Télémedecine

Téléconseil ou téléconsultation ? Les députés demandent plus de clarté dans les offres privées et critiques les abonnements « à la Ramsay »

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Publié le 19/07/2023
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Suite à la polémique suscitée par l’offre d’abonnement de téléconsultations illimitées de Ramsay, une mission flash avait été confiée à deux députés sur le sujet. Leur rapport, présenté à la commission des affaires sociales de l’Assemblée ce 19 juillet, appelle à rester vigilant face à ce risque de financiarisation de la santé qui ne répond pas à aucun besoin.

Crédit photo : GARO/PHANIE

En juin dernier, le groupe de cliniques privées Ramsay lançait une offre d’abonnement de téléconsultations qui a fait polémique chez les médecins. Pour un forfait mensuel à 11,90 euros, la promesse est d’avoir accès 7 jours sur 7, 24 heures sur 24 à des téléconsultations de manière illimitée. L’offre a suscité une vive polémique, l’Ordre des médecins la considérant notamment comme « contraire à la déontologie médicale ».

Cette polémique a relancé le débat autour des offres commerciales de téléconsultation et entraîné le lancement d’une « mission flash » portée par les députés Pierre Dharréville (PCF) et Stéphanie Rist (Ensemble) sur le sujet. Ce mercredi 19 juillet, ils présentaient les conclusions de leur mission devant la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale.

Un flop commercial

Les auditions menées par les deux députés ont notamment permis de faire un bilan du niveau de recours à ces offres, et il extrêmement faible. Ramsay a indiqué aux rapporteurs que 47 abonnements étaient actifs au 29 juin 2023 et que 15 abonnements avaient été résiliés. Par ailleurs, seuls 45 appels ont été émis, pour accéder à un généraliste dans trois quarts des cas et à un médecin spécialiste dans un quart des cas. Ce service permet de répondre majoritairement à des demandes en dehors des horaires d’ouverture des cabinets médicaux (51 %) et d’obtenir une prescription dans 40 % des cas.

« Preuve du faible engouement pour ce type de formule, les autres sociétés de téléconsultations auditionnées par les rapporteurs ne commercialisent pas d’abonnements de téléconsultations et n’envisagent pas de le faire », souligne le rapport.

Si la mission flash questionne donc les besoins d’une telle offre, ils remettent aussi en question l’esprit d'une telle pratique commerciale. « Elle témoigne d’une conception consumériste et marchande de la santé. Une telle offre, venant d’un grand groupe privé à but lucratif, interroge quant aux objectifs poursuivis. Si de telles pratiques devaient se développer, elles viendraient installer un système d’accès aux soins à deux vitesses », écrivent-ils.

« Nous ne souhaitons pas le développement de ce type d'offre, et j'appelle à ce qu'elle cesse », a même déclaré Pierre Dharréville lors de l’audition. « Si cette offre devait perdurer, il faudrait rapidement regarder ce que nous devons faire en la matière », a-t-il ajouté.

Encadrer l'installation des télécabines

La mission flash ajoute aussi que « la souplesse offerte par ce type d’abonnement entretient une certaine confusion entre ce qui relève davantage du conseil médical d’une part et d’un examen clinique à distance d’autre part ». La première proposition du rapport consiste donc à obliger les plateformes à clarifier leurs offres en distinguant ce qui relève du téléconseil et ce qui relève des téléconsultations.

De manière générale, même si ces offres par abonnement restent marginales, les rapporteurs incitent les autorités à rester vigilantes pour éviter « une financiarisation ». Ils recommandent aussi de mieux encadrer l’installation des télécabines en définissant des lieux où leur implantation est autorisée ou interdite.

Mais toute la téléconsultation n’est pas à jeter. « On ne peut pas dire que la téléconsultation n'a pas d'intérêt », a estimé Stéphanie Rist. Les deux rapporteurs souscrivent par exemple à l’idée que le seuil maximal de 20 % de téléconsultations par praticien soit ajusté, notamment pour certaines spécialités qui se prêtent bien à ce mode d’exercice. « Ce qui me paraît important, c'est que l'exercice en présentiel doit être majoritaire » pour un médecin, a déclaré Mme Rist.

S'inspirer des applications de conseils en parentalité

Par ailleurs, au-delà de l’offre Ramsay, la mission flash a également étudié d’autres offres de télésanté et constaté le succès de plusieurs applications, prodiguant notamment des conseils en parentalité.

« Outre des informations disponibles gratuitement, elles permettent de fournir rapidement, en contrepartie d’un tarif mensuel de 10 euros environ, des réponses personnalisées à toutes les questions que peuvent se poser les parents, via une messagerie instantanée qui permet l’envoi de messages, mais aussi de photos et de vidéos. Ces réponses sont apportées par des équipes pluridisciplinaires composées de pédiatres, de sages-femmes et d’infirmières puéricultrices. Elles permettent ainsi de compléter le suivi pédiatrique classique dans une logique de prévention », détaille la mission.

Les rapporteurs estiment que ces applications sont « intéressantes pour le système de santé car elle favorise un meilleur aiguillage des parents ».

Ils recommandent donc aux pouvoirs publics de s’en inspirer pour proposer un accompagnement renforcé dans le champ de la parentalité. Ils évoquent par exemple la possibilité de mettre en place « une PMI numérique » pour répondre aux questions des parents au cours des 1 000 premiers jours.


Source : lequotidiendumedecin.fr