C’est une première dans le secteur d’activité des prestataires de santé à domicile (PSAD) : jamais un réseau national n’avait été placé en liquidation judiciaire. C’est désormais chose faite depuis jeudi 10 avril, avec la cessation d’activité du groupe Gaillard, grossiste en matériel médical, basé à Rousset, près d’Aix-en-Provence.
Prestataire de santé à domicile spécialisé notamment dans la location d’équipements (lits, matelas anti-escarres, fauteuils roulants, etc.) destinés au maintien à domicile, la société employait quelque 178 salariés, répartis dans 16 agences à travers la France. Ces équipes assuraient le suivi d’environ 9 000 patients, qui se retrouvent aujourd’hui sans accompagnement. « Une partie de ces patients vivent en Ehpad, ils demeurent donc suivis, mais la grande majorité d’entre eux résident à domicile. Pour eux, Il y a urgence à trouver de nouveaux prestataires », souligne Me Vincent de Carrière, mandataire judiciaire en charge de la liquidation, interrogé par Le Quotidien. « J’espérais pouvoir compter sur un acteur national capable de reprendre le matériel et les patients. Malheureusement, les discussions n’ont pas abouti », confie-t-il.
Patients en urgence
Avec un chiffre d’affaires de 28 millions d’euros pour 8 millions de pertes, peu de candidats se sont manifestés pour reprendre l’entreprise. « Je vais désormais m’atteler à identifier rapidement des acteurs locaux, poursuit-il. La nature même de cette activité impose d’agir vite. Nous ne sommes pas dans le commerce de détail. Le tribunal, seul habilité à trancher, en a bien conscience. » La nature ayant horreur du vide, les activités trouveront avec certitude un repreneur, pour l’euro symbolique, à la barre du tribunal de commerce, mais les patients en urgence n’ont pas le luxe d’attendre.
« À ma connaissance, il n’existe pas de mesure d’urgence prévue par le ministère de la Santé pour ce type de situation, d’autant plus qu’il s’agit de la première fois qu’un réseau d’une telle ampleur disparaît », commente Didier Daoulas, président de l’Union des prestataires de santé à domicile indépendants (Upsadi), l’un des deux syndicats professionnels du secteur. « Il faudrait pouvoir évaluer les risques : s’il s’agit d’un lit médicalisé, ils sont limités. En revanche, un matelas anti-escarres peut tomber en panne, ce qui pourrait entraîner une hospitalisation du patient concerné », précise-t-il.
« À ce stade, l'engagement des ex-salariés est exemplaire, salue le mandataire judiciaire Me Vincent de Carrière. À ce stade encore, leur salaire sera légalement maintenu pendant deux ou trois semaines. Sur la base du volontariat, tous ont, au lendemain de la liquidation, accepté d'être volontaires pour répondre au téléphone en cas d'appel des patients et réorienter vers un concurrent en cas de besoin. »
Une conséquence des baisses tarifaires ?
Pour le représentant patronal, cette défaillance illustre « concrètement les conséquences des baisses tarifaires imposées par les tutelles » au secteur des prestataires de santé à domicile, même s’il reconnaît ignorer les détails de la gestion du groupe Gaillard. « Disons qu’il n’existe pas un seul facteur explicatif, et que certains choix n’ont peut-être pas été judicieux », nuance le mandataire judiciaire.
Si la liquidation judiciaire constitue un cas extrême, elle concernait jusqu’ici des PME locales. Toutefois, le secteur semble évoluer dans un contexte tendu, puisque d’autres PSAD spécialisés dans le maintien à domicile ont rencontré des difficultés.
À l’automne, la société d’appareils médicaux ABM Pharma (Giphar), placée en procédure de conciliation, a été reprise, selon L’Informé, par Phoenix, également propriétaire du répartiteur OCP. Dans le même temps, Alcura — une filiale d’Alliance Healthcare affichant 60 millions d’euros de chiffre d’affaires — a été, d’après le média financier CFNEWS, rachetée par le fonds de retournement Mutares.
*Les services du ministère de la Santé n’avaient pas répondu à nos sollicitations au moment du bouclage de cet article.
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