QUATRE COMÉDIENS, Clémentine Verdier, Julie dans « Mademoiselle Julie », Christophe Maltot, Adolf, le deuxième mari, peintre, dans « Créanciers », Clara Simpson, Christine, la cuisinière dans « Mademoiselle Julie », et Tekla, la femme écrivain dans « Créanciers, Wladimir Yordanoff, Jean dans « Mademoiselle Julie » et Gustav, le premier mari qui vient se venger dans « Créanciers ». Quatre virtuoses impressionnants. Dans un décor unique à dominante rouge et verte qui montre les intérieurs et suggère les extérieurs, n’étant transformé que par les meubles, les objets, les lumières (Renaud de Fontainieu, Fanny Gamet, Julia Grand).
Les deux pièces datent de la même année : 1888. Elles parlent de destruction, d’autodestruction, de suggestion, d’ascendant psychologique, de cruauté, de différence de classe, de culture, elles parlent de l’homme trop humain, elles parlent des femmes, de rêve, et des relations terribles entre les sexes, elles parlent de la « guerre des cerveaux », comme le dit Strindberg lui-même. Elles parlent des âmes.
Il y a quelque chose du suspense à la Hitchcock dans les deux pièces. En cela réside leur fabuleuse modernité d’ailleurs, même si le monde qu’elles évoquent n’est pas tout à fait le nôtre.
Toutes les nuances.
Ce qui frappe le plus, ici, c’est la manière neuve dont on entend le texte. Terje Sinding, qui connaît le suédois et le français, est un traducteur d’une précision parfaite. On a enfin toute la crudité des personnages, toutes les nuances, tous les mots équivoques. On comprend comme jamais ces deux œuvres, dont on a si souvent vu des versions différentes.
Les costumes de Thibaut Welchlin, robe coquelicot de Tekla, vert amande de Julie, robe de chambre d’Adolphe, livrée de Jean, sobriété de Gustav, simplicité harmonieuse de Christine, tout ici sonne juste et cerne avec finesse les personnages. Les pièces sont jouées avec ardeur, fermeté, précision par les quatre interprètes qui mériteraient que l’on analyse chacune de leurs partitions. Mais autant vous laisser le plaisir d’une découverte qui passionne et bouleverse. On n’en a jamais fini avec Strindberg et médecins, psychanalystes ne peuvent qu’être passionnés par l’acuité des analyses de l’écrivain, sa lucidité, sa force à affronter tous les démons et toutes les béances des esprits, des âmes.
Saluons Christophe Maltot, déchirant Adolf, creusé de l’intérieur et qui meurt sous les mots cruels de Gustav ; saluons Clémentine Verdier, grandie dans la troupe du TNP, Julie ultraféminine et déchirée par son éducation de garçon, ses pulsions contradictoires, sa fragilité ; saluons Clara Simpson, aimante et lucide Christine et brillante et complexe Tekla ; saluons Wladimir Yordanoff, Jean, troublé, exalté, dur, Gustav, pervers, méchant, sans pitié. Toutes les plus fines nuances du texte nous sont offertes grâce à cette mise en scène, cette traduction, ces interprètes. Un sommet de l’art théâtral.
Théâtre de la Colline (tél. 01.44.62.52.52, www.colline.fr), en alternance avec possibilité de voir les deux pièces les samedis et les dimanches. Jusqu’au 11 juin. Chaque pièce dure 1 h 40. Les traductions sont publiées par Circé (7 euros chaque volume). En vente à la librairie du théâtre ou sur www.editions-circe.fr.
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