On manque de données sur l’incidence du mésothéliome au niveau mondial, données qui permettent de guider les politiques de santé. Une vaste analyse a donc été menée pour évaluer son incidence nette et standardisée sur l’âge, la distribution épidémiologique ainsi que les évolutions en fonction de la zone géographique, du niveau socioéconomique, de l’âge et du sexe (1). Ce travail est basé sur la base de données Global Burden Disease rassemblant 195 pays. Les résultats mettent en évidence que le nombre de cas et décès annuels n’a cessé d’augmenter depuis 1990 (de 1990 à 2017) au niveau mondial. Le phénomène est particulièrement marqué dans les pays dans lesquels l’usage de l’amiante n’a pas encore été totalement banni. Néanmoins, après standardisation sur l’âge, on constate un léger recul de l’incidence standardisée, associé à de très grandes disparités.
Des sujets de plus en plus âgés
Au total, près de 35 000 cas de mésothéliomes et 30 000 décès ont été recensés en 2017 dans les 195 pays participants à la base de données. Par comparaison, en 1990, on avait dénombré un peu plus de 21 000 cas et 17 000 décès. Les cas incidents et décès ont donc nettement augmenté. Cette progression est restreinte aux plus de 50 ans. Les hommes sont toujours les plus affectés, ils représentent 70 % des cas.
La proportion de mésothéliomes survenant chez des sujets de plus de 70 ans a augmenté, ils représentent désormais près de 45 % des cas, contre 36 % en 1990.
Dans le même temps, la proportion de mésothéliomes survenant avant l’âge de 50 ans a un peu reculé. Les moins de 50 ans représentent aujourd’hui 14 % des cas, contre 17 % en 1990. Fait notable, plus de 50 % des cas surviennent dans des régions de niveau socioéconomique élevé.
Alors que l’incidence brute des cas et décès a augmenté, une fois ces incidences standardisées sur l’âge – la population n’étant pas la même en 2017 et 1990 – on constate un léger recul de l’incidence annuelle standardisée des cas et décès au niveau mondial. Entre 1990 et 2017, on est passé d’une incidence standardisée de 0,52 [0,43-0,62] à 0,44 [0,42-0,45] pour 100 000 personnes. Cela très probablement en lien avec le vieillissement de la population.
Il y a toutefois d’importantes disparités. En particulier, les incidences standardisées sont systématiquement bien plus élevées dans les régions à haut niveau socioéconomique. En 2017, l’incidence standardisée est globalement de 0,85/100 000 dans les régions à niveau socioéconomique élevé, versus 0,22/100 000 dans celles à bas niveau socioéconomique ; les pays/régions ayant été répartis en cinq niveaux socioéconomiques. La région d’Europe de l’Ouest est celle où l’incidence standardisée a le plus progressé.
Délai important entre bannissement de l’amiante et décroissance de l’incidence
L’évolution de l’incidence dans les 47 pays ayant mis l’amiante complètement au ban confirme qu’il faut attendre 20 ans avant de commencer à voir un effet sur les cas de mésothéliomes. Tout de suite après la suppression de l’amiante, on a souvent une légère augmentation d’incidence suivie d’une décroissance lente. Pour exemple, en Australie, où l’amiante a été interdit en 2002, l’incidence est d’abord montée de 2,31 en 2002 à 2,43 en 2008, avant d’amorcer un recul. Alors que, entre 1990 et 2017, l’incidence annuelle standardisée a reculé de 1,04 à 0,66 au Royaume Uni et de 2,78 à 2,52 en Irlande. Néanmoins, passé cet éventuel rebond, tous les pays ayant mis l’amiante au ban ont vu l’incidence standardisée des mésothéliomes reculer.
Nécessité d’élargir l’exclusion de l’amiante
Cette étude illustre combien les cas de mésothéliomes restent nombreux et progressent en termes de cas bruts, sans doute en rapport avec le vieillissement et l’accroissement des populations. Elle confirme aussi l’impact du bannissement de l’amiante dans les pays qui l’ont mis en œuvre. C’est pourquoi un élargissement de l’exclusion de l’amiante aux pays comme le Brésil, l’Inde, la Russie ou la Chine, qui continuent à l’utiliser largement, est extrêmement souhaitable, sous peine de voir les cas flamber dans les prochaines années.
(1) Z Zhai et al. Assessment of Global Trends in the Diagnosis of Mesothelioma From 1990 to 2017 ; JAMA Netw Open. 2021 ;4(8):e2120360. doi :10.1001/jamanetworkopen.2021.20360
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