Une fois encore, les sénateurs n'ont pas failli à leur réputation.
Au cours de l'examen du projet de loi de santé, des élus de tout bord se sont montrés déterminés à résoudre le problème des déserts médicaux, maniant la carotte et (parfois) le bâton, n'hésitant pas à bousculer la ministre de la Santé.
Certaines mesures ont une portée symbolique comme le fait d'intégrer l'objectif de « répartition équilibrée » des futurs professionnels sur le territoire dans les objectifs généraux des formations de santé. Autre amendement voté : le principe de faire primer, dans la détermination du nombre d'étudiants reçus en deuxième et troisième année de premier cycle, le critère des « besoins de santé du territoire » sur celui de la capacité d'accueil des facultés.
Une année en autonomie qui fait jaser
Initiative beaucoup plus controversée, les sénateurs ont transformé la dernière année du troisième cycle des études de médecine générale mais aussi d'autres spécialités à définir par décret (pédiatrie, ophtalmologie) en une année de pratique « ambulatoire en autonomie », réalisée en cabinet ou en maison de santé, en priorité dans les zones sous-denses. Cette mesure permettra « de déployer plusieurs milliers de professionnels de santé sur l'ensemble du territoire très rapidement », a plaidé Yves Daudigny, sénateur socialiste de l'Aisne. Mais ce vote a soulevé un tollé médical. Le Sénat veut créer une « sous-médecine » dans les zones sous-denses, a taclé la CSMF. Pour les doyens de médecine, pas question d'exposer « les étudiants en formation à un stress qui pourrait nuire à leur exercice professionnel ». Quant au Syndicat national des enseignants de médecine générale (SNMEG), il juge qu'il n'est pas nécessaire « de faire porter aux internes le poids d'erreurs qu'ils n'ont pas commises ».
Encourager les installations rapides
Au chapitre de l'installation des jeunes, les sénateurs auront finalement privilégié les incitations à la coercition, jugée inopérante. Les internes bénéficiaires du contrat d’engagement de service public (CESP, sorte de bourse anti-déserts), pourraient voir cette allocation de 1 200 euros par mois versée pendant trois ans (au lieu de deux).
Bonus fiscal également : les sénateurs ont entériné une exonération de cotisations sociales – valable cinq ans – pour les jeunes qui s'installent rapidement dans les secteurs fragiles (dans un délai de trois ans après l'obtention de leur diplôme). En revanche, cet avantage fiscal a été exclu en zone surdotée.
Autre discussion polémique : la commission des affaires sociales du Sénat a tenté, en vain, d'imposer la limitation à trois ans de « la durée totale des remplacements ». La mesure, écartée par la ministre de la Santé, n'a pas été adoptée en séance.
Nouvel échec du conventionnement sélectif
Comme prévu, des sénateurs ont exhorté la ministre à faire preuve de courage politique pour imposer le conventionnement sélectif dans les zones surdotées (sur le principe d'une nouvelle installation pour un départ). Après un débat vif, cette mesure de « régulation, jamais testée », récusée par Agnès Buzyn, a été écartée. Plusieurs élus ont reproché à la ministre de la Santé de céder au lobby médical.
Le Sénat a toutefois instauré une obligation de négocier dans le cadre conventionnel « la contribution des médecins à la réduction des inégalités territoriales dans l'accès aux soins ». Enfin, la Haute assemblée a reconnu aux maires la possibilité de saisir le conseil de l'Ordre de situations de carence médicale afin d'ouvrir la possibilité de recrutement de médecins adjoints.
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