Une petite révolution a eu lieu pendant la trêve des confiseurs sans qu'en soit faite une grande publicité ! Et pourtant… À la faveur d'un décret paru le 24 décembre au Journal Officiel, les médecins sont désormais autorisés à faire leur promotion. Mais attention, pas n'importe comment. Ce texte permet de modifier le code de déontologie médicale – l'Ordre doit se pencher sur le sujet lors d'une session en février – et assouplit en effet les règles applicables aux docteurs en matière d'information et de communication professionnelle.
Pressée ces derniers mois par l'Autorité de la concurrence et le Conseil d'État de revoir sa législation pour être en conformité avec le droit européen, la France a donc fini par lâcher du lest. L'interdiction depuis 1947 de « tous procédés directs ou indirects de publicité » est supprimée. La législation en la matière a également été assouplie avec des décrets spécifiques pour les chirurgiens-dentistes, pédicures podologues, infirmiers, sages-femmes et kinés.
Concrètement, qu'est-ce que cette évolution va changer ? Le médecin est dorénavant libre de communiquer au public, par tous les moyens, y compris sur un site Internet, « toutes les informations de nature à contribuer au libre choix du praticien par le patient ». Ils peuvent ainsi faire mention leurs compétences professionnelles, étaler leurs diplômes, détailler leurs pratiques ou vanter leur CV en n'omettant pas de mentionner leurs honoraires. Seule limite, cette communication doit être « loyale et honnête ». Tous les coups ne seront pas permis. Il est ainsi interdit aux médecins de se comparer à des confrères ou de demander à des patients de louer leurs mérites. De même ne sont-ils pas autorisés à acheter un référencement numérique pour apparaître en premier dans les résultats d'une recherche sur Internet.
Oui pour communiquer... mais avec prudence
Le décret du 24 décembre rappelle également les règles que les médecins doivent respecter lorsqu'ils participent à une « action d'information du public à caractère éducatif, scientifique ou sanitaire ». De même les médecins sont-ils priés de s'exprimer avec prudence et mesure, en respectant les obligations déontologiques, et se « garder de présenter comme des données acquises des hypothèses non encore confirmées » lorsqu'ils s'expriment sur les réseaux sociaux. À l'heure où les fake news se répandent comme une traînée de poudre, ils sont priés de ne « faire état que de données confirmées, faire preuve de prudence » et d'avoir « le souci des répercussions de leurs propos auprès du public ». Ils ne doivent pas chercher à « tirer profit de leurs interventions dans le cadre de leur activité professionnelle ». Des rappels de bonne conduite dont auraient pu (dû) s'inspirer de nombreux experts autoproclamés invités des plateaux télé ces derniers mois, invités à s'exprimer sur l'épidémie de coronavirus (relire notre dossier sur les médecins stars du petit écran).
Une évolution inéluctable
Avec la percée du numérique, la prise de rendez-vous en ligne, les avis Google et autres notations, – et la forte pression de l'Europe, donc – cette évolution réglementaire semblait inéluctable. Est-elle pour autant de nature à avoir un impact sur le marché médical ? Dans un contexte de pénurie de médecins, pas sûr. Et s'ils ont envie de faire de l'autopromo, ils seront toujours tenus de conserver une certaine réserve. On peut compter sur l'Ordre pour conserver un regard sourcilleux sur le bon respect des règles. En 2018, les chambres disciplinaires de première instance ont rendu 31 décisions dans des affaires concernant la publicité. Dix-sept l'ont été par la chambre disciplinaire nationale, dont 6 ont donné lieu à des sanctions, précise l'Ordre.
Pas de surrisque pendant la grossesse, mais un taux d’infertilité élevé pour les femmes médecins
54 % des médecins femmes ont été victimes de violences sexistes et sexuelles, selon une enquête de l’Ordre
Installation : quand un cabinet éphémère séduit les jeunes praticiens
À l’AP-HM, dans l’attente du procès d’un psychiatre accusé de viols