Courrier des lecteurs

Fable actuelle

Publié le 07/02/2019

Schopenhauer avait remarqué et insisté sur le fait que, si l’intelligence va en décroissant très vite quand on descend l’échelle animale, la volonté reste égale…

…La volonté s’affirme partout identique à elle-même, et se produit toujours avec les mêmes caractères : attachement extrême à la vie, égoïsme absolu à l’égard de tous les autres êtres. Chez le moindre insecte, la même la volonté existe dans toute sa perfection et son intégrité ; il veut ce qu’il veut aussi résolument et aussi parfaitement que l’homme…

Le mystère de l’évolution, repenser l’évolution et l’hominisation. Georges Torris. Ed François Xavier de Guibert. p 105.

Grand reporter, je me trouvai en juin 1967, à couvrir pour L’ Echo de la Brousse des conflits entre deux ethnies de tout temps rivales. La nuit était fraîche et quelques cauchemars me l’avaient écourtée. Je sortais de ma tente afin de fumer. Quelques pas et je tombai nez à nez avec un lion. Tremblant de la tête aux pieds, conscient qu’une retraite était impossible, la pensée de Schopenhauer traînante dans les quelques neurones qui me restaient non accaparés à réguler mes fonctions vitales, je tentais une négociation afin d’avoir en pensée ultime, la confirmation ou l’infirmation de la réflexion du Maître… En l’occurrence ; l’absence de pitié pour une autre espèce que la leur ne souffrait-elle aucune exception chez les félidés ?

-Vous fumez ? (Le tutoiement, par le biais de l’estime, aurait renforcé la complicité, mais le vouvoiement, marque du respect, même dans la savane à cette heure indue de la nuit, me parut plus idoine).

-…

-C’est des blondes !…Je pense que vous devez plutôt fumer la pipe, avec votre look un peu baba cool… La crinière, la barbe… tout ça !... J’ai de la marie-jeanne dans la tente ça vous tente ? (J’indiquai du pouce le repli que je comptai opérer pour lui fournir un joint et prendre une arme, mais un rugissement m’en retint).

- Ok… Aussi impressionnant que celui de la Goldwing Mayer !...Bravo !...Vous savez que c’est moi qui ait soigné Clarence en 66 lorsqu’il faisait ses crises d d‘épilepsies et que les studios allaient le virer ?... Je lui refilais ma quinine… Il m’a fait parrain de son dernier lionceau, qu’il n’a pas reconnu d’ailleurs…

Majestueusement, comme seuls savent le faire les lions, il recula, fit demi-tour puis s’effaça et se fondit dans les hautes herbes, et le bruissement des feuilles qu’il effleura sur son passage durant sa retraite fut aussi tendre qu’un baiser. Je ne peux me résoudre à penser qu’il n’était que repu.

Je quittai mon poste peu de temps après cette expérience. À bord du Delphin of Sea je rejoignais Londres. Au banc d’Arguin, comme jadis la Méduse, nous échouâmes. Trois pieds sous l’eau… La débâcle ! Nez à nez avec un grand requin blanc ; je tente un dialogue ;

-J’ai pas choisi de venir investir votre milieu… C’est le capitaine qui a merdé… C’est comme si vous veniez sur terre invité à un barbecue… Vous êtes d’ailleurs le bienvenu !…J’ai une femme et trois enfants, des difficultés de fin de mois, mon gilet jaune en atteste… Pitié !

Je ne souhaite pas à mon pire ennemi – et cela tombe bien parce que je n’en ai pas - d’avoir pour dernière vision de son existence la denture étincelante d’un carcharodon carcharias.

Emmanuel Macron est peut-être d’une autre espèce que la nôtre… Sans pitié pour les retraités, les « ceux qui ne sont rien », les ceux qui ne savent pas, les ceux qui pensent savoir, les ceux qui voudraient être à sa place, les ceux qui sont jaloux de sa réussite, les ceux qui voudraient sans rien s’y connaître, avoir les acarnes du pouvoir.

Mais on ne peut douter d’entre les comportements de ces deux super prédateurs, lequel il choisira pour mener le pays aux réformes qui lui sont nécessaires.

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Dr Thierry Deregnaucourt, médecin généraliste Sailly-en-Ostrevent (62)