QUAND IL S’AGIT de cancer du poumon, la nicotine est un poison à double détente. Bien sûr, elle crée une dépendance qui incite à la consommation. Mais, en plus, elle favorise l’expression de ses propres récepteurs, lesquels majorent la prolifération cellulaire et inhibent l’apoptose. D’excellentes conditions pour la survenue de la tumeur. Ce dernier point a été mis en évidence par une équipe franco-italienne (dont le CEA, Gif-sur-Yvette).
Pourtant ce constat n’est pas l’ultime recherche de Patrizia Russo et coll. L’équipe vient, en effet, de tester un inhibiteur des récepteurs cholinergiques à la nicotine (nAChRs) dans le traitement du cancer pulmonaire. Avec de bons résultats. Les auteurs soupçonnaient déjà l’activité anticancéreuse de cet antagoniste, baptisé ?-CbT, pour d-tubocurarine/?-Cobratoxine. Il vise tout particulièrement la sous-unité ?7 des récepteurs nAChRs.
Survie 1,7 et 2,1 fois plus longue.
Pour confirmer cette efficacité, les chercheurs ont greffé à des souris des cellules de cancer bronchopulmonaire non à petites cellules. Les rongeurs ont été séparés en trois groupes. L’un à titre de témoin, un autre recevait du cisplatine, le dernier l’?-Cobratoxine. Les durées de survie, par rapport aux témoins, ont été prolongées de 16 % sous la chimiothérapie. Mais celles ayant reçu l’?-CbT ont eu une survie 1,7 et 2,1 fois plus longue que, respectivement, celles sous cisplatine et les témoins. Selon les auteurs, cette efficacité antitumorale est à mettre au compte d’une stimulation de l’apoptose, la prolongation des survies serait aussi en rapport avec une activité antiproliférative et antiangiogénique.
Une bonne surprise est aussi arrivée de l’étude des cellules saines. Le traitement par ?-Cobratoxine n’a pas freiné leur prolifération, ce qui laisse présager une quasi-absence d’effet toxique. En revanche, les cellules tumorales, riches en récepteurs nicotiniques, ont été les plus sensibles. Bien sûr, l’espoir de l’équipe franco-italienne est de passer au stade de l’expérimentation clinique. D’autant que l’?-CbT semble conserver son efficacité quel que soit le type de cancer pulmonaire, à petites cellules ou non.
Dans un éditorial, E. R. Spindel (Beaverton, Oregon) se déclare frappé par le potentiel de la molécule testée. Elle inhibe le pouvoir métastatique de la tumeur, en faisant dès lors un éventuel traitement adjuvant. Il ajoute que l’?-CbT a fait décroître le taux de fibronectine des cellules cancéreuses, connue pour favoriser la prolifération cellulaire liée à la nicotine. Enfin, l’action de l’un des carcinogènes de la fumée de cigarette, le NKK, est également bloquée. Il conclut : « il est également important de considérer que bien que la nicotine et les récepteurs nicotiniques soient dorénavant clairement liés au cancer pulmonaire, le traitement de substitution, utilisé dans le sevrage tabagique, apparaît plus sûr que la poursuite du tabagisme ».
American Journal of Respiratory and Critical Care Medicine,15 juin 2009.
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