Si l’AME venait à disparaître, « cela poserait un vrai problème de santé publique », alerte le Dr Luc Duquesnel, président des Généralistes-CSMF. Pour le médecin mayennais, restreindre l'accès aux soins des plus précaires participerait à « faire ressurgir certaines maladies comme la tuberculose ». La réduction du panier de soins signifierait que les patients consulteraient « uniquement dans des cas extrêmes, à des stades beaucoup plus avancés de la maladie, ce qui serait plus coûteux quand ils arriveraient à l’hôpital ».
Un avis partagé par la Dr Agnès Giannotti, présidente de MG France, persuadée que les patients « arriveraient à l’hôpital dans un état de santé dégradé et coûteraient encore plus cher » à la Sécu. Si la réforme était adoptée, cela serait même « contre-productif en termes de santé publique », estime la généraliste qui se demande « comment on aurait géré l’épidémie de Covid si on n’avait pas eu l’AME ». Éloigner durablement les patients précaires du système de santé aboutirait à l’aggravation de leurs pathologies. « Il vaut mieux prendre une appendicite qu’une péritonite, faire une consultation de contraception plutôt que de se retrouver avec une grossesse non désirée ou une IVG. Tout est comme ça en médecine », cadre la présidente de MG France. D’autant plus que, contrairement aux idées reçues, ces personnes « ne se précipitent pas vers le soin ».
Guillaume Bailly, président des internes de l'Isni rappelle lui aussi que « prévenir coûte moins cher que guérir ». Et de citer l’exemple d’un « antidiabétique oral qui coûte environ cinq euros par mois à la Sécu, soit 900 euros pour 15 ans. Par contre, une action sur un AVC, en raison d’un diabète non traité, coûte 3 000 euros ». L’interne parisien rappelle la raison d’être de l’AME, « prendre en charge les affections contagieuses, détecter au plus précoce et limiter les risques infectieux sur notre territoire. »
Si l’AME était supprimée, abonde le Dr Jérôme Marty, président de l’UFML-S, on assisterait à « la propagation des maladies évolutives car ces populations sont atteintes de pathologies chroniques et infectieuses qui seraient prises en charge beaucoup plus tard ». Fervent défenseur de cette prestation sociale, le généraliste de Fronton estime même que ce dispositif est « l’ADN même de notre engagement », « soigner tout le monde, quelle que soit son origine, sa couleur de peau ou son niveau social ».
Des valeurs partagées à l'hôpital par le Pr Rémi Salomon, pour qui cette réforme « n’a pas de sens au plan éthique ». Pour le patron de la conférence nationale des présidents de CME de CHU, ce serait aussi « une aberration sanitaire et économique », avec un afflux de personnes « aux urgences et devant être hospitalisées, dans un contexte où l’hôpital a déjà des difficultés pour trouver des lits ».
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