UN JEUNE HOMME est lové dans le canapé beige clair dans une pièce elle-même complètement beige. L’ado joue avec une petite caméra. Plus tard il s’en servira beaucoup et ses images seront omniprésentes. Au fond de la pièce, une cheminée, sur le côté une table bien mise. Sur un buffet, une radio diffuse les dernières infos : on parle beaucoup de l’affaire de la viande de cheval. Cela tombe bien, de la viande et même disons, de la bidoche, il y en aura beaucoup, manipulée sans ménagement devant nos yeux.
« Ubu Roi », farce de potaches, plaît aux plus grands metteurs en scène. Elle attise leur imagination et l’on en a vu des dizaines de versions. Jamais la même. Ici, pour résumer abruptement, on pourrait dire que Declan Donnellan pratique une double opération : il fait des personnages bourgeois d’un dîner (des gens, tous habillés en beige clair, qui ressemblent furieusement aux spectateurs de la belle banlieue sud, aux spectateurs des Gémeaux) des êtres doubles, dont les mauvais instincts se déchaînent en parenthèses horrifiques qui crèvent comme bulles de savon et ils reviennent gentiment au dîner… Donnellan double ce mouvement de schize d’un transport de la farce vers le Grand Guignol ! Vous en aurez pour votre content de tripes, de sang, d’humeurs diverses et de cruauté, de bêtise, de folie !
On perd évidemment la joliesse poétique de certaines scènes : les météores, neige, vent, ne sont pas abandonnés, mais ils semblent factices et accessoires. On ne comprend pas forcément clairement les voyages d’Ubu. Mais qu’importe ! Ce qui intéresse Donnellan ici, c’est bien de montrer l’hypocrisie bourgeoise et ses bas instincts. Il utilise des éléments simples (les tripes peuvent être des flots de rubans rouges et les trappes des sacs de plastique) et des éléments très sophistiqués (la vidéo). Il en rajoute sans cesse sur l’horreur, le dégoûtant. Il faut avoir le cœur bien accroché : les images comme les sons terrifient !
Les comédiens sont formidables. Très engagés. Saluons Christophe Grégoire, Ubu, Camille Cayol, son épouse, Xavier Boiffier, Bordure, Vincent de Bouard, Wenceslas, Cécile Leterme son épouse la reine Rosemonde et enfin ce terrible chenapan de Bougrelas, Sylvain Levitte. Quelle équipe !
Les Gémeaux de Sceaux (tél. 01.46.61.36.67, www.lesgemeaux.com), jusqu’au dimanche 3 mars, à 20 h 45 en soirée et à 17 heures dimanche. Durée : 1 h 50 sans entracte. En tournée, avec notamment la Comédie de Béthune, du 2 au 18 mars, le Théâtre national de Bordeaux, du 26 au 29 mars, et la Criée, à Marseille, du 3 au 6 avril.
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