La radiothérapie pourrait-elle permettre de dépasser la résistance à l’immunothérapie ? C’est ce que suggèrent des chercheurs de l’université Johns-Hopkins (Baltimore) en collaboration avec une équipe néerlandaise dans une étude menée chez 72 patients ayant un cancer du poumon non à petites cellules métastatique.
La radio-immunothérapie a induit une réponse antitumorale systémique, y compris dans des cancers habituellement non répondeurs aux inhibiteurs de checkpoint, ce qui s’est traduit par une survie plus longue pour les patients avec des tumeurs résistantes à l’immunothérapie. Les résultats sont publiés dans Nature Cancer.
L’effet abscopal (c’est-à-dire à distance) de la radiothérapie avait déjà été décrit lors de l’observation du rejet de la tumeur irradiée mais aussi de sites métastatiques non irradiés. La radiothérapie aurait des propriétés immunomodulatrices qui s’expriment à distance : la mort cellulaire post-radique entraîne un relargage de composés dans le micro-environnement, qui à leur tour activent les cellules du système immunitaire. D’où l’idée d’associer radiothérapie et immunothérapie. Mais si la combinaison repose sur un rationnel fort, il y avait peu de preuves cliniques de son efficacité jusque-là.
Une analyse multi-omique des tumeurs à distance
Dans leur étude, les chercheurs américains ont passé au peigne fin, par analyses multi-omiques (notamment génomiques et transcriptomiques), des biopsies de tissus tumoraux non irradiés et d’échantillons sanguins prélevés chez des patients traités par pembrolizumab, soit seul (37), soit associé à une radiothérapie préalable (35). Au total, 293 prélèvements tissulaires et sanguins ont été recueillis, à l’inclusion et entre 3 et 6 semaines de traitement.
L’équipe a apporté une attention particulière aux tumeurs dites immunologiquement « froides », c’est-à-dire qui habituellement ne répondent pas à l’immunothérapie. Des biomarqueurs permettent de les identifier : faible charge de mutations tumorales (< 300 mutations par exome), expression nulle de PD-L1, mutations de la voie Wnt. Les trois ont été étudiés séparément dans l’étude : 43 patients ont présenté une tumeur avec une faible charge de mutation tumorale, 41 une avec expression nulle de PD-L1 et 10 avec mutation Wnt.
Les chercheurs ont d’abord montré l’effet abscopal de la radio-immunothérapie : avec la radiothérapie, les tissus non irradiés étaient significativement enrichis en interféron gamma, interféron alpha et en divers sets de présentation d’antigènes. Par ailleurs, l’expansion de clones cellulaires T (nouveaux et préexistants) à la fois dans les tumeurs à distance et dans le sang était contemporaine de réponses T autologues réactives contre des néoantigènes chez les participants avec survie prolongée. « Ces résultats vont dans le sens d’effets systémiques immunomodulateurs et antitumoraux de la radio-immunothérapie », soulignent les auteurs.
Une survie sans progression allongée pour les tumeurs froides
Qui plus est, les participants avec des tumeurs froides (quels que soient les biomarqueurs retrouvés) ont présenté une survie sans progression plus longue dans le groupe traité par radiothérapie. Cette observation coïncidait avec une induction des réponses systémiques immunitaires B et T, suggérant « une potentielle conversion de froid à chaud du micro-environnement tumoral avec la radio-immunothérapie », lit-on dans l’étude.
« C’était très enthousiasmant de boucler la boucle, a déclaré la Dr Valsamo Anagnostou, médecin chercheuse à la Johns-Hopkins et autrice senior. Nous n’avons pas que capturé l’effet abscopal, nous avons aussi fait le lien entre la réponse immunitaire et le pronostic clinique pour des tumeurs où l’on n’espérait pas voir de réponse à l’immunothérapie. »
Les auteurs suggèrent ainsi que les bénéfices de la radio-immunothérapie seraient les plus grands chez les patients avec une tumeur résistante à l’immunothérapie. Cela expliquerait d’ailleurs pourquoi, jusque-là, les essais cliniques avec des patients non sélectionnés ont donné des résultats mitigés pour la radio-immunothérapie. Cette combinaison « ouvre une opportunité dans le champ thérapeutique pour dépasser la résistance à l’immunothérapie », résument les auteurs. Pour la première autrice, il est même possible que ces résultats, observés en cas de résistance primaire, pourraient se retrouver « en cas de résistance acquise ».
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