« LA PRÉVENTION reste le parent pauvre du système de santé. La France est un pays où les disparités en matière de santé restent très fortes selon le sexe et la catégorie professionnelle. Alors, quelle politique mener pour inciter les citoyens à être acteurs de leur santé ? », s’interroge Patricia Schillinger, sénatrice du Haut-Rhin, en préambule du débat organisé par la Fondation Pileje le 19 septembre dernier.
Une promesse qui peut échouer.
Le Pr Jean-Michel Lecerf, chef du service nutrition de l’Institut Pasteur à Lille renchérit : « Difficile de faire passer des messages aux patients. La prévention reste une promesse qui peut échouer ! ». D’ailleurs, nous sommes inégaux face à la santé pour des raisons génétiques, économiques, culturelles, familiales et sociales. Les études s’empilent en faveur de la prévention. L’activité physique réduit de 35 % le risque de cancer du côlon et de 65 % le risque de diabète chez un sujet à risque. Le lien est prouvé entre la consommation d’alcool et la survenue d’un cancer de l’œsophage, de la bouche, et même du sein.
La nutrition joue un rôle dans de nombreuses maladies comme le diabète, le cancer l’ostéoporose et l’obésité. Seulement, poursuit le nutritionniste, « c’est compliqué de changer ses habitudes alimentaires. Cela correspond à des besoins nutritifs, mais aussi affectifs, hédoniques et relationnels ». Hélène Thibault, pédiatre au CHU de Bordeaux, rappelle que l’obésité dans l’enfance augmente le risque de mortalité précoce et de morbidité. En Aquitaine, elle constate les bienfaits de l’activité physique en milieu scolaire, mais dans le cabinet médical, la situation se corse. Difficile pour le médecin de détecter le moment où un enfant qui se porte bien bascule dans le surpoids. Et de l’aider !
Écouter le patient.
« Il faut pouvoir parler de la prévention de façon positive, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui », affirme le Pr Lecerf. Pour évoquer les habitudes de vie de ses patients dans une relation de confiance, le médecin généraliste se situe en première ligne. En 2010, 85 % des Français l’ont vu au moins une fois dans l’année. Il reste encore des omnipraticiens partout en France, mais la menace d’une désertification médicale est là. La tendance porte sur le regroupement, choisi par 77 % des généralistes de moins de 40 ans. Le transfert de compétences des médecins vers les professions paramédicales peut être une solution pour assurer un travail de prévention auprès des patients. Une façon aussi d’éviter la consultation médicale longue, encore mal rémunérée.
Le Pr Jean-Luc Harousseau, président de la Haute autorité de Santé (HAS), a piloté en avril 2011 un travail sur les facteurs qui empêchent le médecin de promouvoir des outils de prévention thérapeutique non médicamenteux dans le cadre, notamment, des maladies cardio-vasculaires. Elle révèle un obstacle social et culturel de taille : le patient a besoin d’une ordonnance dûment remplie pour avoir l’impression que son médecin s’est occupé de lui, et celui-ci n’est pas à l’aise avec la prévention thérapeutique non médicamenteuse. Le rapport de l’HAS propose la prescription de conseils diététiques et d’hygiène de vie validés sur les ordonnances.
Mais reste un problème de fond pour soutenir la prévention : les médecins sont mal formés au repérage d’un état qui n’est ni la pathologie, ni la bonne santé.
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