ELLE EXPRIME la fragilité et la sourde véhémence du personnage imaginé par Ingmar Bergman. Dès ses premiers pas au théâtre, Sophie Marceau avait été très convaincante. Sensible, nuancée, belle, elle est une interprète intelligente et déliée. Avec « Eurydice », de Jean Anouilh, en 1991, dans une mise en scène de Georges Wilson (elle obtint le Molière de la révélation) et « Pygmalion » deux ans plus tard, elle est rare au théâtre. On est heureux de la retrouver.
Dans un décor de panneaux de tulle signés André Acquart, elle est Viktoria, une femme qui semble avoir perdu la raison et qui tente de recomposer les bribes de sa vie. Elle se remémore, convoque ses fantômes. Il y a une simplicité touchante dans la manière dont l’interprète aborde ce texte qui parle dru et cru. Indices du temps, Viktoria a 43 ans, s’adresse à sa gouvernante, à son mari qui la néglige. Elle a étudié la peinture avec Eugène Carrière et a croisé Richard Strauss. On sent vaciller sa raison et sans doute nous parle-t-elle depuis un lieu d’enfermement. C’est un beau personnage, déchirant, une conscience brisée qui tente de se ressaisir, mais n’y parvient pas. Voix, regard, manière d’être et de vaciller, beauté, tout séduit dans le jeu de Sophie Marceau.
Bénédicte Acolas l’a convaincue de revenir sur scène. Inconnue du monde du théâtre, elle signe ici sa première mise en scène, la traduction et l’adaptation. Elle a lu le scénario d’Ingmar Bergman dans un ouvrage publié par « les Cahiers du cinéma » en 2002 et qui réunit trois scénarios. Les traductions françaises sont établies par Vincent Fournier, professeur émérite, grand spécialiste de la langue de Bergman (entre autres).
« Une affaire d’âme », texte composé comme « un plan rapproché », n’a jamais été tourné, mais créé à la radio suédoise. Contrairement à ce que déclare Bénédicte Acolas, qui rebaptise le texte « Une histoire d’âme », « Une affaire d’âme » a été donné en langue française par une comédienne de grand talent, Myriam Saduis. C’était en 2008 au théâtre Océan Nord de Bruxelles. Ce spectacle a d’ailleurs reçu le prix « découverte de l’année » de la critique belge. Une reprise était programmée l’été dernier au Théâtre des Doms d’Avignon, mais la détentrice des droits, Bénédicte Acolas, n’a pas autorisé une exploitation de trois semaines dans le « off ».
Cela n’enlève rien à la finesse de l’interprétation de Sophie Marceau ni à l’intérêt de ce texte. Mais on regrette que le premier traducteur et la première interprète soient ainsi occultés.
Théâtre du Rond-Point, salle Jean-Tardieu (tél. 01.44.95.98.21, www.theatredurondpoint.fr), jusqu’au 19 novembre. À 19 h 30 du mardi au samedi, représentations supplémentaires le samedi à 15 h 30 sauf le 19 novembre. Relâches dimanche, lundi et le mardi 1er novembre. Durée : 1h15. Texte publié dans la traduction de Vincent Fournier dans « Une affaire d’âme », Cahiers du cinéma Fiction, 2002 (25 euros).
DJ et médecin, Vincent Attalin a électrisé le passage de la flamme olympique à Montpellier
Spécial Vacances d’été
À bicyclette, en avant toute
Traditions carabines et crise de l’hôpital : une jeune radiologue se raconte dans un récit illustré
Une chirurgienne aux nombreux secrets victime d’un « homejacking » dans une mini-série