La loi Buzyn est examinée en Commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale cette semaine et plus de 1 300 amendements ont été déposés. Parmi eux, plusieurs proposent d'autoriser les infirmiers à établir des certificats de décès à la place du médecin traitant.
« La démographie médicale actuelle complique la rédaction des constats de décès (...). Or, l’enjeu éthique est important : les familles ne devraient pas attendre cet acte, qui détermine pourtant tout le processus d’inhumation et de deuil » constatent plusieurs parlementaires de la majorité, dont le généraliste député LREM de la Loire Julien Borowczyk. Leur amendement vise à élargir cette tâche aux futures infirmières de pratique avancée (IPA) via un décret en Conseil d'État. Ils proposent par ailleurs de solliciter la HAS « afin de préciser les contours de cette nouvelle disposition ». Les députés LREM envisagent aussi d'inclure un module dédié à l’évaluation clinique des décès dans la formation des IPA.
Délais de constat « loin d'être raisonnables »
La député infirmière de formation Emmanuelle Fontaine-Domeizel (Alpes-de-Haute-Provence-LREM), estime aussi que certains délais pour constater le décès « sont loin d’être raisonnables » et entraînent « des moments de grandes souffrances tant au niveau des familles qu’on ne peut informer du décès que des soignants ne pouvant demander la mise en œuvre du travail des pompes funèbres pour la conservation des corps ». Les socialistes ont déposé pour leur part un amendement visant à élargir les compétences de tous les infirmiers « pour l’établissement du certificat dans des zones bien identifiées et suite à une formation adaptée ». Une mesure qui serait particulièrement utile dans les territoires d'Outre-mer « où la présence médicale est rare », indiquent les auteurs de l'amendement.
Syndicats prudents
Les représentants de généralistes sont divisés vis-à-vis de cette disposition. Le président des Généralistes-CSMF Dr Luc Duquesnel ne trouve « pas choquant » d'autoriser les infirmiers à établir ces certificats, « tant qu'il y a un besoin identifié sur le terrain ». Il estime par ailleurs que les IDE « sont tout à fait aptes » à les réaliser. Son confrère de la FMF Dr Jean-Paul Hamon est plus réservé : « Cela existe déjà en Angleterre lorsqu'il s'agit de décès attendus. Dans les autres cas, tout dépend des circonstances du décès. Il faut voir sous quelles conditions les infirmiers pourraient prendre le relais », exprime-t-il. Pour le président de ReAGJIR (jeunes généralistes) Dr Yannick Schmitt, c'est une fausse bonne idée. « Les médecins ont une responsabilité médico-légale que n'ont pas les infirmiers. Il faudrait déjà penser à rémunérer les généralistes pour ces constats », milite-t-il.
Pour rappel, depuis mai 2017, un forfait de 100 euros est versé directement par l'Assurance maladie au généraliste uniquement lorsque le certificat de décès est établi pendant les heures de permanence des soins (PDSA). En dehors de cette disposition, les médecins de famille sont peu nombreux à se faire rémunérer le déplacement au domicile du patient par respect pour la famille. 48 % des 302 praticiens ayant participé à une enquête sur legeneraliste.fr en mars 2018 ont déclaré ne pas faire payer la famille du défunt quand ils sont amenés à réaliser un constat de décès.
Le manque de médecins pour réaliser les certificats de décès est en tout cas un vrai sujet sensible dans certains territoires. En juin dernier, le Dr Philippe Ly Cong, généraliste à Champigny (Val-de-Marne), racontait dans un article de nos confrères de France Inter comment il avait été réquisitionné par les forces de l'ordre pour établir un certificat de décès. L'Ordre du Val-de-Marne envisageait alors de mobiliser les médecins retraités volontaires du département en relais du généraliste, mais pas les IDE.
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