CE N’EST qu’en 2010 que fut menée, par l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies, la première enquête épidémiologique sur le jeu pathologique en France : la prévalence globale des troubles liés à la pratique des jeux d’argent et de hasard est de 1,3 %. « En pratique, le diagnostic est posé chez les sujets répondant aux critères du DSM-IV. Mais pour repérer rapidement un problème de jeu, le questionnaire à deux items " lie and bet " constitue un bon outil de dépistage. " Avez-vous déjà menti à votre famille ou à vos amis à propos de l’argent que vous avez dépensé en jouant ? ". " Avez-vous déjà ressenti le besoin de miser toujours plus d’argent ? ". Une réponse positive suffit à évoquer des problèmes de jeu », précise le Dr Marie Bronnec.
Le joueur consulte souvent par le biais de comorbidités, qui sont nombreuses. Chez ces joueurs pathologiques, il est important de bien repérer la chronologie des troubles : addictions comportementales notamment aux jeux vidéo durant l’adolescence, puis bascule sur le jeu pathologique ; conduite addictive qui peut précéder, coexister ou succéder au jeu pathologique (transfert d’addiction) ; consommation concomitante d’alcool, de tabac ou de cocaïne pour se stimuler, troubles anxiodépressifs. Ces sujets ont aussi souvent des troubles de la personnalité, majoritairement du cluster B.
L’évaluation globale des facteurs de risque (sexe masculin, impulsivité, antécédents familiaux, altération des processus de régulation et d’autocontrôle) et de vulnérabilité est essentielle pour la prise en charge. « Dans le service, nous avons une approche très centrée sur la psychothérapie. Nous proposons notamment des séances de groupe de TCC avec, au préalable, un travail motivationnel, puis le développement d’alternatives aux comportements de jeu et la correction des pensées erronées. Il n’y a pas actuellement de traitement médicamenteux spécifique, mais nous pouvons être amenés à traiter les comorbidités thymiques et anxieuses (antidépresseur, thymorégulateur). Chez les patients ayant aussi une dépendance à l’alcool, l’hospitalisation permet un sevrage global et leur offre l’occasion de faire l’expérience de l’arrêt des conduites addictives, explique le Dr Bronnec. Dans tous les cas, une prise en charge sociale, très spécifique du jeu pathologique, s’impose. Il s’agit souvent de patients ayant des dettes, dont le conjoint menace de partir, et il faut prendre rapidement des mesures très pragmatiques, qui vont du simple fait de laisser la carte bancaire et le chéquier au conjoint à la curatelle renforcée, en passant par l’inscription (à la demande du patient) sur le fichier national bloquant l’accès aux sites de jeux en ligne français et aux casinos. »
D’après un entretien avec le Dr Marie Bronnec, présidente du Réseau national pour la prévention et le soin du jeu pathologique, service d’addictologie et CRJE, CHU, Nantes.
Pour aider les cliniciens, un annuaire des structures de soins spécialisées, hospitalières et ambulatoires est disponible sur le site du Centre de référence sur le jeu excessif (www.crje.fr).
Pour en savoir plus : ouvrage « le Jeu pathologique: comprendre, prévenir traiter », éditions Elsevier-Masson.
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