Attendu depuis 2004 (lire ici), le Dossier médical partagé (DMP) fait son grand retour. La ministre de la Santé Agnès Buzyn et le directeur général de l'Assurance maladie, Nicolas Revel, ont annoncé ce mardi leur intention de généraliser à l'ensemble du territoire le DMP nouvelle formule, testé dans 9 départements depuis sa reprise en main par la CNAM il y a deux ans.
Après 14 ans d'errements, un déploiement chaotique qui aurait coûté plusieurs centaines de millions d'euros selon la Cour des comptes, la ministre de la Santé a invité chaque Français à créer lui-même son carnet de santé numérique, soit en ligne sur dmp.fr, soit sur l'application dédiée de façon sécurisée, soit encore en se rendant dans l'accueil de sa CPAM ou en pharmacie.
Pour l'instant, 1,8 million de dossiers ont été ouverts. Le gouvernement souhaite l'ouverture de 40 millions de DMP d'ici la fin du quinquennat. « Maintes fois annoncé, maintes fois repoussé, le DMP doit devenir demain une évidence pour tous les Français, comme l'est devenue la carte Vitale », a déclaré Agnès Buzyn. Pour cela, une vaste campagne de communication sera déployée par l'Assurance maladie ces prochains jours.
Meilleure coordination
La ministre de la Santé et le patron de la CNAM ont également vanté les mérites de cet outil partagé pour les généralistes. Il doit notamment améliorer la coordination entre professionnels de santé qui interviennent dans le parcours de soins du patient. Le DMP contiendra en effet des documents comme les comptes rendus d'hospitalisation, les résultats d'examens biologiques ou encore le volet médical de synthèse accessibles en un clic. Lorsqu'un DMP est créé, l'Assurance maladie injecte également automatiquement l'historique de deux années de remboursements. Les autres documents peuvent être déposés par le patient ou par un professionnel de santé qui s'identifie grâce à sa carte CPS.
Pour l'instant, 69 % des logiciels métiers des médecins libéraux sont compatibles avec l'interface du DMP. Lorsque c'est le cas, le médecin traitant peut enregistrer en un clic son compte rendu de consultation et intégrer le volet médical de synthèse de son patient sur le DMP.
Volet de synthèse médicale
Selon le Dr Jean-Michel Lemettre, généraliste à Amboise, qui a expérimenté le DMP depuis 2016, et a été invité à en vanter les mérites ce mardi à l'issue d'une conférence de presse, le contenu des DMP sera déterminant pour sa réussite. Le praticien estime que le volet de synthèse sera l'élément le plus pertinent à intégrer par les médecins traitants. « Il rassemble les antécédents médico-chirurgicaux du patient, ses problèmes chroniques en cours, ses allergies et ses traitements de fond. Il est essentiel que le DMP contienne des éléments de synthèse et pas seulement des documents en vrac dans lesquels il est chronophage de retrouver l'information recherchée », témoigne le généraliste.
Le Dr Lemettre évoque plusieurs cas de figure dans lesquels le DMP aurait un rôle clé à jouer s'il est alimenté par ce volet. « Si un médecin généraliste exerce en maison médicale de garde, il part actuellement de zéro lorsqu'il reçoit un patient qu'il ne connaît pas. S'il a accès à son DMP, 30 secondes après avoir lu la carte Vitale du patient, il connaîtra les données du patient et pourra se concentrer sur son métier de médecin. »
15 millions d'euros chaque année
Enfin, le DMP pourrait faire gagner un temps précieux aux généralistes qui accueillent dans leur patientèle des personnes n'ayant plus de médecin traitant lorsqu'ils partent à la retraite. « Avant, le patient arrivait avec son dossier papier sous le bras et je devrais le numériser. Avec le DMP ces informations sont directement accessibles dans mon logiciel métier », explique le Dr Lemettre. Le généraliste alerte cependant sur le fait que chaque professionnel de santé doit intégrer ses propres comptes rendus dans le DMP. « En tant que médecin traitant, je reçois tous les courriers d'hospitalisation, de spécialistes et tout numériser me prendrait beaucoup trop de temps. Il faut que chacun participe à son alimentation. »
Pour arriver à déployer le carnet de santé numérique, l'Assurance maladie dispose d'un budget annuel de 15 millions d'euros. La CNAM a présenté un calendrier ambitieux de développement : dès le mois d'avril 2019 un espace réservé aux directives anticipées sur la fin de vie sera ouvert sur le DMP. Une nouvelle version de l'application mobile verra le jour avant la fin de l'année. L'Assurance maladie prévoit également d'y ajouter d'ici 2022 le carnet de vaccination, la possibilité d'alimenter le DMP via des objets connectés, l'utilisation de la e-carte Vitale pour simplifier les créations. Elle veut aussi développer un moteur de recherche sur dmp.fr ou encore mettre au point des indicateurs sur l’iatrogénie.
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