Alors que se tient le 28 février la Journée internationale des maladies rares, les rapporteurs de l'étude prospective RARE 2030, sponsorisée par le Parlement européen et la Commission européenne, viennent de produire leurs recommandations - fruit de deux ans de travail - pour améliorer la politique européenne dans ce domaine. Ils mettent notamment l'accent sur la nécessité d'un investissement de l'Union européenne (UE) dans la santé, un secteur qui ne relève actuellement pas de ses compétences.
Le rapport, écrit en partenariat avec l'Organisation européenne pour les maladies rares Eurordis et fort de plus de 120 pages, a été produit à la suite de la consultation de 200 experts, d'un panel de 27 jeunes citoyens et de 3 663 réponses à une enquête menée auprès des associations de patients.
30 millions d'Européens concernés
On estime que 30 millions d'Européens (dont 20 millions de citoyens de l'UE) souffrent d'une des 6 000 maladies rares répertoriées, définies par une prévalence inférieure à 5 cas pour 10 000 habitants. Les experts impliqués dans le projet RARE 2030 ont commencé par établir une photographie de la situation actuelle des patients (errance médicale, besoins médicaux non remplis, retard au diagnostic…) puis ils ont identifié 12 tendances susceptibles de modifier cette situation.
Ces 12 tendances sont d'ordre démographique, socioculturel, technologique, politique et économique. Il s'agit notamment du développement des réseaux européens de centres experts, de la montée en compétences des patients experts, du développement du big data et du séquençage haut débit et de la digitalisation des connaissances, mais aussi des contraintes attendues sur les budgets nationaux dédiés à la santé en général.
Solidarité, coopération et investissements publics
À partir de là, quatre scénarios sont possibles selon les experts. Si l'on favorise l'innovation basée sur les besoins des patients et la responsabilité collective alors c'est le scénario « Social Justice World » qui l'emportera. Un tel scénario sera rendu possible si « l'UE augmente son pouvoir législatif en matière de santé, de bien-être social, d'accès aux soins, de traitement, d'éducation, de soins psychologiques et de réduction des risques d'être laissé de côté », estiment les rapporteurs.
Pour se rapprocher au mieux de ce scénario, les rapporteurs formulent plusieurs recommandations. En premier lieu, ils préconisent la mise en place de plans nationaux intégrés au niveau européen, ce qui implique une harmonisation des définitions, des objectifs communs, des recommandations européennes sur la mise en place de tels plans nationaux, un système de collecte automatisé des données à l'échelle européenne et des moyens communs d'évaluation des politiques, une coordination entre les plans nationaux et les plans européens tel que l'agenda européen des cancers rares 2030.
Ensuite, le rapport demande que l'Europe mette des moyens pour réduire l'errance diagnostique et thérapeutique via l'éducation et l'adoption de standards nationaux, la mise en place de cohortes de patients. L'amélioration des standards de soins, notamment en renforçant les réseaux de centres experts et en misant sur la solidarité européenne pour améliorer les systèmes de santé, est également proposée, de même que l'établissement de partenariats avec les associations de patients, l'augmentation des fonds européens alloués à la recherche, l'amélioration des bases de données épidémiologiques et la mise en place de réglementations européennes relatives au prix et au remboursement des médicaments.
Le précédant Covid
Dans l'ensemble, ces mesures supposent que l'UE acquiert des compétences en matière de santé. Pour la députée européenne belge Frédérique Ries qui a participé au projet Rare 2030, le moment est idéal pour y parvenir. « Lorsque nous avions commencé à travailler avec Eurordis, nous ne savions pas encore que le Covid-19 allait frapper l'Europe et redessiner le rôle de l'UE vis-à-vis de la santé », explique-t-elle.
Invité à s'exprimer lors de la publication du rapport, le ministère de la Santé Olivier Véran a promis qu'avec la présidence française de l'UE au premier semestre 2022, « les maladies rares deviendront une priorité ! La France va notamment pousser la mise en place d'un règlement européen sur les maladies orphelines et le renforcement des réseaux de centres maladie rare ».