« Vingt ans : c’est en moyenne l’espérance de vie perdue par les sujets ayant une dépendance à l’alcool », a rappelé le Pr Pascal Perney. « Les malades d’alcool ont un aspect physique fatigué, des compétences réduites lors des tests cognitifs et, à l’IRM, une atrophie cortico-sous-corticale, toutefois réversible, visible dès l’âge de 40 ans. »
Les conséquences délétères à court terme concernent toutes les sphères de la vie quotidienne, familiale, professionnelle, sociale. L’alcool est à l’origine de 60 % des noyades et des brûlures, et se trouve impliqué dans 40 % des suicides et des accidents mortels. À long terme, il est la cause directe de plus de 60 maladies et contribue au développement de quelque 200 affections.
Identifier les coaddictions
La consommation excessive d’alcool est souvent associée à d’autres addictions : tabagisme dans 90 % des cas, cannabis dans 20 % des cas.
Ces chiffres soulignent l’importance du dépistage systématique de l’abus et de la dépendance à l’alcool et ce, dès le plus jeune âge.
Le médecin généraliste est en première ligne. La consommation d’alcool est évaluée en « verres standard » ; elle est considérée comme excessive si elle est› 21 verres/semaine chez l’homme et› 14 verres/semaine chez la femme, ou en cas de consommation de plus de 5 verres en moins de 2 heures lors d’une seule occasion.
« Plus un sujet boit une grande quantité d’alcool en un laps de temps court, plus il est à risque de comportement violent et de dépendance », a souligné le Pr Perney.
Le médecin généraliste, légitime pour parler d’alcool
Le repérage d’une consommation à risque devrait idéalement être effectué une fois par an. Les patients n’en parlent pas spontanément à leur médecin (7 % des cas seulement), mais les enquêtes montrent qu’ils le considèrent comme légitime pour parler d’alcool. Les conseils donnés par les médecins sont volontiers acceptés et les patients déclarent bien souvent être soulagés que ce problème ait été abordé en consultation.
L’Audit-C est un questionnaire très utile pour détecter rapidement les sujets à risque de dépendance à l’alcool. Il comporte trois questions : nombre de fois par mois ou semaine où le sujet consomme de l’alcool ; nombre de verres absorbés les jours où il boit ; nombre de fois par mois ou semaine où le sujet boit plus de 6 verres standard en une occasion. Il peut être pratiqué très simplement et rapidement en consultation.
Le simple fait d’aborder le sujet en consultation permet déjà à certains patients de prendre conscience du caractère excessif de leur consommation et les pousse parfois à la réduire. Une intervention motivationnelle – analyse des préoccupations du patient, inquiétudes sur son état de santé et son lien avec l’alcool… – est réalisée par le médecin généraliste.
Réduire la consommation, un objectif reconnu
La prise en charge peut se fonder sur la réduction de la consommation ou sur le sevrage total. La réduction est aujourd’hui un objectif reconnu. En effet, il est établi que la relation entre le risque de décès et la consommation suit une courbe quasi exponentielle. Et, chez un gros buveur, passer de 12 à 8 verres par jour aura un impact très marqué sur le risque de décès.
Si l’abstinence reste l’objectif idéal à long terme, le choix entre réduction et arrêt total doit se faire selon les préférences du patient. Les études montrent que la moitié d’entre eux optent pour une réduction et l’autre moitié pour une abstinence.
Le patient doit être soutenu par le médecin avec, par exemple, la tenue d’un agenda de consommation, la valorisation des réussites et des petits succès, la recherche de stratégies concrètes pour résoudre les difficultés…
Si cela ne suffit pas à aider le patient à réduire sa consommation pendant une quinzaine de jours, un médicament d’appoint peut être proposé : nalméfène en première intention, baclofène en deuxième intention, en respectant la posologie, les modalités d’administration et les contre-indications.
Si l’objectif fixé est l’abstinence, un médicament d’aide au maintien de cette dernière est prescrit dès l’obtention du sevrage : acamprosate ou naltrexone en première intention ; baclofène ou disulfirame en deuxième intention, là encore en respectant les modalités d’utilisation.
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