Le Plan pour l’égal accès aux soins dans tous les territoires devait montrer un signal fort aux professionnels de santé, en quête d’un retour de confiance avec Ségur. Avec des investissements importants pour l’installation, le développement de la télémédecine ou encore l’exercice mixte, la profession a l’impression d’avoir été écoutée, même si certains axes sont encore imparfaits, selon certains syndicats.
Les représentants professionnels se réjouissent notamment de l’absence de mesures coercitives : « Le gouvernement semble avoir compris qu’elles ne sont pas une bonne solution pour favoriser l’installation en zones sous-denses », se félicite la CSMF. « Le gouvernement a compris que les projets de regroupement devaient être portés par les médecins et que la coercition est contre-productive », ajoute la FMF.
Initiatives de terrain
L’un des volets phares du plan désert est d’ailleurs la valorisation des actions de terrain pour lutter contre la désertification. « Les médecins généralistes sont dès aujourd’hui à l’initiative de projets d’organisation les plus innovants car ils s’appuient sur leurs expériences de soignants et sur leur connaissance des réalités locales », constate Claude Leicher, président de MG France. Chez les jeunes du syndicat Reagjir aussi, on se réjouit de ce mode de fonctionnement : « Laisser aux territoires la liberté d’expérimenter des solutions et créer un fonds d’innovation dédié nous semble être une bonne décision », affirme Yannick Schmitt, vice-président.
Sur la formation, le développement des stages ambulatoires ne fait désormais plus partie des vœux pieux émis par les professionnels de santé. « La généralisation des stages en milieu libéral pour les futurs médecins est une attente forte pour permettre de déshospitaliser la formation initiale et permettre une découverte de l’exercice libéral », salue le SML de Philippe Vermesch. Le Syndicat national des enseignants de médecine générale (SNEMG) est pour sa part plus critique vis-à-vis des avancées promises par le gouvernement en la matière. Si les objectifs fixés vont selon eux « dans le bon sens », « ce plan ne prend pas la mesure des besoins nécessaires à l’ouverture des lieux de stage ambulatoires de médecine générale », regrette le président Anas Taha.
Le SNEMG rappelle notamment que le SASPAS (Stage ambulatoire en soins primaires en autonomie supervisée), prévu dans la réforme du 3e cycle, va déjà permettre l’ouverture de 800 postes supplémentaires en médecine générale, soit beaucoup plus que les 350 lieux de stage promis par le plan désert et que l’augmentation de la rémunération des MSU de 50 %, également inscrite dans le plan, est dans les faits déjà incluse dans la convention médicale.
Des déceptions toutefois
Le président de la FMF Jean-Paul Hamon déplore, quant à lui, que le plan ne précise pas quelles seront les mesures d’incitation concrètes pour encourager les jeunes médecins à découvrir la médecine de ville. « Le gouvernement ne dit rien sur les incitations, rien sur le doublement de salaire qui a marché en Corse, rien sur la prise en charge du logement qui a marché en Creuse ou a Belle-Île-en-Mer ». Sur le doublement des MSP prévu par Matigon, là encore le scepticisme plane. « Le gouvernement annonce 400 millions d’euros pour les MSP, mais combien pour les médecins déjà regroupés qui assurent une continuité des soins et une coordination sur un territoire ? », s’interroge le président de la FMF. La CSMF aussi « regrette que ces aides se concentrent principalement sur les maisons de santé » et « refuse l’instauration d’un modèle unique. Toutes les formes de regroupement doivent être encouragées et facilitées », prône le président Jean-Paul Ortiz.
Afin de soutenir les initiatives nouvelles émanant des territoires et assurer la liaison entre le gouvernement et les acteurs de terrain, Élisabeth Doineau, sénatrice (RI) de la Mayenne, le Dr Thomas Mesnier, député (LREM) de la Charente et le Dr Sophie Augros, qui se met en indisponibilité de ses fonctions de présidente du syndicat Reagjir (voir encadré), ont été missionnés pour assurer le suivi et l’évaluation du Plan.
Sophie Augros*
Ce plan va encore être amené à évoluer
Quel sera votre rôle au sein du comité d'évaluation du plan déserts ?Sophie Augros Avec le député Thomas Mesnier et la sénatrice Élisabeth Doineau, notre objectif sera de faire remonter des actions du terrain. Les ARS nous donneront les pistes à explorer et nous devrons voir ce qui marche comme expérimentations locales, évaluer si elles fonctionnent, voir s'il y a des blocages juridiques et administratifs et dans ce cas-là les faire remonter au ministère pour voir si leurs services, la CNAMTS ou d'autres structures peuvent aider à lever ces blocages.
Avez-vous déjà des idées d'initiatives de terrains qui mériteraient d'être étendues ?
S. A. Dans le plan, il y a des choses qui ont déjà été mises en place. Les guichets uniques en Normandie avec le GUIPS, que les internes et les jeunes médecins demandent depuis des années mais qui tarde à se mettre en place, les postes d'assistants partagés hospitaliers et libéraux qui se font déjà en Charente-Maritime. Ce sont des exemples qui me viennent tout de suite à l'esprit. Le plan va donc être amené à évoluer. Grâce à nos remontées, il pourra y avoir certaines adaptations pour que cela réponde effectivement aux besoins du terrain.
En tant qu’ancienne présidente de Reagjir et jeune médecin, que pensez-vous des axes de ce plan ?
S. A. Il n'y a aucune mesure coercitive et c'est important. Tout comme le fait que cela parte des actions du terrain et non de décisions nationales. Le plan reprend beaucoup de choses que je défendais au sein du Syndicat, comme la protection sociale des remplaçants, favoriser l'exercice mixte, aider à faire de la formation le plus tôt possible dans tous les territoires, revoir le zonage. Je suis globalement plutôt optimiste. Je trouve cependant dommage que les postes d'assistants partagés soient cantonnés entre la ville et l'hôpital alors qu'on peut aussi faire de l'exercice mixte seulement en ville dans des structures de soins comme les PMI ou les maisons d'accueil spécialisées.
* Généraliste et chargée de la mission d'évaluation du plan, ex-présidente du syndicat Reagjir.
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