, Conrad Bligh, incarné par Grégoire Œstermann, et le directeur des études, Jean-François Saint-Exupéry, Philippe Duclos. Ils doivent parler d’un très grave incident survenu un peu auparavant. Un de leurs collègues, professeur d’anglais, Monsieur Pipota, a été agressé par des élèves qu’il avait accompagnés à la piscine, allant jusqu’à se baigner avec eux. Ont-ils tenté de le noyer ou voulaient-ils simplement s’amuser ? Une cruauté terrible se répand peu à peu. Les deux comédiens sont magnifiques, fins, délicats, dans l’économie d’une direction d’acteurs rigoureuse. Le dénouement est tragique.
(1) Bouffes du Nord, « Les Naufragés » à 19 heures, durée 1 heure, « La Fin de l’homme rouge » à 21 heures, durée 1 h 50. Du mardi au samedi jusqu'au 2 octobre, puis en tournée. Tél. 01.46.07.34.50, www.bouffesdunord.com
(2) Rond-Point, « Le Cours classique » à 21 heures du mardi au samedi et le dimanche à 15 h 30. Durée 1 h 40. Jusqu’au 29 septembre. Tél : 01.44.95.98.21, www.theatredurondpoint.fr
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