Le Brexit causerait des torts considérables au National Health Service (NHS), le système de santé public national du Royaume-Uni.
C'est du moins l'avis d'une équipe de recherche anglaise ayant réalisé une étude publiée ce mardi dans « The Lancet », qui prédit de graves répercussions sur les personnels en santé, l'accès aux médicaments et la prise en charge des patients.
À ce jour, l'avenir du Royaume-Uni est toujours incertain. L'île et l'Union européenne (UE) ont jusqu'au 29 mars minuit pour trouver un terrain d'entente favorable. Passée cette date, le Royaume-Uni quittera l'UE brutalement, sans accord. C'est ce qu'on appelle le no deal (ou Brexit dur).
En s'aidant de textes juridiques, les chercheurs ont analysé l'impact probable du Brexit sur les services de santé britanniques en l'absence d'accord ou, dans le cas contraire, avec un retrait négocié avec l'UE.
Sans surprise, le scénario du no deal reste de loin le plus néfaste pour les Britanniques même si, insistent les auteurs, « toutes les formes de Brexit sont mauvaises pour la santé ».
Vers un exode du corps médical ?
Les auteurs prédisent un risque de pénuries des personnels de santé qui se traduirait « par un exode des ressortissants de l'UE ou de l'espace économique européen (EEE) » dans ce secteur, expliquent-ils. Les carences en personnel de santé sont déjà bien ancrées dans certaines régions. « Certaines dépendent particulièrement du personnel de l'UE ou de l'EEE », ajoutent-ils. Selon le Conseil médical général (GMC), autorité comparable à l’Ordre national des médecins, 22 000 praticiens (sur 185 000 exerçant au Royaume-Uni, essentiellement dans le cadre du NHS), sont des citoyens de l’UE, soit 11,6 %.
Même constat du côté du recrutement en dehors de l'île. Les dispositions en vigueur pour reconnaître les diplômes et les qualifications professionnelles ainsi que les mécanismes d'alerte prévoyant l'échange d'informations sur les professionnels de santé soumis à une procédure disciplinaire ne s'appliqueront plus. Par ailleurs, en cas de Brexit dur, le livre blanc sur l'immigration publié en décembre dernier prévoit de donner la priorité sur le marché du travail aux personnes de l'UE ou de l'EEE qualifiées qui devront justifier d'un salaire minimum de 30 000 livres (34 000 euros) par an. Pour les auteurs, cette annonce pourrait « sérieusement limiter l'immigration de nombreux agents de santé en Grande-Bretagne », indiquent-ils.
Le NHS s'est déjà inquiété de cette mesure. « Des compétences élevées ne sont pas synonymes de salaires élevés, a déclaré Saffron Cordery, directrice générale adjointe du NHS Providers à la BBC. Le salaire initial des infirmières est de 23 000 livres [26 700 euros], celui des médecins juniors de 27 000 livres [31 400 euros] et celui des aides-soignants de 17 000 livres [19 800 euros]. »
Des pénuries de médicaments probables
Autre conséquence : l'accès aux médicaments et dispositif médicaux. En cas d'absence d'accord, le retour des barrières douanières pourrait perturber « immédiatement et drastiquement » les chaînes d'approvisionnements en médicaments, vaccins, matériels et équipements médicaux. « Le gouvernement cherche à rassurer les patients sur le fait que ses plans d'urgences avec l'industrie pharmaceutique sont robustes mais des pénuries sont probables en raison des dispositions en matière de stockage qui ne peuvent durer que quelques semaines [...], estiment les auteurs. Certains produits tels que les radio-isotopes ne peuvent pas être stockés. »
Parmi les autres problèmes qui risquent de se poser, existe celui des accords sur les soins et la prise en charge des patients. L'étude suggère qu'en cas d'absence d'accord, le régime européen d'assurance-maladie (carte CEAM), permettant à un ressortissant de l'UE de bénéficier de soins dans un pays membre dans les mêmes conditions (modalités, tarifs) que pour les assurés du pays de séjour ne serait plus valide. Les ressortissants de l'UE devraient dans ce cas se munir d'une assurance santé. Les coopérations transfrontalières seraient aussi affectées. Un Brexit sans compromis impliquerait une fin brutale du partage d'informations et de collaboration. Les domaines tels que la surveillance épidémiologique de maladies, la sécurité sanitaire des produits pharmaceutiques et des dispositifs médicaux mais aussi la recherche et les essais cliniques transfrontaliers pourraient en faire les frais.
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