DES DEUX LEVIERS pour faire baisser la mortalité du cancer colorectal, les campagnes grand public ont clairement privilégié le dépistage. Pourtant, une mesure n’excluant pas l’autre, il y a aussi la prévention. C’est ce que démontrent des épidémiologistes danois dans une analyse de l’influence du mode de vie chez près de 55 500 sujets.
Selon l’étude dirigée par Helene Kirkegaard, il suffirait d’adopter 5 règles d’hygiène de vie pour faire diminuer d’un quart les cas de cancer colo-rectal. Plus encore, si l’ensemble de la population s’attachait à améliorer son mode de vie en faisant des efforts sur une seule de ces règles, 13 % des cancers colo-rectaux seraient globalement évités. Mais de quels facteurs s’agit-il ? Le tabagisme, l’activité physique, le tour de taille, la consommation d’alcool et le régime alimentaire, rien de très surprenant, ces éléments avaient déjà été pointés du doigt. Selon une étude américaine publiée en 2000 les effets conjoints de six facteurs permettraient même d’éviter 70 % des cancers colo-rectaux.
192 items alimentaires
Pour leur étude, les chercheurs ont utilisé une cohorte déjà formée visant à évaluer le lien entre cancer et alimentation (« Diet, Cancer and Health Cohort Study ») et constituée d’habitants de Copenhague et d’Aarhus, tous âgés de 50 à 64 ans et indemnes de cancer lors de l’inclusion entre 1993 et 1997. Sur ces 160 725 individus, un tiers ont accepté l’invitation à participer au travail de Kirkegaard. Ainsi, 55 487 hommes et femmes ont été suivis sur une durée médiane de 9,9 ans. Il s’agissait pour eux de répondre à deux questionnaires, l’un sur leur mode de vie (facteurs sociaux, santé, famille, habitudes) et un second semi-quantitatif sur leur alimentation comportant 192 items. Ce dernier avait pour but de refléter la consommation alimentaire des 12 derniers mois. Pour chacun des items, il y avait 12 réponses prédéfinies, allant de « jamais » à « ≥8 fois par jour ». Le tabagisme était évalué sur la situation actuelle (fumeurs/non fumeurs), l’alcoolisme sur le nombre de verres/semaine, l’activité physique sur le nombre d’heures/semaine, loisirs et exercice professionnel confondus.
Indice d’hygiène de vie
Pour évaluer l’hygiène de vie, les épidémiologistes danois ont utilisé un indice allant de 0 (le moins sain) à 5 points (le plus sain), calculé sur la sommation du score pour chacun des 5 facteurs. Un point était ainsi accordé pour : statut non-fumeur ; activité physique d’au moins 30 minutes par jour, ou profession avec activité manuelle légère (postier) ou importante (forestier) ; consommation d’alcool ≤7 verres/semaine pour une femme et ≤14 verres/semaine pour un homme ; tour de taille <88 cm pour les femmes et <102 cm pour les hommes ; alimentation saine. Ce cinquième facteur était défini par 4 éléments diététiques à la fois : ≥600 g de fruits et légumes par jour, ≤500 g de viande rouge par semaine, ≥3 g de fibre par mégajoule d’énergie et ≤30 % de l’énergie totale représentée par des lipides.
« Petits » efforts, grands effets
L’une des forces de l’étude est d’avoir ajusté les résultats sur un grand nombre de facteurs confondants. Dans cette population danoise, il est intéressant de noter que 64 % étaient non fumeurs, dont 44 % ex-fumeurs, 60 % consommaient de l’alcool dans les limites recommandées, 82 % pratiquaient une activité sportive, 76 % avaient un tour de taille dans les normes et... seulement 2 % suivaient un régime alimentaire conforme aux 4 règles diététiques ! Un total de 678 cancers colo-rectaux, 420 coliques et 258 rectaux, ont été diagnostiqués au cours du suivi.
L’influence du mode de vie avait déjà été mise en évidence, en particulier dans une étude américaine sur les effets conjoints de six facteurs (indice de masse corporelle, activité physique, apport d’acide folique, consommation d’alcool, tabagisme et consommation de viande rouge). Dès lors, il n’était plus question de sous-estimer le phénomène, puisque selon l’étude 71 % des cancers colo-rectaux pouvaient être évités. Par rapport à ces données, l’étude danoise apporte un éclairage nouveau très intéressant pour sensibiliser la population. Il n’est pas nécessaire d’être « parfait » pour acquérir un degré de protection. Les médecins danois montrent bien que même un changement modeste de mode de vie, sur un seul facteur, entraîne une diminution substantielle du risque de cancer colo-rectal.
BMJ 2010 ; 341:c5504.
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