LES CHIFFRES sont sans appel. Malgré les trois plans nationaux de lutte contre la douleur qui se sont succédé en France de 1998 à 2010, la prise en charge de la douleur chronique – qui se définit par sa persistance, au-delà de trois à six mois – n’est aujourd’hui encore pas suffisante. En France, la douleur constitue l’un des premiers motifs de consultation, et c’est l’une des priorités de santé pour 54 % des habitants. Le rapport Pain Proposal, publié en octobre 2010 avec le soutien du Laboratoire Pfizer, indique également que la douleur chronique touche 1 adulte sur 5 dans l’hexagone, un chiffre similaire à celui de l’ensemble de l’Europe. En outre, 62 % des patients interrogés estiment que leur situation professionnelle est directement affectée par cette maladie, 24 % des personnes concernées sont incapables de travailler en raison de celle-ci et environ un tiers d’entre elles pensent qu’elle a un impact négatif sur la famille et les amis.
Tous concernés.
La France, avec les trois plans nationaux, ou encore avec la loi de 2002 relative aux droits des malades et à la qualité des soins, qui reconnaît le soulagement de la douleur comme un droit fondamental des personnes, a certes fait des progrès dans cette lutte, mais des efforts restent à faire. « C’est un problème de société, nous sommes tous concernés », a ainsi rappelé le Pr Alain Serrie (Médecine de la douleur et médecine palliative, CHU Lariboisière, Paris), déplorant le fait que l’on ait au départ considéré qu’il s’agissait d’un problème de santé publique et non pas d’un problème sociétal. « La douleur chronique, dont les causes peuvent être multiples (maladie, accident, opération, examen ou soin, grossesse…) a évidemment des répercussions socio-économiques importantes, souligne-t-il : en France, 19,9 % des personnes interrogées indiquent avoir des douleurs modérées à intenses, et une sur deux de cette proportion est en situation de productivité ». Quelque 7,5 millions de personnes sont donc concernées, un chiffre qui a un coût, tant moral, pour les personnes atteintes et pour leur entourage, que financier. C’est pourquoi le Haut Conseil de la santé publique a publié un bilan mitigé du 3e plan douleur (2006-2010) et a émis au mois de mai des recommandations pour un 4e plan national, parmi lesquelles : mieux impliquer la médecine de ville dans la prise en charge, mieux former et informer, sensibiliser les professionnels de santé ou encore prêter davantage attention aux personnes fragiles. « Les "oubliés" de la douleur – personnes vulnérables, handicapées, malades psychiatriques ou encore personnes âgées – restent trop nombreux », rappelle Alain Serrie.
Des défis de taille.
Évoqués très précisément par les intervenants réunis lors de ce colloque, la formation des soignants, le diagnostic, la prise en charge et l’orientation des patients demeurent donc à améliorer… Des patients, qui, par le biais d’associations, participent également au perfectionnement du soin et à l’information du public. Martine Chauvin, présidente de l’Association francophone pour vaincre les douleurs (AFVD), est ainsi revenue sur « l’importance du vécu » dans ce débat : « Le savoir médical est incontournable, et en l’associant avec le vécu du patient, la consultation est bien plus complète et la prise en charge de la douleur bien meilleure. » Également représentée lors de ce colloque, la Société française d’étude et de traitement de la douleur (SFETD), dont le président, le Dr Michel Lantéri-Minet, a notamment rappelé que « l’amélioration de la prise en charge de la douleur ne pourra se faire que s’il existe une réelle volonté politique ». Un souhait qui ne restera peut-être pas un vœu pieux. Pour conclure, le Pr Alain Serrie a en effet évoqué la future mise en place d’un Programme national – plutôt qu’un 4e Plan – qui aura notamment pour objectif de « sortir de l’hospitalocentrisme, de s’occuper davantage des sujets âgés et des personnes vulnérables, de mettre l’accent sur la formation ou encore d’insister sur la création de postes ». Un programme qui pourrait être annoncé dans les mois à venir.
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