Après une année 2020 marquée par une baisse du nombre de prises en charge de malades, les centres de lutte contre le cancer rattrapent leur retard. « Nous sommes en train d’en sortir, après des retards de prise en charge préjudiciables pour le malade en termes de guérison », a indiqué mardi devant la presse le Pr Jean-Yves Blay, président d’Unicancer qui regroupe les vingt centres régionaux de lutte contre le cancer, comme l’Institut Curie, Gustave Roussy ou Bergonié.
Après avoir enregistré une baisse d’activité de 4 % entre 2019 et 2020, ces centres attestent d’une progression de 6 % en 2021, « avec notamment une forte augmentation de l’activité ambulatoire », note Sophie Beaupère, déléguée générale d’Unicancer. Toutefois, à l'instar des établissements publics, ces centres privés à but non lucratif souffrent du manque d’attractivité des carrières médicales. Unicancer entend donc, comme d’autres, porter sa voix auprès des candidats à l’élection présidentielle en lançant sa plateforme regroupant une cinquantaine de propositions. Un site participatif, où tous les médecins pourront formuler des idées concrètes pour faire avancer la lutte contre le cancer.
Attractivité et revalorisation
« L’urgence c’est de rendre les parcours des professionnels de santé plus attractifs », avance Sophie Beaupère. Car le secteur de la cancérologie souffre de fortes tensions en radiologie, radiothérapie, anesthésie et médecine nucléaire. « Les enjeux de démographie médicale et de fidélisation des professionnels sont primordiaux pour maintenir l’excellence des prises en charge », souligne Unicancer. Et, malgré un Ségur de la santé « marqueur de progrès majeurs pour les rémunérations », selon Sophie Beaupère, les mesures n’ont été que partiellement financées dans le privé non lucratif, obligé de mettre la main à la poche pour s’aligner sur ces revalorisations. « Il est impératif d’assurer une parfaite équité de traitement entre tous les professionnels de santé, quel que soit le statut de leur établissement », dit Unicancer. La fédération demandera notamment aux candidats de revaloriser l’indemnité de service public exclusif pour les praticiens des établissements de santé.
Pour fidéliser les soignants et rendre les carrières plus attractives, les centres de lutte contre le cancer veulent aussi parier sur le travail aidé. « Il faut poursuivre le développement des infirmières en pratiques avancées et développer cette pratique pour d’autres professions comme les manipulateurs radio », détaille Sophie Beaupère.
30 % de recrutement d'ici 10 ans
Pour les médecins, Unicancer souhaite favoriser « l’hybridation des carrières dans le domaine de la recherche notamment » tout en améliorant les conditions de travail. En ligne de mire : « la réduction des tâches administratives pour prioriser le cœur de métier des médecins », le développement du télétravail mais aussi « la création d’un statut spécifique de praticien pouvant bénéficier d’un temps dédié aux activités de recherche et publications scientifiques ».
Les centres de lutte contre le cancer sont en effet le premier promoteur d’essais cliniques en Europe, en termes de nouveaux patients inclus chaque année. En 2021, 100 études ont été ouvertes dans ces établissements, recrutant 8 000 patients. 14 % des malades suivis dans ces centres participent également à des essais cliniques, dans la moitié des cas des études de phase précoce. « Les jeunes médecins sont le futur de la recherche en cancérologie », s’enthousiasme le Pr Jean-Yves Blay, qui demande aux candidats « d’ouvrir grand les portes des universités de médecine ». Avec le vieillissement de la population et l'augmentation de l'incidence des tumeurs, le président d'Unicancer estime qu'il faudrait recruter 30 % de médecins supplémentaires dans ces centres d'ici 10 ans.
Prévention à la ramasse
Alors que 40 % des cancers en France sont évitables, Unicancer souhaiterait aussi que le prochain président de la République mette le paquet sur la prévention. La fédération souligne ainsi, comme tant d’autres, « la faiblesse historique de la culture de santé publique dans notre pays » et le besoin impérieux de structurer une dynamique de prévention ambitieuse. Unicancer propose ainsi de mettre sur pied des centres de prévention du cancer, à proximité des établissements de santé. Plusieurs pistes sont évoquées, comme le développement du dépistage des facteurs environnementaux du cancer. Ces centres oncologiques souhaiteraient également devenir des centres de dépistage à part entière.
Dans cette optique, Unicancer souhaite alerter sur certains tests génétiques qui ne sont pas compléments remboursés en France. « Cela crée une inégalité de traitement sur le territoire », regrette le Pr Blay. Unicancer réclame ainsi de « réviser le financement des actes de diagnostic moléculaire et de génétique constitutionnelle pour ne pas limiter leur accès ».
Les participants ont jusqu’à la mi-mars pour formuler leurs propositions – et voter - dans la boîte à idées mise en ligne par Unicancer.
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